mercredi 15 juillet 2009

Sea, sex and sun























Je pars pour un monde lointain dans lequel la musique, les disques et les concerts n’existent pas. Un monde de pur laxisme apathique, d’oisiveté triomphante et de désintérêt total pour les malheurs et catastrophes qui nous entourent.
Reprise des hostilités au début du mois de septembre (ou pas).
Une info à caractère utile cependant : le duo lyonnais FAT32 vient enfin de s’ouvrir à la virtualité en s’offrant un monospace -avec des vidéos en attendant du son pourri et compressé- et un site internet bientôt en activité. Enjoy the noise.

mardi 14 juillet 2009

Pre / Hope Freaks























Si la formation britannique de neo no wave -j’adore ce genre de contradiction- Pre a jusqu’ici réussi à faire parler d’elle, ce n’est que pour de mauvaises raisons. Le premier album du groupe (on parle de la version CD) était emballé dans une jolie boite en fer blanc ressemblant à celles qu’utilisent les infirmières du monde entier pour ranger leurs seringues et jouer à Barbie tu piques. Cet album, Epic Fits, est retourné très peu de temps après sa parution dans l’oubli dont il n’aurait jamais du sortir. Du punk pour jeunes gens chic et toc. Mais le plus grand fait d’armes de Pre c’est la chanteuse du groupe, dotée d’une voix presque aussi aigue que celle de Yasuko Onuki (Melt Banana) ainsi que d’une fine taille élastique et souple et surtout d’une collection de petites culottes complètement affolantes. Du genre de celles dont on aimerait bien se faire une sniffette après utilisation. Comme cette gironde et asiatique chanteuse adore se rouler par terre et/ou se tortiller pendant les concerts du groupe, tous les puceaux éjaculateurs précoces et tous les quarantenaires libidineux (pléonasme) en profitent allégrement et en reparlent longtemps après de manière récurrente avec moult trémolos dans la voix. Punk as fuck ? Pas vraiment, espèce de sale vicieux. Retourne te tripoter la nouille dans ta chambre en pensant à la mère de ton meilleur pote.
Un tour single (avec Aids Wolf) et une participation au Sides 11-14 (troisième volet publié par Skingraft de reprises d’AC/DC) après, Pre nous offre son deuxième long format : Hope Freaks. Long format, c'est-à-dire onze titres dont deux instrumentaux fort dispensables (à chaque début de face) sur une galette de 12 pouces qui tourne en 45 tours. Une pochette aussi arty et péteuse que celle d’un album de Sonic Youth, un insert qui nous apprend que Hope Freaks a été enregistré par le roi des queutards de Chicago et mixé par le prince du death metal is free jazz et on a presque fait le tour de ce disque. Hop, au placard.
Non, je plaisante. Passé un Gang Of Wire dont le titre n’a aucun rapport avec la musique (instrumentale) qu’il illustre, Pre casse la baraque avec Haircut Tacos, de loin le titre le plus putassier de l’album avec les ha hahaha hahaha hahaha de la chanteuse mais aussi le plus réussi, celui que l’on aurait bien vu tourner à la même vitesse sur un format plus petit, un titre à single quoi, de ces singles dont on raffole parce qu’ils ne durent pas trop longtemps et qu’ils n’échappent à l’anecdotique que par la force de l’éphémère. Et bien c’est raté puisque il y a encore neuf titres à s’enfiler derrière. Rien de mauvais. Mais rien de transcendant non plus. A l’exacte croisée de Melt Banana (évidemment) et des laborieuses Erase Erata. Allez, pour la face B du single que Skingraft aurait mieux fait de sortir à la place de ce disque on a le choix : j’opte pour Teenage Lakes (en fin de première face) ou plus sûrement pour Love Crunch (deuxième titre de la deuxième face), presque aussi pute et coke que Haircut Tacos car lui aussi doté de hahaha haha à faire bander un Bambi aussi raide que mort. C’est avec ce genre de disques d’une banalité affligeante et d’un propos sans danger que les plus grincheux en viennent à penser que le punk est mort. Passez moi ces rosbifs au barbecue et que l’on n’en parle plus.

lundi 13 juillet 2009

Sofy Major / self titled























Après un mini album qui m’est rapidement tombé des mains et après un split 10' partagé avec les lyonnais de One Second Riot et trouvé à peine plus intéressant, voici le retour de Sofy Major. Les clermontois ont du faire face à quelques changements de line-up et proposent ce nouveau maxi quatre titres via les labels Emergence records (site non mis à jour depuis un petit paquet de temps) et Communication Is Not Words (des pros de la com’ et marketing quoiqu’ils en disent). Sofy Major a mis le paquet au niveau de la présentation de son disque avec un artwork signé Brian Cougar sérigraphié sur une pochette gatefold en gros carton. La galette de vinyle est elle aussi sérigraphiée sur sa face muette, faut pas gâcher. Mais c’est surtout question contenu que le groupe est passé à la vitesse supérieure, quittant les rivages d’un hard core à tendance juvénile et screamo (pléonasme) pour se rouler dans la boue puante d’un metal lourd fortement teinté de noise névrotique. Densification du son, étayage des compositions de l’intérieur et carapace urticante à l’extérieur. Le résultat est d’autant plus bluffant que l’on ne pensait pas Sofy Major capable de telles prouesses, attaquant l’auditeur directement à la gorge et ne le lâchant plus, l’étouffant lentement mais sûrement.
Guitares épaisses et poisseuses et rythmique ultra pesante (Meurtre à Lezoux) ne sont pas les uniques points forts d’un disque dans lequel petites bidouilles électro et samples malfaisants sont utilisés avec discrétion et efficacité, bien planqués dans le mix pour ne pas donner cette impression de greffe artificielle qui en général gâche tout. Sofy Major sait également se faire insidieux et particulièrement malsain (les ambiances industrielles et sales sur Endive) ou plus basiquement efficace et direct (Need A Spank ?, le titre malheureusement le moins original du lot). Final taillé sur mesure dans un brouillard obscur pour une grande orgie de sentiments dépressifs et sombres, Satan expérimente un chant plus nuancé (et clair), ramène à la vie quelques fantômes putrescents et bouffés par les vers, inverse les bandes -y a-t-il un message subliminal caché comme sur un vieux disque de Judas Priest ?- et les errances bienvenues des guitares ouvrent de nouvelles perspectives à un groupe dont on espère maintenant qu’il ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Et puis la face B non gravée a beau être très belle avec sa sérigraphie, on regrette quand même de ne pas pouvoir en entendre davantage…

