Regarde bien cette magnifique affiche* : elle
annonce un concert de Grrrnd Zero hors
les murs. Encore un. Et cela fait plus d’un an que cela dure. Le collectif est
définitivement expulsable au 31 décembre prochain mais prépare pour bientôt un
ultime baroud d’honneur avant de se retrouver relogé dans les poubelles de la
communauté urbaine et les caniveaux de la ville de Lyon.
En attendant quelques concerts fleurissent ici ou
là, dans des lieux divers et variés, et/ou uniquement sur invitation, ces
concerts se transformant en drôles de soirées avec bien peu de visibilité extérieure
pour un éventuel public de curieux. Si tu ne connais pas l’organisateur du dit
concert il y a de bonnes chances pour que tu ne reçoives pas le mail magique
t’annonçant la date et t’invitant à y participer en toute discrétion.
J’imagine que procéder ainsi doit arracher quelques larmes de douleurs aux gens de Grrrnd Zero parce que c’est vraiment tout le contraire d’une démarche visant simplement
à diffuser librement, avec peu de moyens mais avec beaucoup d’abnégation, des
musiques différentes dont sinon on n’entendrait pas assez parler. Autant dire
que là on tourne en rond parce que la musique, plaisir individuel et égocentré
par excellence, est également une question de partage voire de communion.
Mais je me trompe sûrement parce que pour ce
concert réunissant Novembre et Chausse Trappe plus de soixante-dix personnes
ont rappliqué au lieu dit et pile à l’heure s’il vous plait. C’est donc que le
bouche à oreille fonctionne encore parfaitement dans notre monde dominé par
l’instantanéité volatile de l’information ou l’omniprésence creuse des médias
numériques** et, plus important encore, cela signifie qu’il y a réellement un
public pour ce genre de musique(s), pour ce type de démarche et pour la vision
que défend Grrrnd Zero depuis sept années et des poussières. Quelque part c’est
rassurant mais c’est aussi extrêmement rageant : quel succès – certainement
plus important encore – aurait rencontré cette soirée si elle avait été
annoncée autrement que par quelques mails à la sauvette ?
[…]
Le premier groupe de la soirée s’appelle NOVEMBRE
et vient de valence. Un trio instrumental – deux guitares et une batterie – qui
joue du post rock pas très original, très scolaire, pas très bandant et souvent
ennuyeux. Je vais m’arrêter là parce que Novembre est du genre tout jeune
groupe qui n’a que peu – voire pas du tout – de concerts à son actif et que
cela ne sert à rien d’écharper la jeunesse innocente et inexpérimentée. Tout le
monde a le droit de grandir.
Jusqu’ici presque complètement inconnu des
services de renseignements de 666rpm, CHAUSSE TRAPPE a publié à la fin
de l’année 2011 un album *** dont l’écoute même distraite de quelques extraits s’est
révélée très excitante. Chausse Trappe ce sont quatre musiciens : un
batteur qui n’en démord pas tout en jouant avec énormément de finesse, deux
bassistes/guitaristes et un violoniste. Ah ! j’en vois qui haussent les
sourcils et les épaules rien qu’à l’évocation du nom de cet instrument
généralement associé à des musiques aussi passionnantes que (fais ton
chois) : la musique folklorique celtique, la chanson française diamantaire
et réverbérée ou les valses de Vienne. Mais ils ont tort.
Chausse Trappe pratique une musique instrumentale qui
utilise la répétition jusqu’à la rupture et qui évolue par micro glissements –
ce qui n’exclut pas de temps à autres quelques changements plus francs du
collier, des changements souvent sous la forme d’un instrument montant
subitement en volume et dépassant alors tous les autres : il finira à son
tour par être rejoint et le groupe aura ainsi franchi un nouveau pallier vers
la transe vaudou et l’exubérance shamanique.
Ainsi Chausse Trappe est un groupe qui joue à la fois sur le délire électrique et la divagation sensorielle : les morceaux sont logiquement très longs, très répétitifs (donc) et s’apparentent aux tourbillons psychédéliques et kraut de la fin des années 60/début des années 70. Une danse étriquée et complètement folle mais vraiment irrésistible, pas très loin de l’idée d’une hallucination musicale, tout en gardant une épaisseur organique très forte. De la musique de hippies qui tourne à l’hystérie collective. Des hectolitres de sueur et des crampes musculaires au service de l’oubli. Encore bravo. Et si ces garçons jouent pas trop loin de chez vous, allez-les voir.
Ainsi Chausse Trappe est un groupe qui joue à la fois sur le délire électrique et la divagation sensorielle : les morceaux sont logiquement très longs, très répétitifs (donc) et s’apparentent aux tourbillons psychédéliques et kraut de la fin des années 60/début des années 70. Une danse étriquée et complètement folle mais vraiment irrésistible, pas très loin de l’idée d’une hallucination musicale, tout en gardant une épaisseur organique très forte. De la musique de hippies qui tourne à l’hystérie collective. Des hectolitres de sueur et des crampes musculaires au service de l’oubli. Encore bravo. Et si ces garçons jouent pas trop loin de chez vous, allez-les voir.
[pour les amateurs photos-souvenirs c’est
par là que ça se passe]
* il se murmure avec insistance que l’auteur anonyme de cette affiche
reprendrait durablement et frénétiquement l’organisation de concerts sur Lyon
** bonjour, vous êtes juste en train de lire un
blog sur votre ordinateur
*** un disque publié par Kythibong et dont on reparlera peut-être,
un jour…