Inutile de mentir et de prétendre que je suis un
grand connaisseur de SONS OF FRIDA :
d’après les informations officielles fournies par le groupe lui-même, Tortuga serait déjà le quatrième album
de ces garçons… De tous ces albums je ne connais que The Bulgarian (paru en 2010). Et un split collaboratif intitulé Orchestra avec Rome Buyce Night (en
2012). Autant dire presque rien. Surtout, aveu que l’on me pardonnera
peut-être, que ces deux disques, perdus dans la masse, ont guère hanté la
machine à broyer de la musique du salon d’écoute de 666rpm. Mais il va en être
tout autrement avec ce nouvel album. Et je prends finalement mon ignorance
comme un petit avantage, celui du petit puceau qui ne sait pas encore qu’il va
très bientôt faire dans sa culotte.
Il y a de la bouteille chez les Sons Of Frida, du
peaufinage, de l’affinage, des séances de repassage amoureux, des nuits de
discussions enflammées, des heures de répétitions à transpirer… enfin c’est ce
que j’imagine en écoutant les six compositions de ce trop court album (une
demi-heure au compteur) et peut-être que je me trompe mais voilà exactement le
genre de disque, tous styles confondus d’ailleurs, dont on peut se dire qu’il
s’agit sûrement d’un disque enregistré par un groupe de vieux copains qui se
font plaisir mais qui savent également nous en donner. Non, je ne connais pas
personnellement les Sons Of Frida, je ne les connaitrai sans doute jamais –
sauf s’ils avaient un jour l’idée totalement saugrenue de donner un concert
dans mon bled provincial – mais c’est vraiment tout comme.
Le rock noisy voire noise de Sons Of Frida est
ainsi teinté de belles références, Jesus Lizard peut-être, Hammerhead/Vaz des
fois, Sonic Youth également (Cactus, Tibia) et puis on vient à s’en foutre complètement
de tout ça, estomaqués par les rythmiques renforcées – encore un groupe qui
n’oublie pas que la basse c’est très (très) important –, les guitares
tourbillonnantes et enivrantes, le chant nasillard, un peu en retrait dans le
mix mais toujours bien placé et cette trompette qui débarque sans crier gare (façon
brûlure sensuelle sur l’excellent Mirinda
ou façon corne de brume sur Tibia).
Des éléments qui forment un tout, un tout que les Sons Of Frida prennent un
malin plaisir (et avec un talent certain) à tordre, déformer et reformuler – une
personnalité à part entière.
Tortuga,
malgré ses nombreuses incartades bruyantes, s’achève sur les dix minutes de Teenage Mutant Crocodile Turtle et sa
longue déambulation finale en pente douce. Rien que pour cette apothéose en
terrain mouvant et, si chez 666rpm on avait cette habitude merdique de noter
les disques ou de leur donner des étoiles à la con, Tortuga devrait récolter la note maximale : ♥♥♥♥♥.