dimanche 12 juillet 2009

Anaal Nathrakh / In The Constellation Of The Black Widow























Tu es allé voir Fast And Furious 4 au cinéma ? Moi non plus. Mais tu as quand même tort. Parce que si tu étais allé voir cet hymne à l’ultraviolence routière et à la silicone mammaire surdimensionnée tu aurais sûrement compris là où je veux en venir à propos de In The Constellation Of The Black Widow, cinquième album des britanniques d’Anaal Nathrakh. Anaal Nathrakh est un duo composé de Dave Hunt (alias V.I.T.R.I.O.L.) à la voix et de Mick Kenney (aka Irrumator) à tout le reste, un duo dont le nom est également une vague référence cinématographique un peu kitsch et particulièrement trompeuse quant à la nature de la musique d’Anaal Nathrakh. Le metal du groupe n’a en effet rien d’épique, ne verse pas dans l’heroic fantasy flashy ou le culte du super guerrier à la Manowar.
Non, Anaal Nathrakh pratique un genre de boucherie/équarrissage musical que l’on pourrait qualifier de metal extrême (pour une fois et au sens littéral du mot extrême). Pour arriver à ses fins le duo bouffe à tous les râteliers. Death metal, black metal, grind core parfois, tout est bon pour alimenter un principe de surenchère quasiment inhérent à tout groupe de metal qui se respecte mais particulièrement exacerbé et jusqu’au-boutiste chez ces grands malades d’Anaal Nathrakh. C’est d’autant plus flagrant sur In The Constellation Of The Black Widow qui, s’il reprend les mêmes recettes parfaitement réglées et mises au point par le duo au fil de ses enregistrements passés, marque un retour d’Anaal Nathrakh vers ses racines les plus sombres et les plus visqueuses. On ne retrouvera jamais les accents sombres et malsains de l’album The Codex Necro (pour quoi faire d’ailleurs ?) ou -mieux- la crasse purulente de Total Fucking Necro mais on est en même temps plus éloigné du lyrisme hargneux et des guitares parfois clairvoyantes de l’album précédent du groupe, Hell Is Empty And The Devils Are Here. Un album qui avait fait date malgré un certain formatage de son ultraviolence et qui paraissait bien plus digeste car mélangeant sans vergogne éléments réellement mélodiques et chaos sonore le plus total -à l’image du chant de Dave Hunt synthétisant en un effarant tour de passe-passe Bruce Dickinson, Barney Greenway et Jon Chang (Discordance Axis).
On retrouve cette dualité sur le premier titre éponyme de In The Constellation Of The Black Widow, dualité qui repointe le bout de son nez à l’occasion tout au long du disque. Mais ce sont surtout les plans black qui font leur retour en force, avec arpèges macabres de guitare et chant de sorcière sodomisée par le grand Satan. Une agression permanente qui prend à la gorge -au risque de prendre la tête- sans faire réellement de détail ni s’accorder de pause. Pas la peine d’aller chercher midi à quatorze heures, Anaal Nathrakh est le genre de groupe qui vous dira que sa musique est à l’image du monde qui nous entoure et que nous allons de toutes façons bientôt tous crever, bordel de merde… oui, oui, oui… Prenons In The Constellation Of The Black Widow comme un défouloir sur mesure pour notre haine quotidienne et ordinaire mais certainement pas comme un mètre à penser. Un médicament palliatif, une drogue mais absolument pas une musique chargée d’un sens quelconque. Dans la catégorie groupe pour se souvenir de ce qu’il faudrait pourtant oublier Anaal Nathrakh sont les champions : un poubelle dotée d’un effet miroir qui pour l’instant ne s’est pas encore transformé en caricature avec effet boomerang. Peut être que cela viendra un jour…

samedi 11 juillet 2009

New Brutalism / Actual Record























Ce disque est une grosse blague… Ce groupe est une grosse blague… Vraiment ?... Non, pas tant que ça ! New Brutalism c’est trois types qui poussent le vice jusqu’à jouer un noise rock dans le plus pur style de Shellac (période des premiers singles du gang de Steve Albini et du premier LP At Action Park) avec un sens de l’imitation et du mimétisme qui élimine d’emblée toute envie de critique et d’analyse. Un tel culot laisse pantois. Une imitation plus vraie que nature. Jusqu’à l’absurde. Mais cette absurdité là on y croit très fort parce qu’Actual Record est un très bon disque. Bien au delà de l’hommage, de la célébration ou d’une simple photocopie.
New Brutalism est la réplique officielle et définitive d’un groupe jugé important par toute une flopée d’admirateurs du chicago sound et qui le surclasse les doigts dans le nez. C’est (très) difficile à admettre. Mais on l’admet, sans honte aucune. La même absence de honte qui pousse les trois New Brutalism à envoyer des titres tels que 066 ou 059 -parce qu’en plus le groupe pousse le syndrome de non personnalité jusqu’à ne pas donner de titre à ses chansons. Quel est donc l’intérêt d’une telle démarche me direz vous ? Et bien c’est difficile à expliquer.
Ce ne sont pas les pâles copies de Shellac qui ont manqué jusqu’à présent. Les New Brutalism se démarquent simplement des autres en utilisant deux ingrédients essentiels : l’énergie spontanée et la crédibilité de l’ouvrage bien fait. En un mot l’authenticité rock’n’roll primale que le trio est allé déterrer en rongeant le style Shellac jusqu’à l’os pour en sniffer la substantifique moelle. Un peu comme si AC/DC se refaisait adouber par Chuck Berry et consorts en dynamitant au centuple son boogie-woogie façon Let There Be Rock. Contre toute attente, on tient paradoxalement là l’un des disques les plus honnêtes qui ait été publié cette année. Honnête parce que motivé par une démarche insoupçonnable. L’imitation comme vérité et transcendée en tant que telle. Et à ce propos : qu’en pense donc la bande à Steve Albini ? En guise de réponse on peut préciser que c’est le gros Bob Weston lui-même qui a procédé à cet enregistrement. Et il savait assurément ce qu’il faisait en agissant de la sorte.

