jeudi 1 mars 2012

La Pince / Self titled





Cela fait plusieurs semaines – plusieurs mois ? – que ce disque traîne sur l’une des étagères à bordel/étal de boucher dans les bureaux high-tech de 666rpm. Un hasard tout ce qu’il y a de plus malencontreux a permis à cet enregistrement sans titre de La Pince de refaire surface (mais on y reviendra juste après parce que le hasard, c’est comme dieu ou l’honnêteté en politique, ça n’existe pas).
Il ne paye vraiment pas de mine ce CDr, mais j’aime bien sa pochette fabriquée avec je ne sais quel revêtement mural amianté et arraché de la déco ringarde d’une cafétéria de centre commercial, un bout de plastique recousu à la machine et repeint au pochoir dégueulasse. Devant uniquement le nom de groupe, LA PINCE, et derrière ce merveilleux outil dont se servent les tortionnaires avisés du monde entier pour arracher des aveux à des pauvres menteurs forcément coupables. Un symbole universel donc de l’état avancé et supérieur de nos civilisations dites développées.
A l’intérieur on trouve une photocopie avec des jolis croquis montrant des pinces à linge présentées dans toutes les positions dont la ménagère lambda rêve la nuit – précisons qu’une pince à linge est tout de même nettement moins pratique et efficace qu’une pince monseigneur pour faire obéir son épouse et lui faire recouvrer le chemin du bon sens et de la religion – mais par contre on ne trouve sur cette photocopie aucune indication quant à l’origine géographique de La Pince. Personnellement j’hésite entre l’est de la France et la Belgique, allez savoir pourquoi mais je n’ai pas osé aller le demander au groupe.




Le disque en lui-même ne comporte que huit titres (17 minutes de musique, c'est la dure loi des restrictions budgétaires propres au D.I.Y.) d’un punk très catchy et très noisy. On peut regretter que la voix soit autant mise en avant mais cette voix, très appuyée et aigue, a l’air de raconter trop de drôles de trucs, avec une façon de faire que pour résumer et pour faire très (très) vite on placerait volontiers entre l’arrogance d’un Jello Biafra encore très jeune et les éructations d’un Eric Paul (Arab On Radar/Chinese Stars/Doomsday Student) pas encore ventripotent.
Mais il n’y a vraiment pas d’hystérie trop radicalement foudroyante et encore moins de hardcore ici, plutôt une nervosité assez posée, chaotique certes mais jamais jusqu’à l’absurde ni l’illisibilité : le punk noise de La Pince est avant tout servi par de grosses lignes de basse et une batterie concassée sur lesquelles chant déraisonné et guitare acide viennent se greffer. Du bon petit boulot. Et je suis sûr que ces jeunes gens de La Pince sont finalement tout ce qu’il y a de plus fréquentables – à oui, tiens, j’allais oublier de placer dans cette chronique haut de gamme mon jeu de mot favori du jour : j’en pince déjà pour eux (merci de rire mais uniquement lorsqu’on vous le demande).



Ce disque a été entièrement réalisé et assemblé à la main (la supériorité notoire du D.I.Y. sur toutes les autres formes de production musicale) à seulement 157 exemplaires.
Le groupe est actuellement de retour d’une triomphale tournée européenne en compagnie des excellents Tentaculos. Ils s’arrêteront pour une date lyonnaise – le voilà donc ce fameux hasard ! – ce vendredi 2 mars au bar des Capucins, en bas des pentes de la Croix Rousse et juste à côté de l’Eglise de Scientologie, un chouette endroit donc. Ce même soir il y aura également Gameboy Physical Destruction au programme (clic sur l’image si tu veux tout savoir).