Nocturno Culto et Fenriz pourraient bien être les
deux mecs les plus casse-couilles de la terre. Mais c’est aussi pour ça qu’on
les aime et que l’on apprécie toujours autant DARKTHRONE, un comble pour deux
types qui ont bâti toute leur « carrière » (les guillemets s’imposent
car point de carriérisme ici) sur des idées et concepts aussi doucereux que la
misanthropie, la détestation de l’autre, le repli sur soi, l’exil au milieu des
grands espaces forestiers de leur Norvège natale. Ce n’est donc pas réciproque.
Mais ces deux-là font ce qu’ils veulent, toujours
en pleine crise d’adolescence, éternellement adolescents boutonneux même, et ils
jouent la musique qu’ils ont toujours aimée, lui rendant de vibrants hommages depuis
(environ) 2006 et l’album The Cult Is
Alive… On devrait plutôt parler de musiques au pluriel parce que Nocturno
Culto comme Fenriz ont des goûts variés, ce qui se vérifie encore pleinement
avec The Underground Resistance,
album A.O.C. 2013 de Darkthrone, un disque complètement schizophrène (et le
seizième album officiel du groupe). D’un côté Nocturno Culto est aux commandes
de la moitié des compositions et nous assène un thrash primitif et proto black
– quelque part sur les platebandes de Venom et de Hellhammer si on veut ; de l’autre
côté Fenriz se sent pousser des ailes, son cœur de viking s’envole dans les
airs et il nous propose des compositions axées autour de l’esprit heavy mental
80’s/speed metal germanique, héroïque, lyrique et guerrier, pour encore donner
quelques repères on situera tout ça entre Mercyful Fate et le Bathory mk3 sauce
odiniste.
Chaque compositeur chante sur ses titres à lui et
si Nocturno Culto étonne guère avec son habituel registre de black métalleux crust
et hargneux, Fenriz épate la galerie en tentant une imitation plutôt
convaincante de King Diamond (Valkyrie).
On remarque aussi que la production chez Darkthrone est toujours aussi rugueuse
et sévère, ce qui ne signifie pas que le son de The Underground Resistance ressemble à une grosse bouillabaisse
plombée, non, on entend tout ce qu’il faut, du metal bien roots et surtout un
grand fuck off aux amateurs des productions ultra policées et formatées qui
pullulent de nos jours du côté des groupes de metal extrême et/ou de hardcore,
noisecore, etc.
The
Underground Resistance pourrait n’être qu’un drôle de disque voire un
disque drôle de la part de deux papys métallurgistes et c’est vrai que l’on rit
beaucoup à son écoute mais on rit surtout de cette jubilation – partagée – qui
résulte d’une musique qui sonne véridique, certes « à la manière
de » mais dont l’authenticité ne fait pourtant aucun doute. Pionniers du
black metal tendance true, cult et tout ce qu’on voudra, Nocturno Culto, Fenriz
et, donc, l’entité Darkthrone ont gardé leur intransigeance d’antan, une
intransigeance d’ailleurs pas toujours très reluisante, pour désormais la
mettre uniquement au service de l’amour de la musique. Ces deux types, malgré
cette persistance à refuser toute apparition en concert et malgré leurs rares
déclarations, ne sont pas des misanthropes haineux et obscurantistes, ce sont
juste des gens qui s’amusent. C’est peut-être aussi pour cette raison
qu’aujourd’hui on écoute davantage les derniers enregistrements de Darkthrone
que l’incontournable et sainte trilogie A
Blaze In The Northern Sky/Under A Funeral Moon/Transilvanian
Hunger…
[The
Underground Resistance est publié en CD digipak – avec un patch très laid
pour les premiers arrivés – et en vinyle évidemment noir par Peaceville records]