[ce disque est publié en CD par le label parisien Rejuvenation, la version LP ne devrait elle pas trop tarder à arriver…]

vendredi 10 juillet 2009

Biosphere / Wireless





















Je n’ai pas encore trouvé le musicien électronique qui me fera lever mon gros cul pour que j’aille l’applaudir dans une salle de concert. Vas-y mon gars, pousse les potards de ta mixette et bidouille ton laptop pendant que je danse comme un forcené ou que je plane comme une limace violette. Et ce n’est pas ce nouveau (et vraiment bon) disque de Biosphere qui va me faire changer d’avis. Notre homme, Geir Jenssen, a commencé sa carrière du côté de la pop ethnique et ridicule à fortes consonances Cocteau Twins -il joue sur les deux premiers albums de Bel Canto- avant de se découvrir une passion pour l’électro et de monter son projet solo Biosphere dont il affinera peu à peu l’approche musicale sous l’influence grandissante de son autre passion, le field recording allié à la musique ambient (son disque Substrata paru en 1997 est l’un des plus beaux du genre et est parfois considéré comme le meilleur disque de Biosphere tout court).
Wireless est un album enregistré en concert (sous-titre : Live At The Arnolfini, Bristol, 10/27/2007). Un concert sans applaudissement ou plus exactement ceux-ci ont fort judicieusement été coupés au montage/mixage. Car Wireless se présente comme un long catalogue itinérant de la musique de Biosphère, chaque plage changeant de couleur, de forme, d’univers et donc de caractère. Il est assez troublant d’avoir ainsi l’impression de se faire balader à travers un savoir-faire indéniable sans avoir en même temps le sentiment d’être pris pour un cobaye à sensations. Car ici tout se tient, tout est lié, pensé… et logiquement rien n’est laissé au hasard, rien n’est perdu ou gaspillé, l’économie et la douceur des moyens employés contrastant avec la force de persuasion d’une musique envoûtante bien que désormais maintes fois entendue et rabâchée. Et il y en a donc pour tous les (bons) goûts. De la techno minimale et vaporeuse sous l’influence directe de Wolfgang Voigt/Gas, du dub aquatique et lysergique, des voix enregistrées renvoyant directement aux anciens travaux de Scanner, de l’ambient transcendantale, quelques incursions dans la musique concrète… Wireless est totalement débarrassé des tics chargés de joliesse et de bonne éducation qui était la tare principale du précédent album de Biosphere (Dropsonde, en 2006) beaucoup trop marqué par un esprit végétal bon teint et élégant/réunissons nous dans notre salon Ikea pour sauver le monde et la planète.
La musique de Biosphere est certes toujours aussi simple d’accès et lisse -trop propre disent ses détracteurs zélés- mais elle possède le charme irremplaçable du galet de rivière que l’on a ramassé enfant dans le creux d’une rivière et que l’on a toujours conservé depuis en guise de porte-bonheur : un galet rond et dur qui tient si parfaitement dans la main qu’il semble lui-même pouvoir contenir tout ce que l’on souhaite de beau et fort.

jeudi 9 juillet 2009

Scanner / Rockets, Unto The Edges Of Edges























L’entité Scanner existe encore. Je dois souffrir de ce syndrome nombrilisme qui fait que lorsque un musicien/groupe ne sort plus de disques c’est qu’il n’existe plus. Qu’il est mort*. Ou pire : que le type s’est reconverti dans une florissante carrière de cadre supérieur chez Sony -comme James Williamson par exemple, mais maintenant qu’il part à la retraite, il va enfin pouvoir redevenir punk rocker et reprendre sa place dans cette grande farce que sont devenus les Stooges. Donc voilà, aucune nouvelle de Scanner depuis l’album Reason By Heart, Sleep By Twilight publié en 2005 par Bine Music, lequel label publie également ce tout nouveau Rockets, Unto The Edges Of Edges. Quatre années c’est plutôt un lapse de temps assez court mais il a été suffisant pour procéder comme il se doit aux funérailles de Robin Rimbaud (le vrai nom du bonhomme derrière Scanner). Sûrement à cause de la participation du musicien en tant que guitariste au projet Githead, groupe réunissant le Wire Colin Newman et l’ex Minimal Compact Malka Spiegel -une petite horreur poppy cold désuète même pas capable de ranimer à la vie ma flamme nostalgique d’enfant des 80’s. Qu’est ce que j’ai raté entretemps ? Apparemment deux maxis (toujours sur le même label), Teeange Wochen et Moskau Disko plus une ou deux autres galettes en vinyle, rien de grave en soi -pour les affamés et les pointilleux, la discographie complète de Scanner se trouve ici.
Le Scanner dans sa version 2009 n’a plus grand-chose à voir avec le Scanner du début des années 90, celui des trois premiers enregistrements sur Ash International/Touch records, celui de l’album Sulphur (chez Sub Rosa, avec son incroyable maxi Flâneur Electronique) ou des sessions live new-yorkaise, parisienne et londonienne en compagnie de David Shea et Main (toujours sur Sub Rosa). Au fil des années Robin Rimbaud a considérablement étoffé son vocabulaire, usant toujours de voix inconnues (tout en renonçant semble t-il à l’utilisation de scanners de la police destinés à intercepter les conversations sur téléphones cellulaires) mais appuyant de plus en plus ses rythmiques -allant même jusqu’à enregistrer en 2000 un album sous le nom de ScannerFunk, ce qui veut tout dire. Plus de dub aquatique, plus de brumes urbaines, plus d’illbient, moins d’oppression poétique : en s’humanisant la musique de Scanner a rejoint les cohortes de projets electronica sans grande originalité, opérant ce détestable glissement de l’impressionnisme (dans des genres très différents : Gas, Oval, Autechre) vers le cinématographique et le dédié (Gridlock, Ginormous).
Rockets, Unto The Edges Of Edges
entérine le fait que Robin Rimbaud regarde trop la tv et lit beaucoup trop de bouquins avant de composer. Son désir de musicalité et de mélodicité au détriment de la poésie des accidents sonores et des nappes sulfureuses chargées d’electronica minimale n’incite définitivement plus à la rêverie sous éther et/ou à la perte de repères. C’est tellement désagréable d’écouter ce piano renforcé de cordes sur le très grandiloquent Pietas Ilulia. Approfondissant un peu plus cette démarche de lisibilité, Scanner/Robin Rimbaud joue également beaucoup trop de guitare sur ce nouveau disque -et si c’est une conséquence directe de sa participation à Githead alors je hais encore plus ce groupe. Dans le même genre d’idée Michael Gira a été invité à gratouiller sur le premier titre (Sans Soleil) tandis qu’une soprano est venue pousser la chansonnette sur Anna Livia Plurabelle. Rien de franchement ignoble, rien de déroutant et rien de rédhibitoire. Heureusement qu’un titre comme Yellow Plains Under White Hot Blue Sky rappelle que Scanner est aussi un magicien de la suggestion… avant que les synthés en forme de violonades n’interviennent à nouveau. Il va falloir s’habituer (ou pas) à ce côté soyeux et tiède nouveau (définitif ?) chez Scanner. Une bonne grosse paire de pantoufles digitales, en résumé.

