Pour son nouvel album Zoo les californiens de CEREMONY
ont signé chez Matador records
et dans un premier temps ce saut « qualitatif » en compagnie d’un
label indépendant important et parmi les plus notables des US s’est révélé des
plus décevants. Encore de l’arty punk mais cette fois-ci d’une manière beaucoup
trop visible, en vient-on à penser. Des formations pétomanes prétendument significatives
ce n’est pas ce qui manque au pays des indés – de la pop au hardcore en passant
par la noise – mais on aurait été extrêmement chagriné que Ceremony rejoigne la
cohorte des groupes qui se préoccupent davantage de comment ils sont perçus que
de ce qu’ils ont effectivement à offrir (rien que les infâmes et euthanasiables
Fucked Up sur le même label mais aussi Liturgy, dans un style bien différent,
sur Thrill Jockey cette fois).
Les cinq petits gars de Ceremony sont peut être
plus malins que les autres. C’est ce que l’on finit par se dire à l’écoute de Zoo. Hormis Citizen ce nouvel album est nettement moins crust et hardcore que Rohnert Park (la courte intro d’Hysteria est là presque uniquement pour
servir de leurre), voire même pas du tout, le son est assez clean et lisse, le disque privilégie les mid tempos comme
les titres ralentis et il s’articule autour de deux grands axes : le presque post punk et le proto garage.
Par presque post punk on entend ces titres que l’on jurerait enregistrés par un
groupe anglais commençant à s’extirper même maladroitement ou inconsciemment de
ses racines punk 76/77 et découvrant de nouvelles façons de faire et surtout
un son qui deviendra de plus en plus léché avec le temps. Musicalement Ceremony
en est exactement là, à cette jointure, ce moment où presque rien n’a encore
basculé mais où le basculement est pourtant inévitable. Sauf qu’on n’est pas en
1978 ou en 1979 mais en 2012. Pour en revenir au Covers EP, on comprend de plus en
plus pourquoi Ceremony avait si brillamment – mais c’est vrai sans dévier de
l’orthodoxie de base – repris le Holocaust
de Crisis.
L’autre versant de Zoo c’est donc le garage mais de façon encore plus floue, distillée
sur nombre de titres et ne dominant qu’à de très rares occasions – sur les
couplets de Repeating The Circle et sur
Community Service par exemple, deux
exemples extrêmement flagrants. Il y a aussi le très swamp Hotel et ses minauderies enfumées. Seul cas à part, Video ressemble à du Pixies sous champignons.
Il s’avère que post punk, garage et les quelques rares relents crust qui
subsistent encore ici se marient très bien sur Zoo. L’écoute du disque est très fluide et ne marque presque aucune
cassure nette entre plusieurs styles. Auparavant Ceremony arrivait à maitriser
ces cassures en une identité qui lui était propre, le tout sans artificialité.
Avec Zoo le groupe va bien plus loin
– seule cassure notoire : celle entre Hotel
et Ordinary People sur la deuxième
face – et se paye le luxe de plus d’homogénéité de style et surtout de son
(bonne production un peu gonflée mais pas suffisamment pour jouer la carte du
racolage facile). On a alors le sentiment d’écouter un vrai groupe, très
sérieux et qui a bien bossé dans son coin, alors que le côté naturel et brut du
Ceremony d’avant manque à l’appel. Ce que l’on perd en excitation et en
gaminerie on le gagne en maitrise et en lisibilité. Encore un effet pervers de
la maturité ?