mercredi 28 mars 2012

Louis Minus Seize / Birds And Bats





Louis Minus Seize est un quartet composé d’Adrien Douliez au saxophone alto, au piano et à la voix, de JB Rubin au saxophone ténor, de Maxime Petit à la basse (électrique) et de Frédéric Lhomme à la batterie. Ça me fait plaisir de citer les noms de ces quatre jeunes gens parce ce groupe est arrivé de nulle part et que Birds And Bats – semble-t-il le premier album de Louis Minus Seize – est une bonne et belle surprise.
Quand je dis « arrivé de nulle part » ce n’est cependant pas tout à fait vrai : on a déjà croisé le chemin de Tandori records à propos de groupes tels que Maria Goretti Quartet et Berline0.33. Aussi cela ne m’étonnerait absolument pas qu’il y ait de la connexion nordiste là-dessous. L’autre label qui a produit Birds And Bats s’appelle Proot records et je vous laisse découvrir le catalogue et l’identité graphique de cette petite maison en allant faire une visite de courtoisie sur son site vraiment très coloré.
De la couleur il n’y a pourtant pas beaucoup sur la pochette sérigraphiée de Birds And Bats. Du noir et un gribouillis argenté (entre toile d’araignée déchirée et circuit électronique fondu) comme je les aime : on n’y voit rien de précis mais on peut l’interpréter comme on le veut en imaginant toutes sortes de correspondances nouvelles entre les lignes et les formes qui apparaissent et disparaissent. Une façon engageante d’appréhender Birds And Bats, comme une invitation à se laisser aller. Et la meilleure façon d’écouter un disque. Ne rien savoir sur lui avant.
Evidemment j’ai un peu triché en décrivant en début de chronique le line-up de Louis Minus Seize. On peut se douter qu’il y a un fond de jazz là dedans. Un fond comme dans le fond de l’air est frais. Mais il ne faut surtout pas avoir peur des étiquettes. Car Louis Minus Seize les envoie valser avec une facilité et un naturel désarmant. Du jazz il y en a donc. Mais du jazz de maintenant ce qui signifie que lorsqu’on écoute Louis Minus Seize on n’écoute pas un vieux machin qui rend hommage à la musique de nos grands pères ou de nos pères, on n’écoute pas une prétendue modernité qui se nourrit de nostalgie, non, on écoute une musique qui nous va droit au cœur, parfois presque irrationnellement instinctive, immédiate et en même temps d’apparence très pensée. Ecouter Birds And Bats revient à se dire « voilà c’est tout à fait ça » tout en étant en même temps incapable d’expliquer pourquoi c’est justement ça.
Et dans un sens c’est tant mieux. On peut bien sûr trouver quelques éléments qui expliqueront le fait que Birds And Bats est un disque aussi touchant. Et on se gardera bien de trop développer d’explications à leur sujet. Mais par exemple il y a ces moments où les deux saxophones jouent à l’unisson ; ou la basse électrique qui tire souvent Louis Minus Seize vers autre chose que du jazz, vers des horizons bien plus secs et bien plus tendus ; ou cette batterie et ces percussions très présentes ; ou – enfin – le chant rauque et la déflagration finale (presque à la punk) de 666 Blues. Birds And Bats est un disque qui tire son essentialité de son évidence. Le reste est uniquement une affaire de beauté et de profondeur.