Il commence vraiment sous les meilleurs auspices ce
nouvel album de Dead Can Dance : Addis
est une chanson extrêmement envoutante, marquée par un rythme lancinant, une
mélopée orientale et des arrangements de cordes précieux… Décidément, je n’en
attendais pas autant de cet improbable retour de mes amis Lisa et Brendan, dans
la droite lignée des meilleurs moments de Within the Realm of a Dying Sun
et ███ ████████ █████ █ ██████ ██████ ██ ███████████ ███ █████ █ ███████ !!!??
Oui, quoi ? OK, pardon, excusez-moi. Le comité Posture Idéologique &
Défonce Musicale de 666rpm s’occupera peut être un peu plus tard de la dernière
œuvre de Mademoiselle Lisa Gerrard et du Damoiseau Brendan Perry alors ne
perdons pas plus de temps.
Addis
est en fait inspiré d'un mantra et est surtout le premier titre d’Advaitic Songs,
le cinquième album d’OM. Le descriptif
qui en a été fait juste au dessus n’est pourtant pas une erreur et Addis marque le début de certains
changements dans la musique du groupe composé du bassiste/chanteur Al Cisneros
(Sleep) ainsi que du batteur Emil Amos (Grails). Des changements que l’on
aurait pu deviner et que de toute façon on ne pouvait que souhaiter : d’un
côté il faut bien admettre que la formule du duo commençait à sérieusement
tourner en rond et à sentir l’encens cramé et l’eau croupie abandonnée au fond d’un baptistère ; un autre point de vue consiste à dire que OM a toujours été
porté sur le mysticisme et le religieux ne serait-ce qu’au travers de ses
visuels – regardez un peu combien de pochettes du groupe reprennent une
iconographie sacrée – mais aussi de ses textes et de certaines de ses ambiances
musicales.
Alors fini les tâtonnements à base d’ambiances
tibétaines un peu faciles et de larmoyances de schtroumpf grognon en mode je
vous ai compris mais pas vous, Al Cisneros a donc sauté le pas, sans doute
conscient que le remplacement de Chris Haikus (également ex batteur de Sleep)
par Emil Amos n’avait jusqu’ici été guère satisfaisant ni suffisant pour
insuffler un nouvel élan à OM : God Is
Good, le précédent album du duo et le premier avec Amos n’était pas
vraiment une réussite. Le doom shamanique de OM mue donc sur Advaitic Songs en une musique toujours
plus imprégnée d’emprunts moyen-orientaux et levantins et rehaussée
d’arrangements de cordes (violon et violoncelle), de flute, de percussions
additionnelles (tablas), de tamboura (une sorte de luth) ou de samples. Le chant
féminin sur Addis est assuré par Kate
Ramsey et il est vrai que le résultat semble étonnamment proche d’un Dead Can
Dance opiacé.
Mis à part sur State
Of Non-Return (et dans une bien moindre mesure sur Gesthsemane) qui garde les accents telluriques du OM d’avant, tout Advaitic Songs est parcouru par cette
nouvelle vision qu’a Al Cisneros de sa musique. Un vrai courant d’air frais,
presque une bénédiction et malgré la crainte de tomber dans une sorte de
mysticisme de pacotille façon décorum baba-kitsch, il n’en est rien. Admettons
que l’on peut rester complètement insensible à la mystique et à l’attirance
religieuse d’OM – tout comme les écoutes répétées du génial Hum-Allah-Hum-Allah-Hum-Allah n’ont pas
converti tous les fanatiques de Pharoah Sanders à l’Islam – mais il existe bel
et bien un esprit de transcendance que l’on peut partager à l’écoute de cette
musique, simplement pour la beauté de la chose, en tout bien tout honneur
pourrait-on même dire.
Advaitic
Songs est parcouru dans son entier par des rythmes d’une lenteur ajustée
pour un ensorcellement presque assoupi, le rituel devient réellement envoutant mais
conserve une torpeur certaine. La basse d’Al Cisneros tourne toute en rondeur,
son chant s’efface presque jusqu’à la litanie et Advaitic Songs se conclue de manière presque trop classique sur un Haqq Al-Yaquin aux arrangements finaux
un poil trop luxurieux.
[Advaitic
Songs est publié en CD et vinyle – un double 12’ qui tourne à 45rpm et qui
donc sonne terrible – par Drag City]
OM c’est aussi des concerts envoutants mais on
peut se demander ce qu’il en sera désormais avec un album aussi léché qu’Advaitic Songs et dont les arrangements
semblent difficiles à reproduire sous la même forme. On pourra peut-être répondre
à toutes ces questions essentielles lors de la prochaine tournée européenne
d’OM : celle-ci passera par Lyon et le Sonic le dimanche 23 septembre – en
espérant que la salle qui actuellement joue la montre, effectue des travaux
conséquents et des aménagements importants pour se remettre aux normes et
rouvrir le plus tôt possible, réussira son pari.