Poursuivons avec les disques Carton et plus précisément avec la collection Bâton du label. Deux sorties sont en effet prévues pour ce mois de mars 2011 avec un EP de Linnake et un autre EP de OK.
Il est toujours délicat de pratiquer la séparation des genres en différentes collections sans éviter le risque d’une structuration un peu forcée de ses envies et aspirations* – mais certains labels y sont relativement bien arrivés, John Zorn et Tzadik par exemple. On imagine d’abord qu’un disque ou un musicien pourraient très bien faire partie de plusieurs collections à la fois. Surtout, l’arbitraire en musique est toujours quelque chose de difficilement supportable, mettre soi-même des étiquettes de genre à ses productions souvent une erreur.
Au vu de ses premières parutions et malgré les déclarations d’intention du label – musiques « expérimentales » d’un côté et musique « rock » et « pop » de l’autre – on remarque toutefois une certaine constance, qualitative : si on a pu s’enflammer sur le premier EP d’IRèNE, on ne peut également qu’apprécier Linnake et OK.
Linnake est un trio guitare/basse/batterie et voix. C’est la bassiste qui chante d’une voix féline et nerveuse. Le problème du rock avec voix féminine c’est que depuis bientôt vingt ans maintenant tout ce qui sort dans le genre est systématiquement comparé avec PJ Harvey. Beaucoup s’y sont cassé les dents, parfois injustement, mais beaucoup aussi n’ont jamais fait non plus l’effort d’aller voir plus loin que les horizons défrichés par Polly-Jean. C’est exactement ce que l’on craint avec No Rest, le premier titre de ce EP. Fort heureusement, No Rest évolue par la grâce d’un break sec et nerveux vers une no-wave/post punk plus déstabilisante. Va-t-on quitter l’Angleterre pour New York ? PJ Harvey pour Lydia Lunch ou (pire) Kim Gordon ? Non. No Rest se disperse intelligemment dans une structure éclatée au gré de laquelle la voix prend ses aises au point de gagner un côté déambulation d’autant plus intrigant et attirant que Jeanne Added – la bassiste/chanteuse de Linnake – a une sacrée belle voix. Sur Tell Me l’influence post punk se fait davantage sentir : rythmique sèche mais groovy, guitare-cisaille et basse qui chaloupe tandis que le chant domine encore une fois. On pense carrément à Pylon et Linnake nous a déjà complètement conquis au bout de deux titres.
Avec le superbe Breathe on revient peut être un peu trop ouvertement sur les traces de PJ Harvey mais Linnake se rattrape avec 17, balade douce-amère et velvetienne flirtant avec le Sonic Youth plus introspectif de la fin des 90’s. Jouant les contrastes violents, le trio termine avec Springtime sur une note d’une franche virulence : c’est le retour de la no-wave, du post-punk décharné et hystérique, de la colère, des rythmes rapides – Sébastien Brun, boss du label, à la batterie – et des guitares aigrelettes – assurées par Julien Desprez, qui nous avait déjà franchement épaté avec IRèNE. On aura alors compris que Linnake est un groupe à suivre.
Il est toujours délicat de pratiquer la séparation des genres en différentes collections sans éviter le risque d’une structuration un peu forcée de ses envies et aspirations* – mais certains labels y sont relativement bien arrivés, John Zorn et Tzadik par exemple. On imagine d’abord qu’un disque ou un musicien pourraient très bien faire partie de plusieurs collections à la fois. Surtout, l’arbitraire en musique est toujours quelque chose de difficilement supportable, mettre soi-même des étiquettes de genre à ses productions souvent une erreur.
Au vu de ses premières parutions et malgré les déclarations d’intention du label – musiques « expérimentales » d’un côté et musique « rock » et « pop » de l’autre – on remarque toutefois une certaine constance, qualitative : si on a pu s’enflammer sur le premier EP d’IRèNE, on ne peut également qu’apprécier Linnake et OK.
