Il est vraiment précédé d’une très sale réputation
ce troisième album des MOVIE STAR
JUNKIES. Il paraitrait même que la fête est définitivement terminée, que
tout le monde est rentré bien sagement à la maison et que l’entrain d’antan a
laissé la place à une ambiance lénifiante au possible… Alors ? Gueule de
bois, repos du guerrier, sieste digestive et citrate de bétaïne/alka seltzer à
la cantonade ?
OK, on admettra qu’avec Son Of The Dust les Movie Stars Junkies s’éloignent plus que
jamais de la furie maritime et déjantée du génial Melville et de la gouaille alcoolisée/fin de partie d’A Poison Tree. Mais avec le recul on
s’aperçoit surtout que Son Of The Dust
s’inscrit parfaitement dans une certaine logique, que les trois albums des
Movies Stars Junkies (quatre si on compte l’excellente et indispensable
compilation de singles et raretés Junkyears)
forment un tout et que chaque enregistrement représente en quelque sorte une
facette différente de ce tout.
Alors ne boudons pas notre plaisir parce qu’il est
tout simplement excellent ce Son Of The
Dust et il l’est instantanément, dès les premières écoutes et sans
discussion possible – alors que son prédécesseur direct A Poison Tree avait lui nécessité un petit peu d’apprentissage,
sans doute parce qu’il avait un côté un peu trop forcé par moment. Certainement
plus sereine et moins éthylique, la musique des Movie Stars Junkies n’en est
pas pour autant devenue insipide. Certes les rythmes trépident désormais
rarement, les guitares sont passées en mode aigrelet, le chant susurre voir
croonise à l’envie, les chœurs féminins envahissent chaque retour de refrain,
Nick Cave et ses Bad Seeds viennent de dépasser
la quarantaine sans s’en rendre vraiment compte et on sent surnager comme
une légèreté presque pop. Pop est en fait un mot bien mal choisi, disons plutôt
que les Movie Stars Junkies ont travaillé leurs mélodies et leurs arrangements
sur l’établi, se sont débarrassés du côté trop gouailleur, ont pissé un bon
coup toute la bière frelatée qu’il leur restait dans le bide, ont épousseté
leurs vestes de costumes dépareillées, ont rajouté une fleur un peu fanée à
leurs boutonnières, ont lustré leurs vieilles chaussures en cuir fatigué sur le
derrière des jambes de leurs pantalons et ils sont passé en mode dandy froissé
et piquant – non pas le dandy qui souffre parce qu’il est trop défoncé et qu’il
a des remords, qu’il pense à son amour perdu et qu’il prétend regarder dieu
dans le blanc des yeux mais le dandy consciemment décadent et un rien rigolard
qui se souvient de tout, recommencera peut-être parce qu’il ne veut renoncer à
rien.
Si j’osais – tant pis, j’ose… – je dirais même que
l’euphorie discrète et élégante qui se dégage de Son Of The Dust est une euphorie amoureuse mais lucide. Rien à voir
avec du gnangnan et du va comme je te montre mon petit cœur tout bleu (quoique)
mais plutôt le plaisir éphémère d’une joie peut-être sans lendemain et dont on
ne veut pas manquer une miette. En cela Son
Of The Dust n’a rien de très différent de Melville et d’A Poison Tree :
la musique des Movie Star Junkies est toujours la musique d’un quotidien que
l’on s’efforce de rendre différent. Exprimer son ressenti pour une musique sous
un angle d’utilité quelconque c’est mal mais s’il me fallait vraiment le faire voilà
bien la seule raison qui m’y pousserait : aujourd’hui et rien d’autre (et,
bien sûr, exactement la même chose demain).
[Son Of The
Dust est publié sous la forme d’un
combo vinyle + CD par deux labels : Outside Inside
records et Wild Honey records]