vendredi 5 avril 2013

Zeus ! / Opera




Après la langue, la cervelle. ZEUS ! aime les abats et autres trucs dégueulasses mais reste soigneusement déglingué : Opera est le deuxième album du groupe italien et on y sent comme un air de déconnade et, parfois, presque de jovialité. La recette de Zeus ! n’a pas changé par rapport au premier album sans titre et Zeus ! est toujours un duo basse/voix (Luca Cavina) et batterie (Paolo Mongardi) qui pratique le grind/spazz/jazz core comme d’autres trichent lorsqu’ils jouent au baby-foot : il est formellement interdit de pratiquer la roulette et la pissette mais on le fait quand même parce que c’est ça qui est bon.
Zeus ! nous assène donc onze titres dont les six premiers dégoulinent de cet aspect hautement ludique voire crétin dans la violence musicale ; le duo enchevêtre ses compositions puis les démêle, bourrine un bon coup, prend une succession de virages sur deux roues et repart pour un tour. Cet aspect là d’Opera – même si Zeus ! a également durci le ton question véhémence et déflagrations en cascade – est le plus amical du disque ; un thérémine (?) vient parfois ajouter une couche de kitschoune à l’ensemble, Beelzebulb est même doté d’un synthé dégueu façon black metal symphonique, les borborygmes de Luca Cavina cartoonent comme il faut et la première face du disque s’enfile comme une lettre à la poste, tiens je vais me faire ma ration quotidienne de bruit qui réveille. Et puis il y a également Justin Pearson de The Locust/Retox/Swing Kids/The Crimson Curse/etc. qui vient beugler sur un Sick And Destroy taillé sur mesure pour sa majesté.
« Sick And Destroy » ? Et oui : tous les titres d’Opera relèvent de jeux de mots assez foireux mais drôles et même si on n’a aucune culture métallurgiste il y a franchement de quoi rigoler (Lucy In The Sky With King Diamond, Blast But Not Litz, Giorgio Gaslini Is Our Tom Araya*), d’autant plus qu’il n’y en a pas que pour le metal (La Morte Young, Bach To The Future).
Mais trêve de plaisanteries. Le tournant d’Opera s’effectue à la toute fin de la première face grâce à un Giorgio Gaslini Is Our Tom Araya qui pour la première fois alterne réellement les ambiances, les rythmes et enquille différentes parties contrastées en un savant labyrinthe de trépidations diverses et de méthodes d’acharnement variées. Toute la deuxième face du disque est à cette image, plus déliée, plus aérée, plus diversifiée (plus progressive ?) mais également et finalement plus folle et plus inquiétante (enfin… tout est relatif : on reste quand même dans le ludique). Opera échappe donc de justesse aux syndromes de la branlette pour tous et du sextoy auditif. Merci.

[Opera est publié en vinyle noir ou jaune fluo + coupon mp3 ** et en CD par Offset records, Tannen records et Three One G – Justin Pearson inside]

* que l’on pourrait traduire par quelque chose comme Michel Petrucciani est notre Shane Embury
** il y a quelque chose de vraiment extraordinaire à propos de ce coupon mp3, le cartonnage est comme constellé de petits granulés (?) et dessus on peut lire l’inscription suivante : « Cette carte contient des graines de fleurs sauvages. Plantez-la sous une fine couche de terre, arrosez-la régulièrement et regardez-la pousser »…