* à l’exception de Mickael Jackson : mort-vivant depuis des années, il ne rapportait plus grand-chose à Sony ; désormais enterré en bonne et due forme, il va enfin pouvoir ressortir des disques et engraisser les producteurs

mercredi 8 juillet 2009

Burmese - Potop / split LP























Historiquement ce split album est sorti avant le 25 centimètres Colony Collapse Disorder. Et il est tout aussi bon, du moins sur sa face Burmese. Publié grâce à deux labels aussi obscurs l’un que l’autre -le macédonien Fuck Yoga records et l’allemand Crucificados Pelo Sistema- ce disque est vraiment un curieux objet, à la pochette taillée n’importe comment dans du gros carton et retenue par un obi avec des inscriptions en alphabet cyrillique (?). Dessus on croit même pouvoir déchiffrer une indication dont on devine qu’elle nous révèle que ce disque est un tirage limité à 600 exemplaires (цєна : 600 дєнари). La photo qui s’étale sur le recto et le verso est granuleuse au possible et d’un morbide oscillant entre une salle d’attente dans un sanatorium pour petites vieilles anorexiques ou l’antichambre du laboratoire d’analyses expérimentales du professeur Josef Mengele.
La face Burmese est tout aussi horrifique que cette image de mort. La musique y est déconstruite, passant du punk braillé (à la Drunk With Guns) du premier titre à quelques surprises chargé d’un faux silence inquiétant avec quand ça redémarre toujours ce sens du grind du pauvre comprenant blasts au rabais et ambiance fond de garage. Du cru et du dru dont les variations d’intensité et de propos rendent la musique de Burmese de plus en plus passionnante, instinctivement dangereuse et à la limite de l’inécoutable. A la limite seulement puisque après ces huit titres de no wave grind, industrielle, tribale, dissonante, fracassée et apocalyptique on arrive à se relever d’entre les morts pour écouter la deuxième face de ce split LP.
De l’autre côté Potop (originaire de Macédoine) se contente de deux longs morceaux. Une longue intro chargée de larsens de guitares grésillantes, une batterie dont on espère qu’elle ne va pas conduire tout ça sur un énième plan doom/sludge des cavernes… l’accélération semble arriver lentement, se transformant elle-même en seconde intro : la musique de Potop est construite par paliers non sans une certaine grandiloquence digne d’un groupe de black metal au ralenti (un groupe de post hard core obscurantiste ?) et avec un son tout dégueu et violemment acide qui donne mal à la tête. Descriptif certes encourageant mais on s’emmerde rapidement face à tant de tergiversations et d’hésitations -ira ? ira pas ?- et finalement Potop fait du surplace. Sympathique et trop attendu/entendu. Et ça ce n’était que le premier titre. Le second est plus direct et classique mais tout aussi banal et fade, les salades racontées par ces macédoniens ne intéressent vraiment pas. Burmese = 10/10 ; Potop = 4/10.

mardi 7 juillet 2009

Burmese / Colony Collapse Disorder




















Je n’y comprendrai jamais rien à l’historique de Burmese. Le groupe s’est séparé en 2006 c’est bien ça ? Et puis il s’est reformé en 2008 avec Weasel Walter fraîchement débarqué à Oakland/Californie ? Ce n’est pas tout à fait exact. Mais tout le détail est , avec précisions discographiques et dates des arrivées et départs de chaque membre. De quoi s’y retrouver ou s’y perdre définitivement. Dernier constat en date : Burmese est toujours constitué de deux bassistes (les deux Mike et les deux seuls membres d’origine dans le groupe), de deux batteurs (dont effectivement Weasel Walter) et d’un chanteur (?). Colony Collapse Disorder publié par Rock Is Hell records est à ce jour l’enregistrement le plus récent du groupe.
C’est aussi celui dont la présentation est la plus jolie. Un 25 centimètres picture disc dans une pochette orange estampillée en bas à gauche du cadavre d’une abeille. A l’intérieur une enveloppe carrée toujours de couleur orange contenant deux cartons, chacun reproduisant le track listing d’une face. Sept titres d’un côté, cinq de l’autre. Avec ça le minimum d’indications -line-up, enregistrement et année (2008)- mais pas une note, pas un merci, rien de rien, fuck off. Le disque en lui-même est magnifique, reproduisant la photo de deux abeilles sur fond d’alvéoles dans une ruche. Burmese serait il devenu un groupe écolo ? Colony Collapse Disorder est une expression qui traduit le phénomène mondial de mort subite et massive qui touche les abeilles et leurs habitations naturelles (ruches) ou pas (essaims). Selon certains marabouts catastrophistes et malfaisants de l’extrême gauche ce serait là les prémices d’une catastrophe mondiale sans précédent : comment désormais continuer à fabriquer les miel pops dans des quantités aussi astronomiques qu’auparavant ? Allez, on s’en fout de la fin du monde puisque la musique nous sauvera…
Pas si sûr, en tous les cas, certainement pas celle de Burmese. Laquelle -en complète contradiction avec la jolie présentation du disque- n’a guère évolué depuis les premiers enregistrements avec le frappadingue John Dywer à la batterie ou ce fameux mini album chez Load records. Du grind core swanesque et lo-fi. Je comprends bien qu’il y a au moins deux contradictions dans ce descriptif lapidaire et limité mais le dégueulis métallique et insensé de Burmese ne peut tolérer aucune classification… sauf peut être celle de groupe à aller voir absolument jouer le jour où il passe à côté de chez soi mais ça, on le sait bien, c’est complètement perdu d’avance. Allez bon, pour la route une dernière tentative descriptive : un tiers de Brutal Truth (pour le grind), un tiers d’Headbutt (pour le côté crade et percussif) et un tiers de Missing Foundation (pour l’esprit complètement nihiliste d’une telle entreprise de dynamitage de toutes formes de règles). Tant pis, à la place des miels pops on pourra toujours se bâfrer avec les asticots confits récoltés sur les cadavres de nos voisins de pallier ou collègues de boulot une fois l’armageddon survenu -à moins que ce ne soit le nôtre de cadavre qui serve de garde-manger. Mon grand père, paysan rustre et superstitieux (et apiculteur), me disait toujours : mange, tu ne sais pas qui te mangera.

