Le mariage de la carpe et du lapin : Bigoût records qui s’associe à Active Disorder pour organiser un concert punk et noise au bar des Capucins ? J’en ai rêvé et ils l’ont fait. Comme quoi tout est possible en ce bas monde, y compris et même surtout s’entasser à cinquante dans une cave d’à peine 15 m² pour transpirer à grosses gouttes le houblon que l’on vient tout juste d’absorber à l’étage au dessus.
Il y a ainsi beaucoup de monde qui attend patiemment, attablé à la terrasse des Capucins, en cette veille de jour férié inutile – inutile non pas parce qu’il empêche les braves gens de travailler mais parce qu’il continue de commémorer fièrement la connerie humaine – et il y aura donc du monde pour le concert (d’ailleurs pas forcément toujours les mêmes têtes pour chaque groupe, une vraie tournante guinéenne) et surtout il y aura encore beaucoup de monde après, jusqu’à très tard. Merci la guerre.
Retour donc des Gods And Queens après un premier passage quasi inoubliable en février dernier à feu Grrrnd Zero. A peine descendus dans la cave, on remarque deux choses : Jamie, guitariste et chanteur du groupe est allongé de tout son long sur le carrelage pour une petite séance de relaxation pré-concert ; surtout on constate qu’il y a un nouveau batteur dans Gods And Queens – le premier était excellent, le nouveau s’apprête à jouer en slip et je me demande si on va réellement y gagner au change.
Comme la dernière fois Gods And Queens a l’intention d’envoyer son set le plus succinctement possible, sans tergiversation, en moins d’une demi-heure chrono, avec juste deux petites pauses pour réaccorder la guitare. Mais à quoi bon s’accorder les gars ? Le son de Gods And Queens dans cette cave est crade et indéchiffrable au possible et les trois musiciens jouent comme des chiens – comme des porcs diraient certains – tout en semblant complètement se foutre des conséquences. On reconnait difficilement les compositions du groupe, ah si, il y a cette célébrissime reprise de Quicksand qui surnage au milieu et que le trio joue toujours.
Mais les Gods And Queens sont à bloc, envoient méchamment, avec un enthousiasme qui force le respect et déclenche les sourires d’admiration. Malgré les conditions plutôt mauvaises et à cause de cette attitude punk as fuck – ou plutôt grâce à elle – le concert s’avère assez incroyable, électrisant et jouissif. Evènement assez étonnant Jamie nous fait un speach assez long pour expliquer qu’il y a un groupe qu’il aime particulièrement et qui représente pour lui ce qui signifie le mot musique. Ce groupe c’est Hüsker Dü dont Gods And Queens va nous gratifier non pas d’une mais de deux reprises : une version très extrémiste de New Day Rising puis l’habituel The Girl Who Lives on Heaven Hill. De manière encore plus surprenante Gods And Queens acceptera de jouer un dernier titre en guise de rappel, suite à l’insistance méritée du public.
Il parait que Dÿse a déjà joué dans le coin, notamment lors d’une première partie d’Unsane il y a deux ans. Je ne connais absolument pas ce groupe originaire d’Allemagne. Ils sont deux : un guitariste qui chante dans un vrai micro et un batteur qui braille sans micro et raconte des blagues. Les blagues c’est même près de 40 % d’un concert de Dÿse, comme celle où le groupe raconte que lors d’une discussion avec Bruce Dickinson celui-ci a conseillé au duo de composer un titre qui s’appellerait The Number Of The East – en fait Dÿse est originaire de l’ex R.D.A. On nous raconte également une rencontre « hilarante » avec Grandmaster Flash et je ne sais trop quoi encore.
Le groupe aime bien aussi faire des grimaces, le batteur mouline souvent inutilement dans les airs comme un basu, il y a de nombreuses parties chantées parodiques, etc. Dÿse c’est donc un peu les Ludwig Von 88 de la noise et sur la longueur – ou sur disque – j’imagine que cela ne le ferait absolument pas, toute cette débauche de guignolades et de branquignolades à faire passer X-Or pour un duo de chansonnettes expérimentales.
Mais lorsque le groupe joue pour de vrai, lorsqu’une vraie composition fait enfin son apparition, lorsque le guitariste tord sa guitare pour en sortir un son bien compact et que le rythme est perpétué au delà de cinq mesures et demie, Dÿse se révèle être un bon petit groupe de noise nerveuse, jouant certes de quelques facilités mais ultra efficace. Il y a ceux qui chez Dÿse apprécient le côté clowns/bière et punks/école du rire des années 80 et il y a ceux qui, tout en appréciant pour une fois de rire autrement qu’en surconsommant de l’alcool et de la drogue, préfèreraient un peu plus de concision et moins de cirque. Mais Dÿse reste un groupe à voir et entendre dans un cave pour un concert de tout et n’importe quoi.