lundi 10 décembre 2012

Report : Sathönay + L'Enfance Rouge & Eugene Robinson au Sonic - 04/12/2012




Cela fait trop longtemps que je ne suis pas allé au Sonic… C’est à peu près la réflexion que je me fais (et que l’on me fait aussi) lorsque j’arrive sur la péniche du bord des quais de Saône. Pas d’acte de contrition ou de remords, non, juste le constat qu’on y est bien et que cela fait plaisir d’y retourner enfin. Qu’importe ce que peuvent penser les irréductibles : même si la programmation du lieu n’est pas toujours de mon goût, le Sonic reste l’un des lieux incontournables de la musique sur cette bonne grosse ville de merde Lyon.
En ce mardi soir c’est Active Disorder qui programme et en général voilà qui est synonyme de grosse régalade. Celle du jour est autant source de curiosité que de craintes : que peut bien donner l’association de L’Enfance Rouge et d’Eugene Robinson ? Les quelques titres sous forme de démos et mis en ligne ne disent rien de particulier – un type qui fait des spoken words sur un fond musical, non ? – et on a un peu peur que Robinson n’ait trouvé là un énième moyen de parcourir le monde sans trop se fouler.




La grosse erreur. Dès les premières secondes du concert il est plus qu’indiscutable que L'ENFANCE ROUGE & EUGENE ROBINSON sont un vrai groupe, qu’ils vont jouer tout le temps, tous ensemble, et s’il s’agit uniquement d’un groupe de circonstances alors on peut également tout de suite affirmer que ces circonstances là sont de toute évidence les bonnes. La musique vous claque d’entrée à la gueule et vous hérisse l’épiderme, montée en flèche du taux d’adrénaline, du vrai noise rock barré, frontal et tendu ; Eugene S. Robinson passe immédiatement en mode énervé et on retrouve le showman imposant et charismatique qui depuis plus de vingt ans nous torture les nerfs et le cœur avec Oxbow.
On dira même que cela fait un bon moment que l’on n’avait pas vu le chanteur dans cet état là, poussé par un groupe lui imposant sans discuter l’urgence et la tension – ce que précisément Oxbow a délaissé ces dernières années au profit de la quête, souvent réussie, d’une élégance nerveuse et d’une classe électrique au-delà du divin. Là, c’est juste brut de chez brut. Brutal, même. Une déflagration complètement folle que rien ne laissait présager – le choc n’en est que plus grand.




Car il faut bien convenir que les trois musiciens de L’Enfance Rouge ne se contentent pas d’assurer les arrières et un petit rôle de backing band. Malgré son accident de la veille à Toulouse sur la première date de la tournée (résultat des courses : une double entorse et on a cru dans la journée que le groupe allait devoir annuler la suite de ses concerts), la bassiste lance des grosses lignes avec sa Rickenbacker ; elle s’appuie sur un tabouret parce qu’elle ne peut pas poser le pied par terre mais des bassistes qui assurent autant qu’elle en étant eux débout sur leur deux jambes et sans béquille, il n’y en a pas beaucoup.
Le batteur est également réellement impressionnant par son jeu simple, sans fioriture, mais très puissant et très personnel. La palme revient surement au guitariste qui au bout de quelques minutes décide qu’il en a marre de rester sur la scène, descend son pédalier d’effets au sol et terminera tout le concert devant la scène ou dans le public, à se cogner parfois contre le mur, suant tout ce qu’il peut et déversant des tonnes de saturation ; lui aussi il a un jeu et surtout un son bien personnels, un son qui ne varie par beaucoup de tout le concert mais qui explose à chaque instant, propulsant la musique de L’Enfance Rouge & Eugene Robinson vers un ailleurs sans concession ni entraves. Il s’agissait bien, tout simplement et à l’unanimité de tout le comité rédactionnel de 666rpm, du concert de l’année 2012. Amen.




SATHÖNAY jouait en première partie et l’idée de le programmer était une bonne idée puisque la musique de ce garçon pouvait parfaitement compléter celle, parfois très métissée et orientalisante, de L’Enfance Rouge (le batteur du groupe aura d’ailleurs assisté à tout le concert de Sathönay, visiblement intéressé). Bon, comme on vient de le voir ce ne fut absolument pas le cas du concert donné après par L’Enfance Rouge mais ça on ne le savait pas encore.
Cela n’a pas empêché Sathönay d'assurer également un bon concert (même a posteriori) – cette fois-ci les vieilles boites-à-rythmes ont parfaitement fonctionné –, un concert souvent émouvant et emprunt de ce lyrisme assez particulier et inspiré par les musiques orientales. Le premier album de Sathönay tarde un peu à arriver (les sempiternels problèmes avec les presseurs de disques) mais on en reparle dès que possible, promis.

[quelques photos de cette folle soirée et une nouvelle fois un très grand merci à Active Disorder]