lundi 6 juillet 2009

Coalesce / Ox






















Relapse records, le label de l’extrême qui ne fait plus peur qu’à ta mère et à ton grand frère est décidément un label de charognards et de nécrophiles. Après avoir déterré de la fosse publique le cadavre toujours fringant de Brutal Truth, Relapse donne à Coalesce l’occasion de concrétiser une reformation remontant à l’année 2005 et ayant déjà permis au groupe du Kansas d’accoucher d’un excellent single il y a un peu moins de deux ans. Là on en prend carrément pour un album entier intitulé Ox -de la musique de bourrins mais pas pour les bœufs ?
Un vrai album gavé jusqu’à la gueule : quatorze titres et une grosse demi-heure, un exploit pour Coalesce qui dans le passé avait plutôt publié des enregistrements bâtards, trop courts pour être de véritables albums mais trop longs pour être de simples maxis. Aux premiers rangs de ceux-ci, c’est Functioning On Impatience que je place sur la plus haute marche du podium et très loin devant tous les autres. Mais Functioning On Impatience c’est du passé. Oublions-le et oublions surtout les quelques égarements du groupe (tel que There is Nothing New Under the Sun, un album de reprises de Led Zeppelin).
Je ne sais pas ce qu’a donné la prestation de Coalesce lors du passage du groupe à l’édition 2009 du Hellfest -désormais l’un des plus importants rassemblements européens de metal en tous genres faisant comme il se doit et à bon escient l’apologie de l'intolérance, de la sodomie, de la défonce et de deux ou trois autres trucs qui font du bien par où ça passe (et comme si les institutions religieuses de toutes confessions n’avaient jamais imposé leur pouvoir à l’individu par la force et l’intimidation : dogmatisme, vérité absolu, prosélytisme, guerre et action politique coercitive)- donc je ne sais pas ce qu’a donné la prestation de Coalesce au Hellfest 2009 puisqu’à ce sujet (et surtout au sujet du chanteur Sean Ingram) les avis sont très partagés voire contradictoires. Mais sur disque, Coalesce confirme sa grande maîtrise du son et du studio. Le groupe a le don de produire des objets sonores parfaits, à mille lieues des poncifs du metal core dont il serait pourtant grandement responsable. D’ailleurs je me demande toujours pourquoi.
Mesures bizarroïdes, soli de guitare grippés par un art subtil de la dissonance, couple basse/batterie en pivot omnipotent et chant d’aboyeur patenté : tout Coalesce est là, comme aux premiers jours et le premier titre, The Plot Against My Love, remet les pendules à l’heure en trois petites minutes. Après c’est l’innovation qui débarque. Pas grand-chose mais suffisamment pour que cela se remarque et pour que Ox devienne un album encore plus passionnant que tous ses prédécesseurs réunis. En vrac, un peu de chant clair par ici, des chœurs de galériens par là, un interlude bucolique au clair de lune à gauche, une balade instrumentale et d’une discrète tristesse sur la droite… Coalesce aime surprendre pour mieux vous tanner votre gueule d’enfoiré pépère le morceau d’après. Efficacité garantie, résultats inespérés tout comme l’aiguille des vumètres constamment bloquée dans le rouge dès que Coalesce a décidé de tout bétonner. Ce qui est le cas 90 % du temps, ces petites innovations restant minimes bien que significative. Coalesce fait donc ce qu’il fait de mieux : du Coalesce pur et dur, unique et inimitable.

dimanche 5 juillet 2009

Lewis Karloff, Fat 32 et Secret Chiefs 3 live @Grrrnd Zero























Il est là, c’est le dernier concert de la saison. Tout le monde s’apprête à partir en vacances avec David et Jonathan, le désert des mois de juillet et d’août s’étale désormais à perte de vue (avec deux ou trois oasis tels que le Festival Expérience au Périscope du 23 au 25 juillet ou des concerts dans des squats divers et variés). Le Grrrnd Zero et l’Amicale Saint-Gérard finissent très fort au sprint avec la programmation de Secret Chiefs 3, groupe/hydre mené de main de maître par le fantasque guitariste -ses fans éternels disent génial- Trey Spruance, un bonhomme dont la longueur du curriculum vitae dépasse les limites de ma mémoire et est au moins proportionnelle à la taille de sa barbe grisonnante et broussailleuse. Secret Chiefs a ses fans hard core, ses inconditionnels capables de faire quelques centaines de kilomètres pour voir le groupe sur une scène, chose que personnellement je ne ferai jamais, surtout avec mon vélo agonisant. La poignée de kilomètres qui me séparent du Rail Théâtre où va se dérouler le concert de ce soir représente l’extrême limite que ma curiosité ne me laissera jamais dépasser pour un groupe pour lequel je n’éprouve aucune affection particulière, même si ce groupe a la réputation d’être un ramassis de freaks et de têtes brûlées. Allez Papy, on y va.


















