JESSICA 93
est un one man band tout seul : Geoffroy chante, il utilise de la guitare,
de la basse, des boucles et des boîtes-à-rythmes (au nombre de deux). On peut dire
aussi que ce garçon est le guitariste
des Louise Mitchels et qu’il joue également dans Besoin Dead et Missfist* mais
honnêtement cela ne servira pas à grand-chose : le propre d’un projet en solo
c’est d’inventer et de faire sa musique à soi, tout seul dans sa chambre devant
sa glace ou dans sa cave au milieu de poubelles et de se foutre presque complètement
de tout le reste.
La musique de Jessica 93 est particulièrement
touchante. Sombre, triste, glauque, moite, souvent lourde, résolument mélodique
et charpentée elle ne tient pas du bricolage hasardeux ou de la petite expérimentation
de garage en guise de sauf-conduit contre l’ennui. Les compositions se
tiennent, solides – belle utilisation des boites-à-ryhtmes – et s’avèrent d’une
puissance insoupçonnée et radicale.
Jessica 93 tire sans doute toute une partie de son
inspiration du côté des brumes des 80’s : par exemple Seul Contre Tous** est un excellent titre de post punk gothique et
tribal dominé par des guitares gazogènes et un chant insaisissable de méduse urticante –
surtout Geoffroy/Jessica 93 y multiplie les pistes et les boucles de guitare et
de basse vraiment pour le meilleur, Seul
Contre Tous étant un titre d’une rare densité mais aussi d’une fluidité pas loin du magique.
Cette densité presque agressive mêlé à cette
fluidité plus que bienvenue on les retrouve sur tous les titres du disque. Si
comme son nom l’indique Nepal est une
composition plus ethnique (quel vilain mot, vraiment), elle reste dominée par
une basse tellurique et vrombissante qui appuie toujours et encore dans le sens
de l’émergence dantesque de blocs de pierres vers le ciel. Dragon est déjà plus dans la lignée de Seul Contre Tous et conserve cette habilité à inventer et croiser
des motifs tout simples de guitare sur fond de lignes de basse imposantes – le
long tunnel chargé en brumes grésillantes et qui coupe Dragon en deux ne fait qu’ajouter à l’impact mélodique et immédiat
d’un titre à la limite de l’invitation à bouger son corps. Enfin l’intro d’Omar Little** semble sortir tout droit
du Reptile House EP des Sisters Of
Mercy (avec quelques kilotonnes de reverb en moins) puis, avec sa lenteur aussi
lancinante qu’implacable, ce dernier titre totalement instrumental vous entraine
vers de nouvelles hauteurs lysergiques et déraisonnées. Vraiment très beau.
Ce disque – d’autant trop court qu’il est vraiment
réussi – est publié par pas moins de sept labels, il y en a forcément un pas
très loin de chez vous et auprès de qui vous pouvez vous approvisionner : Attila Tralala, Corn Dog records, Et Mon Cul C’est Du Tofu ?, Gateau Blaster, Label Brique, Tandori records et Wee Wee records***.
* les Louise Mitchels c’est par ici, Besoin Dead c’est de ce côté et Missfist c’est par là – les premiers seront en
concert lyonnais le jeudi 15 novembre au Marché Gare en compagnie de Fordamage
et de Binaire
** à noter que sur Seul Contre Tous et Omar
Little un batteur est venu prêter main forte à Jessica 93 ; et on me souffle à l’oreille que ce garçon n’est autre que le batteur de Grand Prédateur
*** pour se faire une idée de la chose on peut
également s’adonner au téléchargement libre et gratuit de ce disque