Linnake est un trio guitare/basse/batterie et voix. C’est la bassiste qui chante d’une voix féline et nerveuse. Le problème du rock avec voix féminine c’est que depuis bientôt vingt ans maintenant tout ce qui sort dans le genre est systématiquement comparé avec PJ Harvey. Beaucoup s’y sont cassé les dents, parfois injustement, mais beaucoup aussi n’ont jamais fait non plus l’effort d’aller voir plus loin que les horizons défrichés par Polly-Jean. C’est exactement ce que l’on craint avec No Rest, le premier titre de ce EP. Fort heureusement, No Rest évolue par la grâce d’un break sec et nerveux vers une no-wave/post punk plus déstabilisante. Va-t-on quitter l’Angleterre pour New York ? PJ Harvey pour Lydia Lunch ou (pire) Kim Gordon ? Non. No Rest se disperse intelligemment dans une structure éclatée au gré de laquelle la voix prend ses aises au point de gagner un côté déambulation d’autant plus intrigant et attirant que Jeanne Added – la bassiste/chanteuse de Linnake – a une sacrée belle voix. Sur Tell Me l’influence post punk se fait davantage sentir : rythmique sèche mais groovy, guitare-cisaille et basse qui chaloupe tandis que le chant domine encore une fois. On pense carrément à Pylon et Linnake nous a déjà complètement conquis au bout de deux titres.
Avec le superbe Breathe on revient peut être un peu trop ouvertement sur les traces de PJ Harvey mais Linnake se rattrape avec 17, balade douce-amère et velvetienne flirtant avec le Sonic Youth plus introspectif de la fin des 90’s. Jouant les contrastes violents, le trio termine avec Springtime sur une note d’une franche virulence : c’est le retour de la no-wave, du post-punk décharné et hystérique, de la colère, des rythmes rapides – Sébastien Brun, boss du label, à la batterie – et des guitares aigrelettes – assurées par Julien Desprez, qui nous avait déjà franchement épaté avec IRèNE. On aura alors compris que Linnake est un groupe à suivre.
Deuxième parution dans la collection Bâton et encore un EP. Cette fois-ci il s’agit de OK, encore un trio mais à la formation bien moins orthodoxe : Guillaume Magne à la guitare, au chant et aux compositions, Sébastien Brun (décidément il est partout : Irène, Linnake…**) à la batterie et aux claviers ainsi que Jérémie Plazza, également à la batterie. Deux batteurs ? Oui. Même s’ils ne jouent pas systématiquement ensemble.
Question musique cela se corse quelque peu. Omelette Contest, le premier titre, est avant tout un morceau d’indie-pop efficace et sans grandes surprises mais qui permet toutefois de remarquer la qualité du songwriting ainsi qu’un chant nasal et appuyé. Une légère étrangeté s’en dégage cependant, étrangeté que l’on retrouvera un peu plus loin sur un Maureen chargée de discrètes dissonances – un titre qui fera aussi curieusement penser à Red Krayola. Sur A New Morning – le meilleur titre du disque – les sons synthétiques et les boucles font une apparition remarquée alors que OK, plus franchement déhanché, évoque comme une sorte de trip-hop acoustique et tribal chanté par un David Thomas sous prozac. Enfin, The Playground, encore plus mystérieux et envoutant malgré ses passages mi funky ou mi new-wave n’ayant rien à voir et malgré le chant flirtant d’un peu trop près avec un Neil Young dépressif***, laisse augurer que OK est un jeune groupe débordant d’idées pour faire dévier toujours plus sa pop mutante et finalement imprévisible. Une découverte, là aussi.
On essaiera de vous donner aussi régulièrement qu’on le peut des nouvelles de Carton et de ses productions. Le label a déjà annoncé ses deux prochains disques pour très bientôt – un disque de Woland Athletic Club (devinez un peu qui y joue de la batterie) ainsi que le premier enregistrement solo de Clément Edouard (Lunatic Toys, AM PM, Bigre! et Loup).
* de la même façon que je n'ai jamais réellement compris les gens qui classent leur collection de disques par genres : la musique c'est de la musique
** de là à penser que ce garçon a monté son label avant toute chose pour produire les groupes dans lesquels il joue il n’y a qu’un pas que je franchis allègrement, et puis on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même
*** oui, c’est bien moi qui parle de Neil Young… on aura tout vu (lu)