Argument en faveur de la soirée : celle-ci débute par deux groupes locaux fort appréciés. Premières guest stars avec Lewis Karloff, trio guitare/basse/batterie (avec un soupçon de samples) dont il se murmure que ce sera là le dernier concert avant longtemps, le bassiste ayant parait il décidé de s’expatrier au pays de la bonne bière trappiste et de la patate frite. La géographie est parfois l’ennemi de la musique. Le groupe envisage tout de même d’enregistrer ses nouvelles compositions qui devraient sortir sur un split 10’ chez Gaffer records, label dont l’heureux propriétaire est également le guitariste de Lewis Karloff (l’autre groupe prévu pour ce split devrait être les énormes Ahleuchatistas).
Si le trio commence à jouer devant une assistance clairsemée, celle-ci va rapidement gonfler, il y a du monde qui se bouscule à l’entrée de la salle, oui c’est l’été et les gens arrivent encore plus tard que d’habitude aux concerts. Le free jazz rock de Lewis Karloff va ainsi récolter des applaudissements et des cris d’approbations nourris et mérités. Les nouveaux titres paraissant plus complexes, structures plus fouillées avec davantage de travail sur des rythmes où si tu comptes deux par deux tu as tout faux. Le fait que le bassiste ait l’air moins à l’aise que d’habitude et le fait que le batteur n’arrive décidément pas à se débarrasser d’une certaine rigidité empêchant la musique de Lewis Karloff de prendre le train du groove qui tue en marche n’enlèvent par contre rien à la qualité de ce concert. De très bons moments entre jazz et punk, syncope et illumination. J’espère donc revoir Lewis Karloff avant la fin de l’année prochaine.


















Autre groupe dont je ne me lasse pas en concert : Fat 32. Le duo claviers/batterie a quelques problèmes de matériel rapidement réglés (une enceinte qui fait des siennes) et c’est parti pour un set de zouk core, de nitendo punk et de movie metal. La musique de Fat 32 doit beaucoup aux enregistrements les plus grotesques de Naked City, à l’esprit cartoon d’un Tex Avery particulièrement déjanté -quelque chose proche de Mattioli et de son Squeak The Mouse. C’est très bien joué (le batteur est autant artiste que boucher et le claviériste le lui rend bien) mais avec une absence totale de prétention et d’exhibitionnisme rendue possible par un plaisir commun du jeu et de l’échange. Ce que l’on appelle une complicité sans faille.
Passage désormais traditionnel par ce titre qui reprend quelques mesures de chansons célèbres -pour donner une petite idée, la première de la liste n’est autre que l’ignoble A Whiter Shade Of Pale- avant de les passer au marteau-pilon et autres instruments de torture. L’abattage en règle du bon goût populaire sans tomber dans l’élitisme du second degré. Toujours aussi virevoltant et fantasque, Fat 32 ne se contente pas de survoler son sujet qu’il connaît fort bien, le duo fonce dedans tête baissée et explose règles et limites avec bonheur.
J’aimerais un jour voir ces deux garçons devant un public qui ne les connaît pas par coeur, ne frétille pas d’avance à tous leurs moments de bravoure. Les voir dans un contexte différent leur enlevant tout risque de passer pour des bêtes de foire (ce que fort heureusement le duo est jusqu’ici toujours parvenu à éviter) et leur ouvrirait la possibilité d’une interprétation encore plus absolutiste de leur bordel organisé. J’attends aussi un premier enregistrement, sûrement pour très bientôt et toujours sur Gaffer records.


















Avec Lewis Karloff et Fat 32 j’ai déjà plus que gagné ma soirée. Maintenant place à la curiosité. Sur la scène tout le matériel de Secret Chiefs 3 est déjà en place. Une très belle batterie en plastique bleu transparent (mais où ai-je déjà vu une telle batterie ?), des claviers à gauche, une trompette et un violon sur la droite. Un gugusse monte sur la scène et ce monsieur Loyal nous annonce avec force ironie -le petit groupe de merde qui va jouer juste après (sic)- que Secret Chiefs 3 va découper son concert en trois sets de colorations différentes et séparés d’une petite pause de cinq minutes. Soit. La salle se remplit de fans ultimes du groupe et que je sens prêts à tout pour passer le meilleur moment de leur vie.
Trey Spruance débarque avec ses musiciens, à l’exception de lui-même et de son bassiste aux pieds nus tout le monde est en costard-cravatte. Lunettes noires pour tous. Et là, c’est la grosse claque, Secret Chiefs 3 ayant choisi d’ouvrir le bal dans un registre surf and destroy jouissif et ultra dynamique. Le guitariste en chef pète une corde et pendant qu’il répare promptement, le reste de ses musiciens attend sagement au garde-à-vous… pour mieux repartir, sans temps mort, alignant riffs surf et mélodies morriconniennes (avec trompette et tout) avec une énergie punk as fuck. Je commence à m’avouer intérieurement que je me suis peut être trompé sur ce groupe dont je n’aime pas particulièrement les disques, mis à part Xaphan, alors que la première partie du concert s’achève déjà…


















Monsieur Loyal revient faire un tour sur la scène pour y installer une chaise. Lorsque les Secret Chiefs 3 reviennent à leur tour, ils sont tous encapuchonnés. Trey Spruance s’envoie une rasade de boisson énergisante et passe un temps fou à accorder son saz électrique. La deuxième partie sera donc consacrée au côté oriental de la musique du groupe. Trey Spruance joue avec une énorme dextérité de cet instrument au manche d’une finesse inappropriée pour n’importe quels gros doigts et surtout avec des cordes jumelées. Celles-ci sont maintenues par des clefs en bois, c’est dire la fragilité de l’instrument et de son accordage.
Le deuxième guitariste, celui qui avait déjà assuré à la trompette juste avant, prouve qu’il sait également se servir d’un violon et la coloration piquante de la musique n’a rien de désagréable. Comme le groupe prend plus son temps, joue moins hystérique quoique toujours aussi touffu (Trey Spruance est même confortablement assis, évidemment la chaise c’était pour lui), l’amateur a toute l’opportunité de décortiquer ce qui se passe sur scène. Le bassiste qui joue aux doigts et s’éclate tout seul, par exemple. Je réalise alors que derrière cette batterie bleu transparent top kitsch et qu’il me semblait bien reconnaître ce n’est autre que Ches Smith et sa petite gueule d’ange qui joue. Ce même batteur qui accompagnait Jamie Stewart dans Xiu Xiu l’année dernière exactement au même endroit. Un batteur vraiment extraordinaire et capable de jouer n’importe quoi.























