GERDA
+ DEAD LIKE ME = Me And Gerda Are Both
Dead Like You.
Cela fait un bon petit moment maintenant que GERDA
racle au plus profond de la noirceur et du mal-être pour en extraire un précieux
hybride de noise et de hardcore sombre et torturé. Mais sans toutefois en
retirer la moindre petite miette de reconnaissance, si ce n’est de la part de
quelques trop rares initiés et autres monomaniaques. Gerda est pourtant l’un
des groupes les plus doués de sa génération mais reste bien trop discret :
on était malheureusement sans nouvelles depuis 2009 et le troisième et formidable
album du groupe (chez Wallace records). Alors, pensez donc, ce split qui nous
offre enfin la possibilité d’écouter du nouveau et du neuf, un peu que l’on
s’est jeté dessus. Et même plutôt deux fois qu’une.
Pour son troisième album Gerda avait décidé de ne pas donner de titres à ses compositions mais celle que le
groupe propose sur Me And Gerda Are Both
Dead Like You est pourtant affublée d’un XXXX que l’on imagine alors par défaut. Qu’importe : ces neuf
minutes et quelques de lave en fusion et au débit rampant – cette basse qui
terrasse tout sur son passage – mais non dépourvues d’un certain effort
mélodique (des mélodies tordues, évidemment) sont ce que le groupe a enregistré
de plus terrifiant et de plus fort à ce jour. Ce qui frappe c’est que Gerda est
aussi pertinent et efficace lorsqu’il s’agit de tout envoyer valser, ce que le
groupe fait avec une précision démoniaque sur tout le début du titre, que
lorsque le subterfuge du faux-semblant pointe le bout de son nez. Par « faux-semblant » on
pense à ce passage débutant à peu près au bout de trois minutes et demie après
une suite d’explosions sans pareilles, un passage qui en fait tient tout du
faux-plat semé d’embuches ou de la montée insidieuse et irréversible d’une
tension qui ne se démentira donc pas. Gerda nous emmène très loin, bien plus
loin que ce l’on accepterait d’ordinaire et cette montée terrifiante de presque
six minutes se transforme en un pur moment de jubilation abyssale et primale.
De l’autre côté on découvre DEAD LIKE ME qui œuvre dans un
registre nettement moins original mais – et c’est très important – Dead Like Me
ne passe absolument pas inaperçu après la tornade Gerda. C’est déjà beaucoup
mais on se plait également à trépigner d’un plaisir intense sur les trois
titres* très chaotiques de ce groupe de Pau (me semble-t-il). Les descendants
de Botch ou Deadguy sont légions mais bien peu arrivent pourtant à convaincre,
peut-être tout simplement parce qu’on est quand même en 2012. Or Dead Like Me
fait partie de ceux qui justement tirent leur épingle du jeu dangereux de la
redite en apposant le sacro-saint double label qualité/savoir-faire/tradition et
conviction/sincérité à des compositions toujours sans pitié et qui envoient
sévère. J’admets que c’est mon côté réactionnaire et conservateur qui parle
ainsi mais j’assume.
Me And Gerda Are Both Dead Like You
est en outre un objet absolument superbe. Cet artwork avec la gueule irremplaçable
de ce cher Buster Keaton est tout simplement une idée de génie. Le disque a été
pressé à 500 exemplaires par un nombre déraisonnable de labels chez qui il est
toujours disponible à ce jour : Celestine
records, Left Hand records, Not A Pub, Prototype records, Shove records**,
Swarm Of Nails records et Wallace records.
* avec des textes en français que même un
traducteur auprès des Nations Unis ne pourrait pas comprendre
** label dont je n’ai
pas retrouvé le contact, désolé…