mercredi 6 mars 2013

Pissed Jeans / Honeys




Honeys : PISSED JEANS en est déjà à son quatrième album. Et pour un groupe de noise rock, cela commence à faire beaucoup même si on ne peut pas reprocher à un tel groupe de ne pas se renouveler puisque, déjà au départ, Pissed Jeans ne fait que jouer une musique complètement anachronique, d’une autre époque, d’un autre temps. Ce qui différencie tout simplement les bons groupes de noise (noise rock, noise punk, noise hardcore, etc.) des moins bons – ou plus simplement des mauvais – c’est la faculté à réinventer la même musique dans tout ce qu’elle a de plus hargneux, de plus sale, de plus vicieux. Point barre. Tout le reste n’est qu’élucubrations d’enculeurs de mouches.
Honeys ne sera ni une nouveauté, à moins de débarquer d’une autre planète que celle joyeusement infestée par les noiseux bloqués sur les années 90, ni une confirmation, puisque ces mêmes noiseux connaissent déjà par cœur les trois premiers albums de Pissed Jeans : Shallow en 2005 chez Parts Unknown, l’incroyable Hope For Men en 2007 (Sub Pop) et le génial King Of Jeans en 2009 (toujours chez Sub Pop) – et on vous épargnera donc la liste des quelques singles du groupe publiés depuis ses débuts.
Alors les Pissed Jeans réussissent-ils avec Honeys à entretenir la flamme et à tout brûler sur leur passage ? Oui, bien sûr. Les doigts dans le nez, même. Seulement on peut aussi penser que Honeys est moins bon que l’insurpassable King Of Jeans qui question défouraillage de tripes renvoie dans les cordes à peu près tous les disques des dix dernières années boxant dans la même catégorie. Cela n’empêche pas Honeys d’être un bon disque mais pour être franc on le trouve parfois trop direct – plus punk que noise, comme sur Cat House – et surtout un peu moins fou, un peu moins épais et un peu moins intense. Bien sûr ce disque comprend des titres qui me feront mentir : le très vicieux Male Gaze ou le magnifique titre d’ouverture, Bathroom Laughter, qui, s’il avait été publié en 7’, aurait sans aucun doute possible été élu single de l’année (d’ailleurs les Pissed Jeans ont toujours su mettre en exergue de leurs albums des titres de cette trempe, rappelez-vous de False Jesii Part 2 en ouverture de King Of Jeans).
Et puis, dire qu’un titre tel que Loubs est un rien lourdaud et pas très inspiré n’est que chipotage mais on le dit quand-même, tout comme on pense qu’Honeys a tendance à s’essouffler sur toute sa fin… Ce qui n’empêche pas du tout ce quatrième album d’être de tout premier plan, de première catégorie, de première importance (rayez les mentions inutiles), un album qui finira, comme ses deux prédécesseurs avant lui, au rang des meilleures choses de cette année 2013.

Honeys est publié par Sub Pop : il existe une version CD digipak et une version LP qui permet d’admirer en beaucoup plus grand un artwork pas loin d’être atroce. Les plus chanceux auront évidemment gaulé auprès du label la « loser edition » – 1250 exemplaires – c'est-à-dire Honeys gravé dans un vinyle de couleur indéfinissable (on va dire orange filandreux, un peu la même couleur qu’un gratin de courges raté parce qu’il a fait de l’eau au lieu de s’épaissir mollement) et agrémenté d’un 7’ bonus comprenant cinq titres de la première démo de Pissed Jeans (2003).