mardi 10 juillet 2012

Ordinaria Hit / Funcionário





ORDINARIA HIT est un groupe brésilien – de São Paulo pour être un peu plus précis – et voilà un détail qui me trouble. D’un côté il arrive trop souvent que je ne puisse pas m’empêcher de mentionner la provenance géographique d’un groupe tout simplement parce que je suis extrêmement snob et que de préciser « les Hawks d’Atlanta » ou bien « Xaddax de Brooklyn/New-York City » ça me parait très avisé et infiniment classe alors que, on est bien d’accord, cela n’a pas plus de signification que de préciser « Café Flesh de Jarnac » et « ChooChooShoeShot de Nantes ». Tant qu’à faire je préférerais de très loin prétendre que Mats Gustafsson est mon voisin de pallier direct et que je l’entends jouer tous les jours de l’autre côté du mur mais ça non plus ce n’est pas possible.
D’un autre côté souligner qu’Ordinaria Hit est un groupe de São Paulo me plait tout simplement parce que voilà le premier groupe brésilien trouvant grâce à mes oreilles. Le piège maintenant serait de donner dans un déterminisme à la con – ce que font presque tous les chroniqueurs de disques dès qu’ils précisent la ville d’origine d’un groupe ou d’un musicien pour des raisons autres que musicales. Un bon contre exemple : s’il est important de préciser que Napalm Death vient de la ville industrieuse anglaise de Birmingham c’est parce que Napalm Death est à la base un groupe de prolétaires, a toujours été engagé politiquement et que cela se ressent dans sa musique ; autre contre exemple, encore plus pertinent : rappeler que Faih No More est originaire de San Francisco n’enlève rien au fait que ce soit un groupe totalement merdique. Dans le cas d’Ordinaria Hit il n’y a pas de soucis à avoir car je ne sais rien de São Paulo ou du Brésil, que je ne veux rien en savoir et que ma mauvaise foi naturelle ne me permettra pas ainsi de procéder à des raccourcis douteux, ignobles voire insultants. Par contre, étant esthétiquement plutôt allergique à la culture latine en général (et ce sans aucun doute par pure ignorance, je l’avoue sans peine) c’est un profond étonnement qui a accompagné l’écoute de ce Funcionário qui me semble être le troisième album d’Ordinaria Hit.
J’admets que ce qui me plait dans ce groupe c’est avant toutes choses son côté très européen et post punk tribal. Il est donc définitivement prouvé que je ne suis effectivement qu’un incorrigible ethnocentriste. Ça, c’est fait. Le line-up d’Ordinaria Hit est assez étonnant puisqu’il comprend un guitariste, un bassiste, un batteur et… un violoncelliste. L’équation post punk tribal européen + violoncelle a (presque) une seule et unique solution, The Ex évidemment et plus précisément The Ex avec Tom Cora. On ne comparera jamais Funcionário avec les deux chefs-d’œuvre que sont Scrabbling At The Lock et And The Weathermen Shrug Their Shoulders mais il y a parfois un tout petit peu de ça. Ordinaria Hit n’a pas son pareil pour dégainer des fulgurances imparables mais aussi pour louvoyer façon impro/musique expérimentale. Tout ceci reste très solide et très direct, un peu bruyant et tendu mais également un peu flottant parfois – l’imagination et la prise de risque ne suffisant pas toujours.
S’il y a une critique à adresser au groupe c’est à propos du chant : aucun des quatre musiciens n’est crédité comme chanteur à part entière sur la pochette de Funcionário or l’écoute du disque permet de déterminer que chacun s’y colle plus ou moins sans toutefois se montrer convaincant. Heureusement que le chant est finalement plutôt rare sur Funcionário. La langue utilisée – non Ordinaria Hit ne chante pas en anglais – pourra également en refroidir quelques uns. Mais ce n’est qu’un détail qui ne doit pas entacher la bonne surprise d’une telle découverte.

Funcionário est publié par le groupe lui-même et en total autoproduction. Ordinaria Hit se paie en outre le luxe d’une tournée européenne en ce mois de juillet 2012 – tournée facilitée par le fait que le batteur Rodrigo est actuellement résident à Barcelone. Quelques dates qui passent par Marseille (au O’Bundies le 14 juillet et avec les géniaux Death To Pigs s’il vous plait), à La Ferme de Mauriac le 15 juillet* ainsi qu’à Toulouse le 17 (La Dernière Chance).

* aux dernières nouvelles ce concert est annulé mais remplacé par un autre, à Montpellier, dans un squat encore non spécifié – renseignez-vous si vous le pouvez !