mardi 29 mai 2012

Ceremony / Zoo




Pour son nouvel album Zoo les californiens de CEREMONY ont signé chez Matador records et dans un premier temps ce saut « qualitatif » en compagnie d’un label indépendant important et parmi les plus notables des US s’est révélé des plus décevants. Encore de l’arty punk mais cette fois-ci d’une manière beaucoup trop visible, en vient-on à penser. Des formations pétomanes prétendument significatives ce n’est pas ce qui manque au pays des indés – de la pop au hardcore en passant par la noise – mais on aurait été extrêmement chagriné que Ceremony rejoigne la cohorte des groupes qui se préoccupent davantage de comment ils sont perçus que de ce qu’ils ont effectivement à offrir (rien que les infâmes et euthanasiables Fucked Up sur le même label mais aussi Liturgy, dans un style bien différent, sur Thrill Jockey cette fois).
Les cinq petits gars de Ceremony sont peut être plus malins que les autres. C’est ce que l’on finit par se dire à l’écoute de Zoo. Hormis Citizen ce nouvel album est nettement moins crust et hardcore que Rohnert Park (la courte intro d’Hysteria est là presque uniquement pour servir de leurre), voire même pas du tout, le son est assez clean et lisse, le disque privilégie les mid tempos comme les titres ralentis et il s’articule autour de deux grands axes : le presque post punk et le proto garage. Par presque post punk on entend ces titres que l’on jurerait enregistrés par un groupe anglais commençant à s’extirper même maladroitement ou inconsciemment de ses racines punk 76/77 et découvrant de nouvelles façons de faire et surtout un son qui deviendra de plus en plus léché avec le temps. Musicalement Ceremony en est exactement là, à cette jointure, ce moment où presque rien n’a encore basculé mais où le basculement est pourtant inévitable. Sauf qu’on n’est pas en 1978 ou en 1979 mais en 2012. Pour en revenir au Covers EP, on comprend de plus en plus pourquoi Ceremony avait si brillamment – mais c’est vrai sans dévier de l’orthodoxie de base – repris le Holocaust de Crisis.
L’autre versant de Zoo c’est donc le garage mais de façon encore plus floue, distillée sur nombre de titres et ne dominant qu’à de très rares occasions – sur les couplets de Repeating The Circle et sur Community Service par exemple, deux exemples extrêmement flagrants. Il y a aussi le très swamp Hotel et ses minauderies enfumées. Seul cas à part, Video ressemble à du Pixies sous champignons. Il s’avère que post punk, garage et les quelques rares relents crust qui subsistent encore ici se marient très bien sur Zoo. L’écoute du disque est très fluide et ne marque presque aucune cassure nette entre plusieurs styles. Auparavant Ceremony arrivait à maitriser ces cassures en une identité qui lui était propre, le tout sans artificialité. Avec Zoo le groupe va bien plus loin – seule cassure notoire : celle entre Hotel et Ordinary People sur la deuxième face – et se paye le luxe de plus d’homogénéité de style et surtout de son (bonne production un peu gonflée mais pas suffisamment pour jouer la carte du racolage facile). On a alors le sentiment d’écouter un vrai groupe, très sérieux et qui a bien bossé dans son coin, alors que le côté naturel et brut du Ceremony d’avant manque à l’appel. Ce que l’on perd en excitation et en gaminerie on le gagne en maitrise et en lisibilité. Encore un effet pervers de la maturité ?