samedi 25 juin 2011

Revolutions Per Minute / self titled























Aphasia vous connaissez ? Vraiment ? Vous aimez le break core et tous ces trucs épileptiques ? Et bien il semblerait qu’Aphasia ait quelque peu été mis en stand-by et qu’à la place Nicolas Leal (le vrai nom du monsieur et démiurge en chef mais il s'est fait connaître sous l'alias de Jean Ferraille) s’investisse dans un nouveau projet du nom de Revolutions Per Minute. Bruits De Fond avait déjà publié un 12’ d’Aphasia en 2008 et le label remet donc ça pour le premier enregistrement de Revolutions Per Minute, sous couvert d’une nouvelle sous-division appelée Resistance Des Matériaux. Et si vous trouvez l’artwork de la pochette beaucoup trop dégueulasse, alors sachez qu’il est pourtant à l’image d’une musique offensive qui s’enfonce dans vos chairs pour ne plus en ressortir ni vous lâcher.
Mais on arrêtera là les comparaisons entre les deux projets car, musicalement, on ne trouve pas tant de points communs entre Aphasia et Revolutions Per Minute : si le premier vous assommait avec des cascades de rythmes ordonnées selon des algorithmes sans cesse renouvelés et des textures sonores piégées en trois dimensions, le second change d’optique et met la pédale douce au niveau du pilonnage systématique et organisé, les orgues de Staline finissent par s’enrailler et à la place monsieur Ferraille triture littéralement dans la masse rythmique, malaxe, déchire et explose les sons avec un sadisme bruitiste qui évoque aussi bien les débuts de la musique industrielle que le harsh noise le plus radical. Anti Music part 1 placé en début de face B ainsi que Collapsing qui ouvre la face C (car oui ce disque est un double 12’ tournant en 45rpm) évoquent presque un SPK – celui de Information Overload Unit et de Leichenschrei – remixé par un Zbigniew Karkowski sous speed.
Bien sûr on retrouve ici certaines obsessions rythmiques plutôt malveillantes mais ce que l’on retiendra surtout d’un titre tel que Anti Music part 2 c’est ce sifflement aigu aussi perturbant qu’une fraiseuse électrique et dominant des beats lancés à toute vitesse les uns contre les autres et se fracassant dans des gerbes aveuglantes et d’intenses collisions électriques, tout comme Multiphonics met l’accent sur des grincements à la limite de l’intolérable tandis que les pelleteuses digitales ramassent déjà les restes de nos vieux os brisés. On pourra finalement peut être carrément regretter que la disparition totale des rythmiques – même fracassées – n’ait pas lieu dans un processus d’extrusion malade et cannibale mais Revolutions Per Minute s’impose comme un démon tératogène de premier ordre. Les oreilles saignent, la chair souffre et se transforme, un peu comme le personnage principal de Tetsuo mutant en un pantin de metal disloqué.
Pour réaliser ce disque sans titre, Nicolas Leal/Jean Ferraille a très peu fait appel à des samples (on remarquera toutefois quelques voix comme celle de Contre) pour se concentrer sur des vieilles machines analogiques. Quelle différence me direz-vous ? Et bien, au delà de ces sons qui bouillonnent et qui explosent sans cesse, on apprécie la chaleur – relative – qui s’échappe de ce disque et de son fracas nauséeux. On goûte ainsi davantage aux sons de cloche de Sub Natural ainsi qu’à la totalité d’une face D sur laquelle Revolutions Per Minute semble pour la première fois lever le pied et vouloir nous laisser respirer. La musique n’en est pas moins inquiétante car elle est toujours aussi malsaine, à l’image de ce chant d’allumé que l’on peut entendre sur Cauchemar.