mercredi 11 juillet 2012

Monarch / Omens





Un maléfice ou un sortilège sont par définition deux choses contre lesquelles on ne peut pas grand chose. Et il en va exactement de même avec la musique de Monarch, insondable malédiction et éternelle mise à l’épreuve. Les albums du groupe se suivent et se ressemblent peut-être mais avec le temps les effets de cette musique ensorcelante restent intacts et inévitables. Depuis ce double CD (trois titres seulement !) publié en 2004 sur Throne records et en passant par Speak Of The Sea et Die Tonight (tous deux réunis plus tard sur Dead Men Tell No Tales par Crucial Blast), un formidable split partagé avec Eluvium puis les albums Mer Morte et Sabbat Noir, Monarch n’a donc poursuivi qu’un seul but, aussi extrême qu’inflexible, celui de repousser la violence doom et down-tempo toujours plus loin.
Monarch y est toujours parvenu et y parvient encore avec Omens, son premier album pour At A Loss recordings. Seulement la démarche de Monarch n’a pas seulement à voir avec un durcissement quantitatif et une radicalisation grandissante de sa musique – radicale et sans appel cette musique l’était dès le départ – mais également avec une noirceur et une profondeur renouvelées : sur Omens les titres Blood Seeres et Black Becomes The Sun sont une nouvelle démonstration à base de riffs monolithiques et malades, de basses turbofuzzées, de rythmes titanesques et de hurlements de sorcières or ils dévoilent également ces passages plus flottants et finalement plus inquiétants parce que plus malsains et que l’on apprécie tant.
Depuis quelques albums (Mer Morte pour être plus précis) Monarch enlise sa musique dans des sphères dangereusement brumeuses et toujours plus incantatoires. Un aspect que l’on retrouve magnifié sur Blood Seeres et Black Becomes The Sun et qui d’une manière générale marque au fer rouge l’ensemble d’Omens, un album toujours plus dominé par les litanies spectrales du chant féminin annonciatrices des sévices à venir.
On signalera que dans sa forme Omens diffère malgré tout quelque peu de ses prédécesseurs directs. Pour la première fois depuis 2004 voilà un album de Monarch qui comporte à nouveau trois titres, ce qui signifie également qu’Omens n’est pas qu’une seule et même composition étalée sur toute la longueur d’un CD ou bien coupée en deux sur les deux faces d’un vinyle. Transylvanian Incantations est même un quasi instrumental très ambient, portant bien son nom, avec une touche de goth funéraire.
Le mode opératoire pour enregistrer le disque diffère également : pas de sessions uniques dans un même studio – Monarch était un habitué des studios Amanita de Stephan Krieger – mais des enregistrements successifs au gré des pérégrinations et des tournées de Monarch à travers le monde… dans un studio à Osaka puis à Melbourne, à Montréal et enfin à Chicago avec Sanford Parker (Buried At Sea, Minsk ou Nachtmystium). Un soin tout particulier apporté à l’enregistrement (sensiblement perceptible au niveau des voix) et au mixage final : Omens ne souffre aucunement de cet éparpillement, au contraire voilà le disque de Monarch le plus léché et le plus accompli tout en gardant le côté brut et noir du groupe. Un joyau d’obscurité qui n’est décidemment pas près d’arrêter de nous enflammer.