C’est avec un retard conséquent que l’on se lance dans la chronique de Barnburner, premier album des Hawks, groupe d’illustres inconnus et originaire d’Atlanta. Barnburner – publié par Army Of Bad Luck, un label au nom plutôt risqué – date en effet de 2009 alors qu’il a été enregistré en aout 2008. Donc, me direz-vous, pourquoi en parler seulement maintenant ? Parce que cette pochette est l’une des plus laides de la décennie écoulée ? Et encore, je ne vous raconte pas la gueule du poster offert avec le LP, un peu dans le même genre mais avec une touche de dégueulis chamallow/ketchup en sus. Le bon goût, ce n’est pas ce qui semble étouffer ces quatre petits gars.
Pour remettre les choses en place, on avait déjà évoqué les Hawks à l’occasion d’un formidable double split single partagé avec d’autres bouseux, français ceux-ci, les Café Flesh. Devant l’impression durable qu’a toujours laissée la musique de ce groupe d’Atlanta dans nos pauvres petits esprits de noiseux réactionnaires, à œillères opaques et intolérants comme un curé breton, on aurait vraiment eu tort de ne pas effectuer un salvateur retour en arrière.
2009, donc. Et, dès les premières secondes de l’énorme Borne Of Wasps, la certitude qu’avec les Hawks on tient un nouveau disciple de cette noise des années 90 qui, quelques 15 ou 20 années après, nous donne encore de ces érections homologuées à rendre jaloux un ex patron du FMI (je vous l’avais bien dit que cette chronique allait être placée sous le signe du bon goût). On peut même ajouter : noise 90’s, option Jesus Lizard. Mais on s’en tiendra là pour les comparaisons réductrices car les Hawks n’ont pas le tranchant chirurgical et maniaque de la bande à Yow et Dension mais préfèrent se vautrer dans le gras et l’épaisseur d’un tapis de crasse. Le groupe est d’ailleurs bien meilleur lorsqu’il ralentit la cadence et revisite le terroir local (Chocolate Vultures et son mid tempo en croquenots boueux et Maritime Scarring, placé juste après et dénotant d’un blues vicieux avec en son milieu un bon passage à tabac orchestré dans les règles). Des titres tels que The Thurst That Missed paraissent au contraire une chouille moins maîtrisés, impression fugace qui disparait au fur et à mesure que le plaisir de la folie Hawks se fait malgré tout ressentir dans toute son urgence salutaire.
Question mode opératoire et options tous-terrains, on pourrait également rapprocher les Hawks des Pissed Jeans d’Allentown. Sauf que si le guitariste des Pissed Jeans semble avoir des idées de riffs bien meilleures que celui des Hawks – on exclura de cette remarque trop bienveillante Your Life Is Worth, le décevant et dernier single en date des Pissed Jeans –, le chanteur des derniers supplante largement celui des premiers. Je ne suis alors pas très loin de penser que chez les Hawks c’est vraiment le chant qui fait toute la différence et qui rend ce groupe aussi unique qu’irremplaçable, ce type étant un vrai malade. Les Hawks développent également un côté plus roots encore, renforcé par une production pas loin d’être dégueulasse mais comme on les aime quand même. On se demande sincèrement pourquoi le groupe d’Atlanta est moins connu et apprécié que ses émérites collègues.
Il est possible d’écouter quelques extraits de tous les disques du groupe ici, on se rendra alors compte que les Hawks viennent de publier un nouvel LP, Rub, et nous n’allons certainement pas attendre deux ans pour en parler un peu plus en détails. […]