Et c’est que là que je décroche. Tout le monde descend. Secret Chiefs 3 n’est pas ce groupe foutraque et follement imaginatif envoyant valdinguer dans le décor toutes ses influences/sources d’inspiration. Secret Chiefs 3 est un groupe de musiciens hyper pro qui sourient connement en s’écoutant jouer (mention spéciale au bassiste, oui, toujours le même) et faire des phrases musicales bien trop belles pour être vraies -vraies : caractère de ce qui ressemble à une vérité quelle qu’elle soit et donnant en matière de musique ce sentiment de bonheur que rien ne saurait expliquer.
Le deuxième set s’éternise et finit par ennuyer. Et lorsque le groupe revient pour la troisième fois sur scène, tout le monde est en bras de chemise. Pas de thématique apparente mais un mélange de l’énergie de la première partie et des bizarreries de la deuxième. Des passages ethniques collés à des passages presque hard core collés à des passages pop collés à des passages bossa-jazz collés à des passages country collés à des passages sixties. Le pire c’est l’impression que cela pourrait continuer encore longtemps comme ça. L’impression que Secret Chiefs 3 pourrait encore jouer pendant deux heures alors qu’il ne se passe plus rien de vraiment palpitant. Je pars avant la fin et sans aucun regret, lassé également par le crétin de service -il y en a toujours au moins un par concert- qui depuis le début ne fait que hurler San Franciso ! Surf !, les seuls deux mots qu’il semble connaître en américain. D’un autre côté, ces mots là, tout le monde les connaît aussi.

vendredi 3 juillet 2009

Grey Machine / Vultures Descend




















Hydra Head, encore. Et avec le prochain super groupe de l’année, Grey Machine. Lequel comprend Justin Broadrick, Aaron Turner, Dave Cochrane et Diarmuid Dalton -autrement dit un quartet d’éminents musiciens nous remémorant quelques noms de groupes prestigieux appartenant au passé (Head Of David, Godflesh, God/Ice, Cable Regime), d’autres nettement plus dispensables mais malheureusement toujours en activité (Isis, Transitional) ainsi que certains dont on aimerait bien avoir des nouvelles fraîches (Old Man Gloom) ou pour lesquels notre confiance illimitée commence sérieusement à s’essouffler (Jesu). Alors à quelle catégorie va bien pouvoir appartenir Grey Machine ? Profitons des soldes, les petites cases à rangement arbitraire et les a priori sont à prix cassé en ce moment.
Difficile de répondre à l’écoute des deux titres proposés sur ce vinyle 12 pouces habillé du plus simple appareil, on croirait avoir affaire à un white label ou un test pressing d’un label techno : ronds centraux anonymes et pochette en carton basique uniquement estampillée d’un autocollant. Le premier titre, l’éponyme Vultures Descend est en libre téléchargement depuis des mois sur internet. Le second (We Are All Fucking Liars en faceAA) est un remix d’un titre qui figurera dans sa version normale sur le premier album du groupe, Disconnected, à paraître très bientôt (le 27 juillet… à moins que cette date ne soit à nouveau repoussée). Ce 12’ n’a donc pour seul intérêt que celui de l’avant première, question inédit il faudra repasser et l’objet en lui-même n’a rien de suffisamment exceptionnel pour exploser les prix sur les sites d’enchères une fois les six cents exemplaires du tirage définitivement écoulés.
Vultures Descend
démarre avec un son synthétique crado et grésillant qui restera sous-jacent sur presque toute la durée du titre. La rythmique est à la fois lourde et flou, la guitare teinté d’une reverb bourrée de lames de rasoir, la basse vrombit comme un bon vieux bulldozer lancé au ralenti à l’assaut d’une coulée de boue et la voix est noyée sous une tonne d’effets. Le groove qui maintient Vultures Descend et tous ses errements et/ou variations (neuf minutes quand même) dans un énorme carcan psychotique est imparable -cassé, violent mais entraînant à sa façon. Après une longue descente aux enfers instrumentale où le côté malade de Grey Machine transparaît nettement, la fin du titre n’est qu’un amalgame anarchique de bruits synthétiques ou d’origine inconnue devant beaucoup à la folie d’un Chrome. Imparable et vénéneux.
We Are All Fucking Liars
s’appuie sur un son de boite à rythmes rachitique et déplacé en comparaison de la violence du synthétiseur et de la guitare de Vultures Descend. Normal puisque c’est un remix et que l’on sent parfaitement que le gros mammouth pétomane a été dégraissé et raclé bien profondément là où il faut. Chaque instrument/chaque son intervient à tour de rôle, ce catalogue ne contient aucune faute de goût et se révèle encore plus malade, inquiétant et drogué que le maelstrom bidouillé de la première face. On y retrouve certains accent hip-hop tribal/indus de l’album Cold Blood de Ice (l’un des meilleurs albums de la fin du siècle dernier soit dit en passant) et on s’attend à un featuring de Kevin Martin -évidemment pas là puisque bien trop occupé par The Bug ou je ne sais quel autre projet de deuxième catégorie. Voilà un 12’ qui annonce bel et bien un album que l’on espère tout aussi impressionnant et sombre, groove et glauque, organique et industriel. Impatience…

jeudi 2 juillet 2009

Keelhaul / You Waited Five Years For This ?























