Sagittarian
Domain a été publié par les Editions
Mego coup sur coup après un Audience
Of One (chez Touch records) plutôt décevant
bien que démontrant de la part d’OREN
AMBARCHI une volonté certaine de continuer à aller de l’avant et de changer
une nouvelle fois d’horizon. Comme pour son précédent disque l’australien n’a
pas enregistré tout seul Sagittarian
Domain, se faisant ici très discrètement accompagner d’une petite section
de cordes : Elizabeth Welsh au violon, James Rushford à l’alto et Judith
Hamann au violoncelle. Lui-même a à nouveau multiplié les instruments (guitare,
Moog et batterie), s’octroyant même un peu de chant dans un registre très
fantomatique.
Sagittarian
Domain étonnera peut-être celles et ceux qui connaissent déjà les albums
solo les plus fameux d’Oren Ambarchi (pour information citons les magnifiques
et inévitables Suspension en 2001, Grapes From The Estate en 2004, In The Pendulum’s Embrace en 2007 ou la
compilation Intermission 2000 - 2008 –
tous ces disques ont été publiés par Touch et sont encore disponibles). Tout
comme celles et ceux qui préfèrent plutôt ses multiples collaborations en
matière de musiques improvisées et/ou bruitistes seront également déroutés. Mais
Sagittarian Domain ne surprendra pas ceux
qui ont déjà compris qu’Ambarchi est finalement un musicien aussi curieux que divers :
qu’il soit capable de jouer avec les microtonalités d’un Keith Rowe comme avec
les déferlements sonores d’un Keiji Haino en dit long sur sa versatilité supposée, une versatilité telle
un camaïeu déclinant subtilement toutes les nuances d’une même couleur. Cette versatilité en forme de puzzle en trompe l’œil reste d’autant plus remarquable qu’elle contribue totalement à l’identité d’un musicien passionnant et reconnaissable entre mille.
Il n’y a pas sur Sagittarian Domain de fourmillements virant au tremblement de terre
ni de crépitements analogiques en mode piqures électriques mais une longue et
unique pièce (trente-six minutes) parait-il enregistrée sous le coup d’une
inspiration soudaine. Basé sur une rythmique aussi insistante qu’inamovible, Sagittarian Domain explore
volontairement les effets de l’hypnose et de la transe en matière de
répétitivité et d’empilement/succession de couches sonores. Oui on peut penser
à certains groupes allemands de la fin des années 60 et début 70 et qui déjà
maniaient le chamanisme psychédélique et les rythmiques à la rigidité élastique
comme personne. La vision qu’offre Oren Ambarchi de cette musique est pourtant
singulière et électrisante car elle s’appuie sur ses propres explorations
sonores à la guitare, explorations dont il sort des sons uniques et qui
n’appartiennent qu’à lui.
Sagittarian vire
ainsi peu à peu au voyage cosmique, le pattern rythmique entêtant propulsant
les expérimentations sonores du musicien toujours plus loin. Les apparitions
d’abord fugaces des cordes ressemblent à une pluie d’étoiles filantes et ce
sont ces mêmes cordes qui auront le dernier mot pour un final d’allure très
classique et emprunt d’une mélancolie apaisante : le voyage est terminé
mais il fut aussi beau qu’hypnotique.
[cette chronique aussi élogieuse qu’assumée, vous
pouvez la retrouver à quelques nuances près dans les pages du #12 de new NOISE qui vient de paraitre en kiosque –
buy or die]