Vendredi 31 aout : c’est déjà le deuxième
concert de la rentrée pour toute l’équipe rédactionnelle de 666rpm avec au
programme une affiche sympathique réunissant Torticoli et Berline 0.33, deux
groupes qui visiblement sont tombés très amoureux l’un de l’autre – ils
partiront d’ailleurs dès le lendemain en lune de miel du côté de Saint Claude
dans le Jura. Pour l’instant l’enterrement de vie de garçon se passe à La
Triperie, au beau milieu des pentes de la Croix Rousse à Lyon.
L’ambiance est très détendue : à 21 heures –
heure théorique du début du concert – la moitié d’une batterie traine encore au
milieu de la salle, la bière coule à flot, la préposée aux entrées râle parce
que personne a prévu de fonds de caisse et les Berline 0.33 n’en finissent pas
de terminer leurs balances. Ils ont un peu de mal à définir leur son, la voix
n’est pas à son meilleur niveau (sonore) et elle se retrouve trop noyée sous la
guitare et la basse. Le boss de l’endroit explique alors doctement qu’il faut juste
jouer beaucoup moins fort et que comme cela tout le monde arrivera à entendre
la chanteuse. Les patrons de bars et de salles de concerts sont décidemment des
gens bien raisonnables mais seulement voilà, les Berline 0.33, eux, ne le sont
pas vraiment, ils sont même comme la plupart des groupes, ils ne veulent pas
jouer moins fort et ils ont bien raison.
Après l’ouverture des portes au public c’est donc TORTICOLI qui commence. Et c’est aussi
au minimum la quatorzième fois cette année que je vois le groupe en concert –
que ce soit sous sa forme trio instrumental comme ce soir ou sous sa forme
quartet avec chanteur – et je commence sérieusement à m’inquiéter :
comment arriver à trouver de nouveaux mots et de nouvelles idées pour décrire
mon enthousiasme certain à propos de Torticoli ? Et d’ailleurs, cet
enthousiasme, est-ce-que je vais pouvoir le retrouver lui aussi encore une
fois ?
La réponse est oui même si ce ne fut pas là le
meilleur concert du trio auquel j’ai assisté. Peut-être que maintenant
j’attends quelques changements de la part d’un groupe qui n’en a pas vraiment
envie et souhaite plus simplement pousser jusqu’au bout sa logique de
déstructuration d’un blues mutant et bruyant... mais Torticoli ça reste toujours très
bien en concert alors disons que l’appréciation générale du chroniqueur dépend
de son humeur du jour et que je suis du genre grognon.
Une nouveauté cependant avec l’apparition sur deux
titres d’Emilie, la chanteuse de Berline 0.33. Elle a préparé des textes sur un
cahier dont elle se sert comme aide-mémoire et même si l’association des deux
était parfois encore un peu hésitante (normal pour une première fois et puis un
peu de fébrilité ça n’a jamais fait de mal à personne) elle a aussi apporté un éclairage
intéressant sur des compositions que l’on croyait trop bien connaitre. OK,
c’est moi qui ai tort.
Les BERLINE
0.33 jouent en second et la Triperie est pas loin d’être aussi blindée qu’un
guitariste de Torticoli : l’atmosphère va bientôt se révéler irrespirable et
suintante tellement les gens sont serrés et transpirent dès que l’un
d’eux se décident à remuer ses fesses – or tout le monde va se faire avoir par
Berline 0.33 et se retrouver obligé de payer de sa personne.
Le groupe a fini par prendre ses marques malgré la
sono un peu récalcitrante de la Triperie et va inclure quelques nouveaux titres
dans sa set-list (un deuxième album est en préparation et serait presque prêt).
Ceux-ci vont se révéler tout simplement excellents. Apres, violents, sombres et
tordus. La musique de Berline 0.33 délaisse désormais son côté trop gentiment
new-wave (il n’y a pas de synthétiseur sur scène) et creuse un peu plus dans
une direction plus viscérale et épaisse, le côté méchant du post punk.
L’autre bonne surprise c’est que les anciens
titres joués semblent profiter de ce traitement et gagnent eux aussi en noirceur
et en épaisseur. Je pense notamment à la guitare au son bien plus mordant et
qui surtout ne se laisse pas envahir par la basse (qui est pourtant toujours
aussi omniprésente). On peut dire que Berline 0.33 est passé à un niveau au
dessus, a perdu une partie de cette naïveté des groupes encore un peu jeunes et
que le futur album, si le groupe persiste dans cette voie, s’annonce comme un
fantastique concentré d’impétuosité fiévreuse et inquiète. A bientôt.
[quelques photos enfumées et transpirantes du
concert sont visibles ici]