mercredi 31 octobre 2007

Café Flesh, Akimbo et Wolf Eyes

.
L’affiche initiale de ce concert du mardi 30 octobre ne prévoyait que deux groupes : Café Flesh et Akimbo. Rapidement Wolf Eyes s’est ajouté à la liste, avec une nouvelle salle -plus grande- à la clef pour pouvoir accueillir tout le monde. Au final, il y a eu en tout et pour tout cinq groupes puisque Deadsons et Undata ont également été de la partie. Un programme chargé et schizophrène avec deux grandes tendances qui se sont affrontées ce soir-là : le rock’n’roll (parfois un brin metal) avec Café Flesh et Akimbo et l’expérimentation bruitiste et/ou improvisée avec Deadsons, Undata et Wolf Eyes, en plein trip power violence. Je vais faire mon bougon parce que j’aurais préféré voir tout ça en deux fois et qu’en plus j’aurais plus aisément imaginé Wolf Eyes dans une salle beaucoup plus petite et confinée. Toutefois, le trio de Detroit, malgré un son déficient, s’est quand même particulièrement bien appliqué à faire fuir tout le monde au presque -ce fut la seule qualité de leur set et ça c’était spectaculaire.

Aucune information sur Deadsons, le groupe -un duo basse/batterie + voix et bandes- joue une sorte de drone metal entrecoupé de roulements de batterie sur fond de samples de voix (genre des chants grégoriens ou équivalents en boucle, un peu ce que faisait Current 93 à l’époque de l’album Dog Blood Rising) tandis que sur un écran le spectateur assiste aux tribulations d’un géant vert à béret, habillé comme un chasseur corrézien et déambulant dans la campagne avec une pelle tout en essayant de temps à autres de creuser des trous. Il ne se passe pas grand-chose sur la scène comme sur l’écran, le bassiste et le batteur s’en vont brutalement et laisse tourner bandes et film : happening ?
Café Flesh s’installe et, passée la (mauvaise) surprise concernant le fait qu’il n’y ait qu’un seul guitariste, le groupe démarre à bloc, joue quelques nouveaux morceaux -dont Hippie Suckers, un titre qui me ravit- qui passent très bien et devraient être enregistrés en 2008 pour une sortie au début de l’été prochain. L’absence de la deuxième guitare se fait toutefois ressentir, le son manque parfois un peu d’ampleur et le saxophone baryton n’est pas toujours très audible. Mais comme toujours avec Café Flesh c’est d’énergie dont il s’agit et la filiation de ce groupe charentais avec la scène noise US des années 90 n’est vraiment pas usurpée. Vivement la suite et avec deux guitares, puisque, information apprise après le concert, l’absence du deuxième guitariste ce soir n’était due qu’à un regrettable concours de circonstance.
Undata amène tout son bordel au milieu de la salle. Quand je dis bordel c’est à peu près ça : batterie et percussions bricolées, platine disque, laptop, tables de mixages, pédales d’effet, oscillateurs, claviers, etc. Undata joue une musique à cheval entre l’acousmatique et l’organique, l’improvisation et la composition -le but de ces trois jeunes gens est de donner un caractère résolument vivant et flexible à une musique qui ne l’est pas forcément. Lentes montées, explosions, interludes atmosphériques et final en forme de dialogue à trois sont les ingrédients d’un set agréable mais sans réelles surprises.























Entre deux groupes je vais jeter un coup d’oeil au stand de Wolf Eyes : ceux-ci sont connus pour leurs éditions ultra limitées de cassettes audio et de CDr vendus pour une bouchée de pain. En fait il n’y a pas grand-chose sur la table du groupe mais j’aperçois un disque gravé à la maison, boîtier peint à la bombe et scellé avec un vieux sparadrap tout dégueu. Dessus il est marqué qu’il y a cinquante exemplaires et que celui-ci est le numéro 66 -devant un tel foutage de gueule je décide aussitôt de l’acheter. Akimbo monte sur scène, c’est le retour du gang des gouffas et c’est toujours le batteur qui a la plus belle et la plus grosse. Le nouveau et dernier guitariste en date est moins démonstratif que sur l’album Navigating The Bronze, bien qu’il fasse des plans horripilants comme remonter les cordes avec son médiator pour faire couiner son instrument comme les hard rockers, les vrais de vrai. Le groupe confirme le côté seventies de sa musique, celui qui déplait tant sur son dernier disque et les titres s’enchaînent malgré tout avec efficacité. Les trois idiots ont bien l’air de se marrer, racontent deux ou trois blagues sur halloween que personne à par eux ne semble comprendre et, sitôt le dernier titre emballé, commencent à remettre guitare et basse dans leurs étuis respectifs. Les lumières ne se rallument pas, le public insiste alors le trio ressort ses instruments : le bassiste/chanteur balance quelque chose comme Sorry Wolf Eyes. Take a break, have a beer. You just deserve it, annonce une reprise et ce sera un titre d’un célébre groupe de Seattle (comme Akimbo) des années 90 avec un chanteur mort dedans. Les gens dans la salle exultent, reprennent les paroles en choeur et se consolent comme ils peuvent de n’avoir jamais vu Nirvana en vrai à l’époque. Les lumières se rallument enfin.

