Pour être honnête je ne fous que très rarement les
pieds au Warmaudio, un
« complexe musical » (comme ils disent) incluant locaux de
répétitions, studio et salle de concerts, le tout avec un bar, de la
restauration rapide et un parking tellement grand que même les tâchons
automobilistes dans mon genre n’ont pas peur de s’y aventurer sans avoir à
faire des marches arrières ou autres manœuvres improbables pour en ressortir.
Plutôt bien situé à la périphérie de Lyon, Décines
c’est quand même pas à l’autre bout du monde, le Warmaudio accueille
régulièrement nombre de concerts dont pas mal de concerts hardcore. Bande de lyonnais,
sachez que la prochaine date à noter sur vos agendas est la venue des éternels Adolescents le
30 juillet prochain (un concert intergénérationnel).
Le vendredi 29 juin LFK organisait donc au Warmaudio
une bonne petite soirée avec quatre groupes : Michel Anoia, Piss Off!,
Moms On Meth et Elizabeth. Un concert organisé joyeusement à l’arrache – tu as vu la gueule
du flyer ? –, bon esprit et à prix libre mais qui aurait mérité
d’accueillir beaucoup plus de monde. Tant pis pour les absents. Moi j’écope
comme tous les présents qu’un X
vert fluorescent dégueu sur la main, genre Herbert West est un straight edge.
Le premier groupe qui joue s’appelle donc Michel Anoia et non, ce n’est
pas une blague, c’est vraiment le nom qu’ont choisi ces quatre gusses qui
viennent de Lyon. Le t-shirt Dillinger Escape Plan du bassiste devrait vous
mettre sur la voie, le fait qu’il attaque son instrument avec tous ses petits
doigts également : Michel Anoia joue extrêmement serré et très technique.
Musicalement ça donne un mélange assez courant
entre hardcore haute technologie (Dillinger Escape Plan donc) et death metal pétaradant.
Je ne suis pas trop d’humeur à me forcer au sujet d’un truc auquel je
n’accroche pas plus que ça habituellement et ce uniquement par pur apriori – oui,
les aprioris c’est mal mais je dois préciser qu’il ne s’agissait que du deuxième concert de Michel Anoia – et donc je laisse ces jeunes gens à leur chaos
imminent pour me retrouver dehors à l’air libre et en bonne compagnie. C’est là
que j’apprends que les suisses d’Elizabeth ne sont toujours pas arrivés. Un
vague sentiment d’inquiétude m’étreint.
Le second groupe qui joue s’appelle Piss Off!, un
très chouette nom comme je les aime et surtout un groupe à l’opposé de son
prédécesseur, qui va droit au but, sorte de crossover metal/hardcore 80’s très
efficace. D’habitude les Piss Off! sont quatre mais le chanteur n’a pas pu se
libérer, tout intermittent du spectacle bloqué à l’Opéra de Lyon qu’il est, et
c’est principalement le batteur mais aussi un peu le guitariste qui le
remplacent au pied levé. Et ça fonctionne parfaitement, même sans frontman sur
le devant de la scène et qui saute dans tous les sens.
Détail qui ne gâche rien, le batteur raconte des
bonnes blagues entre chaque titre et même si le guitariste trouve le moyen de
griller sa tête d’ampli, le concert de Piss Off! est un joyeux moment de punk
as fuck/hardcore débridé et défouloir. Je n’en demandais pas tant pour passer
un bon moment et avoir le sourire aux lèvres. Bon les gars, je crois que maintenant
vous n’avez plus qu’à virer votre chanteur titulaire (non, je plaisante bien
sûr). Et c’est à la fin de concert de Piss Off! que j’apprend qu’Elizabeth
vient enfin de débarquer au Warmaudio. Soulagement.
Place à Moms On Meth. Ce qu’il y a de
marquant avec ce groupe c’est qu’il ne s’agit pas d’une fille au chant avec
trois ou quatre poilus qui assurent correctement derrière mais d’un groupe
comme les autres avec une fille au chant : tout est dans la non attitude affichée
de cette dernière – le groupe demandera moins de lumière pour jouer, etc. Je le
précise parce que, bien que je puisse me tromper complètement, ceci me semble
complètement voulu. Le refus de mettre en
avant ce qui n’a pas à l’être mais l’est trop souvent chez d’autres
groupes et ce pour toutes les plus mauvaises raisons du monde.
Pas de pose chez Moms On Meth mais un plaisir
évident. Comme je suis plutôt du côté du bassiste je peux apprécier la classe
indéniable mais discrète de ce garçon ce qui ne m’empêche pas non plus
d’admirer le batteur ni les pitreries du guitariste (qui joue sur le même genre
de guitare que Rudolf Schenker, K.K. Downing ou James Hetfield mais je ne crois
pas que cela ait un quelconque rapport).
Sinon le fastcore de Moms On Meth est toujours
aussi bon à se prendre en pleine face – dommage que le deuxième guitariste
n’ait pas pu venir lui aussi – et toujours aussi ébouriffant. On reparle
bientôt du premier 7’ que le groupe vient tout juste de publier.
Plus j’écoute le Where Vultures Land d’Elizabeth et
plus j’aime ce disque. En concert Elizabeth est moins contrasté et tortueux,
plus direct et plus frontal, encore plus agressif et plus violent mais le
groupe est tout aussi bon. Je ne regretterai donc pas très longtemps les
nuances de l’enregistrement – ce qui n’a pas empêché le jeu du guitariste, un
vrai gosse, d’être toujours aussi inventif et abrasif – et ce concert
d’Elizabeth a été un bon et un grand moment de furie hardcore. Au passage le
groupe a repris en milieu de set le Nervous
Breakdown de Black Flag, ce qui en dit assez long sur l’optique musicale de
ces quatre garçons. Et on ne va pas s’en plaindre, bien au contraire.
Que cela n’enlève rien aux autres groupes de la
soirée mais Elizabeth c’est clairement le niveau au dessus, sûrement grâce à ce
chanteur, ancien Nostromo rappelons-le, un chanteur qui a de la bouteille, qui
sait occuper l’espace (bon, peut être mec que tu jongles un peu trop avec ton
micro) et qui braille comme un forcené sans défaillir. En même temps toute
cette puissance et toute cette violence musicale respirent le plaisir de jouer
sur scène – le groupe a quand même terminé son concert à fond devant quinze
personne et ce sans faiblir aucunement – et de tout partager. Merci et à très
bientôt j’espère.
[toutes les photos floues et granuleuses du
concert sont visibles ici]