Moi aussi j’ai attendu. J’ai attendu cinq années complètes pour ce malheureux single sans titre réel de Keelhaul -les deux faces non plus n’ont pas de titre, c’est la débandade complète- avec un artwork approximatif et le minimum d’informations légales, enregistré par machin aux studios truc pendant l’été de l’année blah blah blah. Il faut même se niquer les yeux pour avoir la confirmation que c’est bien Hydra Head qui a publié ce disque. Un teaser -et non pas un taser : pour l’électrochoc espéré il faudra attendre encore un peu- annonçant un album, un vrai, un beau. Un nouvel album de Keelhaul, enfin.
You Waited Five Years For This ?
c’est donc une face représentée par un van aussi défoncé qu’un tour bus hollandais et une autre face avec un verre à cocktail au trois quarts vide. On imagine un cocktail sirupeux et écoeurant du genre à rendre indolent et niais n’importe quel Phil Anselmo sous amphétamines. Un truc, bleu, vert ou rose -va savoir- un truc qui donne envie de gerber par les narines rien qu’en le regardant.
Lorsqu’on écoute l’une face ou l’autre de ce single c’est à peu près la même nausée qui vous prend. Là encore c’est la débandade. La bande de Will Scharf s’est trop enfilé de fraises tagada marinées dans de la vodka tiède. Ou alors le groupe a décidé de rendre hommage à Tortoise. Où sont les guitares rugissantes ? Où sont passés les plans hallucinants enchaînés dans des tourbillons de fureur libératrice ? Où est passé l’esprit de ce groupe unique ? Vraisemblablement au fond du verre ou dans le coffre arrière du van. Déception, sanction, anathème, désamour, colère et excommunication jusqu’en Enfer, bande de vieux schnarkbuls dégénérés.
Et puis merde. Les choses sont ainsi faites que l’on se sent obligé de donner une nouvelle chance à ce disque. Après tout, il s’agit d’un disque de Keelhaul. Donc pas de n’importe qui. Et on n’y comprend toujours rien. On n’aime toujours pas beaucoup ça. Ce métal instrumental, mou et progressif de troisième âge. On n’aime pas ça mais on commence à accepter. Et à espérer que tout l’ironie que l’on croit déceler dans le titre du disque est bien réelle, que You Waited Five Years For This ? est une méchante blague, une récréation sans lendemain, un fuck off aux habitudes, une fausse piste de travail pas encore finalisée, une chaude pisse dont il fallait bien se débarrasser. Alors on attend. Encore. Que cet album de Keelhaul arrive enfin.

mercredi 1 juillet 2009

Khanate / Clean Hands Go Foul


Monoliths & Dimensions, dernier méfait de Sunn, est retourné dans son placard, il en ressortira peut être le jour où j’aurai arrêter de lire et d’entendre ces avis tordants à propos d’un émouvant hommage de Stephen O’Malley et Greg Anderson au In A Silent Way de Miles Davis et à l’architecture gothique. Un disque qui ne fait même pas peur à mes enfants (et qui ne les fait pas rire non plus). Supercherie et prétention.
Que dire de plus ? Qu’évoluer à tout prix ressemble à un hara-kiri dès lors que l’on joue une musique bien trop balisée ? Qu’au contraire ne pas être capable d’évoluer est le signe d’une défaite musicale ? Je cherche encore le point de rupture qui séparerait les groupes/musiciens chez qui l’évolution est naturelle (et nécessaire) et ceux chez qui elle n’est que manque d’inspiration et/ou trahison. Et je ne le trouve pas.
Pas de jugement ni d’anathème -cette distinction ne vise pas à séparer les bons musiciens des mauvais- mais le fait est qu’avec certains le changement passe très bien et qu’avec d’autres il en est absolument hors de question. Sunn était le vibrant hommage de deux metalheads à l’album Earth 2 de Dylan Carlson/Earth, un hommage lessivé et essoré bien au delà du nécessaire et du raisonnable. Une impasse stylistique mais qu’importe ? Désormais Sunn n’est plus ce concept terroriste et simpliste que l’on prenait comme tel (c'est-à-dire de plein fouet dans la gueule). Sunn tend à devenir une oeuvre d’art. C’est tant pis pour moi.























C’est tout le contraire avec Khanate. Cet autre groupe majeur de Stephan O’Malley s’est crashé en plein vol -certains musiciens reprochant aux autres leur manque d’investissement et vice versa, encore une histoire drôle- en laissant derrière lui trois albums et quelques enregistrements live. Une autre façon de se faire hara-kiri mais qui ne laisse pas ce goût amer des dérives et des errements. Khanate ne nous fera pas le coup du crépuscule des vieux. Annoncé comme l’album jumeau de Capture And Release -parce qu’enregistré pendant les mêmes sessions mais selon un processus parait il improvisé- Clean Hands Go Foul est l’ultime album d’un groupe bien mort et proprement enterré. Un cénotaphe de luxe disponible depuis bien trois mois en picture disc chez Trust No One, édité plus récemment en version vinyle classique par Hydra Head et également désormais disponible en CD, toujours chez Hydra Head. La différence entre versions CD et LP est de taille : pas moins de vingt quatre minutes d’amputées, le dernier titre Every Good Damn Thing faisant à lui tout seul les frais de cette opération chirurgicale. Le label a par contre eu cette bonne idée de mettre un temps l’intégralité de Clean Hands Go Foul en streaming -une idée très en vogue mais cela se comprend : il faut bien donner aux amateurs de musique envie d’acheter et donc leur offrir la possibilité d’écouter un disque avant sa parution.
Ecouter un disque de Khanate n’a justement rien d’anodin. Wings From Spine, le titre d’ouverture, pousse très loin l’exigence d’une musique ultime. Guitare fraiseuse, basse ronflante, batterie pyrotechnique et chant de psychopathe en pleine crise de mysticisme meurtrier. On sait que James Plotkin a pris son temps pour remonter ces sessions d’enregistrements posthumes de Khanate et leur donner une apparence construite et délibérée et le fait est que ces premières sept minutes sont l’annonce d’une orgie sonique et meurtrière et que l’on tremble rien qu’à cette confirmation que nos pires désirs vont être assouvis.
Alan Dubin, Stephen O’Malley, James Plotkin et Tim Wyskida n’y vont donc pas avec le dos de la louche dans la marmite de sorcières, Khanate a un sens de la torture musicale sublimée en beauté meurtrière et vénéneuse proche du sacrifice sans retour. Les incantations maléfiques du groupe convoquent tous les vieux monstres que Lovecraft n’a même pas eu le courage d’imaginer, ces errances métalliques sublimées par un feedback assassin aussi terrifiant qu’impérial et orgiaque débouchent sur une catharsis définitive. Alors effectivement, lorsque on a enregistré un album tel que Clean Hands Go Foul il est préférable de passer à autre chose ou carrément de s’arrêter là. Khanate est mort, vive Khanate : le groupe n’existe plus et c’est mieux ainsi, on le préfère mort et absolutiste que toujours vivant et rendant hommage au jazz de salon ou à la musique contemporaine.