Les trois Wolf Eyes ne mettent pas longtemps à s’installer, ils ont nettement moins d’attirail qu’Undata mais j’espère qu’ils vont faire plus de bruit. Wolf Eyes en concert c’est à mi chemin entre Throbbing Gristle et Whitehouse sauf qu’il n’y a là aucune provocation, tout juste un peu de subversion sonore et beaucoup de parodie. Lorsque on a déjà vu Peter Sotos et William Bennett se haïr pendant tout un concert, le spectacle offert par Wolf Eyes laisse un arrière goût de facilité et presque de fadeur. Avec sa moustache, ses lunettes noires et son t-shirt qui moule son gras-gras, celui qui se tient sur la gauche de la scène pourrait parfaitement jouer dans Turbonegro. Il utilise une espèce de guitare toute rafistolée avec du scotch ou autre, plus exactement c’est une guitare où il ne reste plus que le manche et une seule corde. Il la dresse inexorablement au dessus du public afin de s’assurer que tout le monde se rende parfaitement compte qu’il pourrait bien s’agir là d’une grosse bite. Parfois il tripote un potard et génère un larsen strident ou bien il joue du saxophone alto sans que cela n’ait plus d’intérêt. Celui du milieu passe son temps à éructer dans un micro puis dans un autre et parfois dans les deux. Le troisième larron a de sérieux problèmes avec sa guitare et finira le dos tourné au public. Assurément, le son sera la grosse faiblesse de ce concert, jamais assez fort, aucun volume ni relief même si Wolf Eyes en réclame toujours plus -louder ! louder !. Vraiment dommage. Parce que j’avais quelques espoirs, malheureusement déçus, et préférer un groupe comme Wolf Eyes sur disque plutôt que sur scène me laisse une drôle d’impression, une impression inachevée.

mardi 30 octobre 2007

Ça va cogner

.
Je me rappelle d’une conversation d’après concert avec les quatre membres de Fly Pan Am dans les loges du Pezner -en fait de conversation, je crois que nous avions prévu une interview mais, comme tout cela était vraiment décousu, nous nous étions finalement contentés de parler en finissant les dernières bouteilles- et je me rappelle surtout de ce que disaient Jonathan, Roger, Jean Sébastien et Félix à propos de la chanson française. Eux, québécois, ne comprenaient pas le rejet que nous avions, nous autres français, de la variété issue de notre beau pays, nous reprochaient presque de n’aimer que certaines figures tutélaires (Gainsbourg et Bashung) pour des raisons esthétiques tenant plus de l’idéologie qu’autre chose et voyaient d’un mauvais oeil notre allégeance quasiment sans conditions aux formes musicales anglo-saxonnes -oui, Bästard c’est bien mais cela n’a rien de français. Jonathan (guitare et casquette) affirmait mettre les Bérurier Noir et Michel Berger dans le même panier, celui de ses goûts musicaux.
Fly Pan Am venait de donner un concert inoubliable -revisitant les titres de son premier et alors unique album dont une version de L’Espace Au Sol Est Redessiné Par D’Immenses Panneaux Bleus totalement funky et digne du meilleur post punk- un concert anti spectaculaire avec les deux guitaristes assis et le bassiste en chaussette mais un concert complètement captivant de feeling groovy. Plus tard le groupe se rebaptisera Le Fly Pan Am et incorporera ce groove dans ses nouveaux enregistrements, mais avec un succès plus mitigé. De même, l’adjonction de textes ne se fera pas sans problème. Le groupe s’est séparé en 2005 mais il reste le témoignage inoubliable de l’attitude des musiciens du label Constellation -un label de groupes à guitares mais résolument non rock’n’roll où la seule exception est peut être Hanged Up, un duo violon/batterie, donc précisément sans guitare mais indubitablement avec du rock’n’roll dedans.






















