Bonne petite soirée noise rock et autres trucs affiliés
en perspective au bar des Capucins puisque l’éphèbe mondain Bambino Versailles
s’est associé avec les nettement plus aguerris Point de Non-retour pour
organiser ce concert de groupes à guitares avec au programme Nose In The Nose
(de Saint Etienne), Stereozor (de Limoges) et Mr Protector (sûrement de quelque
part). Les deux derniers groupes cités sont en fin de tournée, une tournée qui
les a menés dans les squats les plus indescriptibles d’Allemagne, la fatigue
commence parait-il à se faire sentir mais je suis sûr qu’ils vont donner tout
ce qu’ils peuvent. L’état de grâce du vendredi soir.
En attendant je remarque que le jeune Bambino
porte un t-shirt de Café Flesh, groupe désormais défunt mais sorte de
grand-frère et parrain de Mr Protector. Cette tentative de séduction/racolage
un rien démagogique ne serait rien si ce jeune homme n’avait pas également cru
bon de faire un descriptif complet de ma personne aux Mr Protector, genre
« il fait toujours la gueule, il est poilu comme Demis Roussos, vous
pouvez pas le rater », lesquels Mr Protector me coincent sournoisement au
premier étage devant l’entrée de vécés pour me harceler de questions
indiscrètes et tendancieuses – impossible ce soir de rester anonyme.
Ne pas se fier aux t-shirts portés par les
groupes : le guitariste de NOSE IN THE NOSE en porte un barré d’un énorme Godflesh or la musique du trio
stéphanois n’a rien à voir avec le metal industriel des anglais. Au contraire
Nose In The Nose pratique un rock tendu mais racé et ce concert confirme que le
groupe a plus d’un bon tour dans son sac, pratiquant aussi bien la déflagration
que la mélodie.
Surtout on s’aperçoit une fois de plus que Crash, l’album que Nose In The Nose a
publié en 2012, regorge de tubes accrocheurs tout en ne se contentant pas de
tourner en rond dans le même style : tout en haut du palmarès on placera
le mega-hit Toc avec sa ligne de
basse post punk en rase-motte et son leitmotiv au chant qui font toujours
mouche ; il y a aussi XYZ, aux
contours nettement plus garage et qui ressort particulièrement bien en live
(avec un final énervé et boosté à la disto incendiaire). Un bon concert
assurément et c’est toujours une très bonne chose de découvrir ainsi un groupe
dont on avait déjà aimé le disque. Mais pour être honnête, la seule chose de pas
vraiment terrible chez Nose The Nose, c’est le nom du groupe en lui-même, non ?
Encore un groupe avec un nom pourri mais
drôle : STEREOZOR. Cette
fois-ci le bassiste porte un t-shirt des Smiths et joue sur une rickenbacker –
je me suis demandé pendant tout le concert si c’était vraiment fait exprès ou pas
– mais là aussi on s’en fout complètement. Celles et ceux qui ne connaissent
Stereozor que par le biais de la première démo de quatre
titres publiée par le groupe en 2011 seront sans doute stupéfaits pas les
progrès effectués depuis par Stereozor (et largement concrétisés sur All In, un premier album qui vient juste
de paraitre et dont on reparlera très bientôt).
Stereozor continue de creuser le sillon
Jawbox/Quicksand – qui pourtant sont très loin d’être mes deux groupes préférés
des 90’s – mais y rajoute cette raideur ascétique qui parfois vire à l’hypnose
(un dernier titre très long mais vraiment très bon et joué avec le batteur de
Mr Protector en renfort) et qui donne à la musique du groupe un côté post punk
évident, je comprends mieux maintenant pourquoi Stereozor aime (aimait ?)
citer les Skull Defekts parmi ses éventuelles influences.
Le concert est explosif et même si le chant,
pourtant l’un des points forts du groupe en studio, n’est pas vraiment toujours
en place – on peut aussi estimer que la sono des Capucins est pas loin d’être
merdique en ce qui concerne le repiquage des voix –, Stereozor emballe les gens
présents en un tour de main. Un groupe à suivre, définitivement, et à
(retourner) voir en concert dès que possible.
Mr PROTECTOR, encore un groupe avec un nom pas
terrible-terrible, joue en dernier : le batteur porte un t-shirt Bellini
et l’un des deux guitaristes porte lui un t-shirt… Mr Protector. Ma blague
récurrente sur les t-shirts qui n’ont rien à voir tombe à plat mais il
n’empêche que ça devrait être interdit d’exhiber comme ça le nom de son propre
groupe, comme n’importe quel métalleux auto-complaisant.
Puisqu’il est déjà tard, Mr Protector décide de
raccourcir la sauce et d’envoyer la purée afin de jouer le plus possible avant
la fin officielle de toutes nuisances sonores et surtout avant que le voisinage
ne commence à se plaindre. C’est bien mais c’est un peu dommage parce qu’il y a
aussi de la subtilité dans la musique de Mr Protector, subtilité bien cachée c’est
vrai sous une grosse couche de gras mais pour peu que l’on se donne la peine
d’écouter correctement Gumbo, le deuxième et tout récent
album du groupe, on s’apercevra qu’il y a parfois un petit cœur qui bat dans la
poitrine de ces trois garçons.
Pour la finesse il faudra repasser et ce
concert c’est donc du bourrin, du bousin et du boudin et rien d’autre ; tout
le monde se la donne à fond, le guitariste/chanteur en profite pour aller se
balader dans le public et susurrer à l’oreille des filles quelques insanités en
allemand – cela chante souvent en allemand chez Mr Protector et cela va très
bien au groupe – mais la présence en fin
de set de Skinny In The Universe et
de ses chœurs de chauds lapins abreuvés gâche quelque peu mon plaisir
d’esthète. Bon, j’ai clairement un problème avec ce titre estampillé fête de la
bière munichoise versus rassemblement de hooligans du Manchester F.C. en rut… Tant
pis pour moi.
[quelques photos
du concert]