Jonathan Parant a depuis monté Feu Thérèse avec entre autres Alexandre St-Onge (également dans Et Sans, un groupe où on retrouve un autre ancien Fly Pan Am, Roger Tellier-Craig). Ce même Roger Tellier-Craig a lui fondé Pas Chic Chic. Ces deux groupes ont radicalement mis en application les idées combatives de leurs membres respectifs à propos de la chanson française : Pas Chic Chic me semble juste beaucoup plus sixties mais autant dadaïste que Feu Thérèse. Ce dernier, avec son nouvel album Ça Va Cogner réexplore des chemins davantage typés années quatre vingt -lorsque on est allergique aux synthétiseurs kitsch il vaut mieux éviter ce disque parce qu’ils y sont omniprésents- et il faut compter avec quelques particularités bien datées comme la basse slappée et le chant mortuaire de Visage Sous Nylon, par exemple. Le Bruit Du Pollen La Nuit ne vaudrait guère mieux avec la voix imitant parfaitement le phrasé agonisant et pathétique adopté par Gainsbourg à la fin de sa vie (la musique suit le même chemin, réussissant à être aussi ringarde et laide que celle de L’Homme A Tête De Choux). La Nuit Est Une Femme fait carrément penser à du William Sheller. C’est extrêmement déroutant, comme cette chorale d’enfants qui chantent en coeur ça va cogner, oh oui, ça va cogner sur le morceau titre après une longue introduction au synthé digne des meilleurs moments de Vangelis. Inutile de dire que ce gros loukoum lyophilisé respire l’attitude arty à plein nez, que le double langage y est roi, que l’hommage variétoche est réel mais que le second degré et l’ironie n’en sont pas exclus -il y a une réelle distorsion esthétique pesant sur Ça va cogner, comme du post modernisme qui se mord la queue et qui aime ça. Vraiment étrange.

lundi 29 octobre 2007

The For Carnation

.






















Je me rappelle m’être précipité sur les deux premiers disques de The For Carnation, le maxi Fight Songs (1995) et le mini album Marshmallows (1996), tous deux publiés par Matador. Tout ça parce qu’il s’agissait du nouveau groupe de Brian McMahan, la voix inoubliable de Slint. Autant dire que j’attendais un miracle -un nouveau Spiderland peut être- surtout que dans le groupe à la composition assez fluctuante il y avait également d’autres noms intéressants -David Pajo, Doug McCombs ou John Herndon. Autrement dit la fine fleur de ce que l’on a plus tard appelé le post rock, nom batard pour une toute petite mouvance née sur le chemin reliant Louisville dans le Kentucky à Chicago, Illinois. Inutile de dire que de miracle il n’y en a pas eu et pire que ça, même : j’ai complètement délaissé ces deux disques, malgré la tension palpable que j’éprouvais à l’écoute du magnifique Salo avec son signal électronique récurrent tel un sonar de l’invisible.

J’étais déçu et suis donc allé voir ailleurs. Jusqu’à ce que Touch And Go ne décide en 2007 de rééditer ces deux disques sur un seul et unique CD, Promised Works. Inutile de dire qu’il s’agit là d’une véritable aubaine, autant pour celles et ceux qui ont boudé le disque que pour tous les autres qui n’en avaient même pas eu vent. Quant à tous les amateurs éclairés qui depuis plus de dix ans gardaient ce secret trop bien gardé rien que pour eux et bien, dorénavant, il va falloir partager. Salo est vraiment le seul titre dont je me souvenais encore, avec ses lentes montées s’achevant sur du vide, il s’agit vraiment d’une chanson magnifique uniquement desservie par un final en queue de poisson. Mais il y a huit autres titres sur ce disque et ils méritent largement ce nouvel éclairage. Du folk mélancolique, du blues momifié, de lointains échos sans résonance, du froid au coin du feu -voilà le programme. L’ombre de Léonard Cohen derrière tout ça. Une certaine fragilité aussi, cette fragilité fébrile qui émeut plus que tout.

En 2000 The For Carnation a publié, déjà sur Touch And Go, un troisième disque sans titre que je n’ai jamais écouté. Par contre on peut (ré)entendre le titre au sonar mystérieux qui m’a suivi malgré toutes ces années.

dimanche 28 octobre 2007

Est ce que quelqu'un pourrait appuyer sur la barre espace de l'ordinateur ?

.
Je suis un bon père de famille : avant de me précipiter jusqu’au Grrrnd Zero pour assister à la release party donnée par Overmars à l’occasion de la parution de Born Again, je fais manger la marmaille, lis les histoire qui vont bien, tords le cou aux éventuels gros monstres planqués sous les lits et forcément je rate le premier groupe -Passion Armée, que je ne connais pas et que donc je ne connaîtrai toujours pas- et débarque au milieu de ce qui s’avèrera être la deuxième moitié du concert d’Impure Wilhelmina. Je vois sur scène des musiciens très appliqués -le bassiste joue sur une cinq cordes avec ses doigts, le batteur fait des trucs incroyables avec ses bras, je ne voudrais pas qu’il me donne une leçon de kung-fu- mais je n’entends pas l’un des guitaristes qui pourtant a l’air d’y mettre du sien et comme en changeant de place je ne l’entends toujours pas je laisse tomber pour me concentrer sur la musique de ce groupe que je ne connais que de loin. Je reste assez sceptique face à leurs envolées un peu lyriques et héroïques -ces derniers temps le metal a deux principaux défauts : dans le premier cas les groupes ont trop écouté Pink Floyd et rallongent la sauce avec des plans à mourir d’ennui et dans le second ils ont trop écouté Yes et ne peuvent pas s’empêcher de mettre des notes de partout, y compris là où il y en a déjà trop. Impure Wilhelmina fait partie de cette dernière catégorie et ce ne sont pas les passages avec voix claire et super émotionnante qui m’ont davantage convaincu.
Changement de plateau, et One Second Riot s’installe. Ils ne sont que deux, un bassiste/chanteur qui à un moment fera un peu de bruit avec un vieux synthé et un batteur vraiment spectaculaire (à mon avis, avec un jeu de bras pareil il pourrait sans problème casser la gueule de celui du groupe précédent) qui s’occupera également de déclencher les samples. La musique de One Second Riot est toute en tension, parfaitement en place et c’est un vrai plaisir de retrouver les titres de leur premier vinyle, celui avec Neptune, et ceux du petit dernier, le split avec Sofy Major. J’aime de plus en plus leur noise épurée et faussement basique. Après avoir fait d’indéniables progrès sur disque, voilà qu’ils font de même sur scène -il faut dire aussi qu’il y a du monde dans ce vieux théâtre et que cela semble les motiver, le public est facilement conquis.

















C’est au tour d’Overmars de le faire. Ils sont là, bien remontés, et attaquent directement par Born Again soit quarante minutes de pur cauchemar et de doom/metal/indus tripant. Malheureusement il y a quelques problèmes de son là aussi et la voix du chanteur ne passe pas au début, ce qui est fort regrettable car ce garçon a une présence scénique absolument terrifiante et un charisme incroyable. Mais la machine est lancée, les projections d’images aussi, la bassiste prend le relais sur le plan vocal, un troisième larron s’y mettra aussi (Born Again est une pièce à trois voix) et le groupe alterne passages ultra répétitifs et lourds mâtinés de stridences indus avec des moments plus atmosphériques mais tout aussi inquiétants et névrotiques. Les guitares cisaillent, la basse mène la danse, la batterie finalement assez sobre reste implacable et les zigouigouis électroniques font tout leur effet. Ces quarante minutes passent comme un éclair et Overmars joue un dernier titre -un vrai hit celui-là- plus compact et plus classiquement dans la lignée du son Overmars (l’album Affliction, Endocrine… Vertigo de 2005) qui donne une fois de plus l’occasion au chanteur de prouver qu’il est une vraie bête de scène et que ça ne rigole pas tous les jours. N’empêche qu’à la fin du concert je crois deviner les membres du groupe en train de sourire -contents d’être là, contents de l’avoir fait ? Je ne sais pas mais en réécoutant dès le lendemain Born Again sur disque je suis persuadé qu’Overmars a créé là une grande oeuvre.
C’est Binaire qui est chargé de conclure la soirée et ils le font avec humour, visiblement ravis malgré la fatigue : l’un des guitaristes d’Overmars est également une moitié de Binaire. Ils s’installent devant la scène à même le sol, les micros en T au milieu, demandent si quelqu’un ne pourrait pas déclencher les machines en appuyant sur la barre espace de l’ordinateur qui gère tout ça et c’est parti pour un festival de cyberpunk’n’roll jouissif et communicatif. Tous les principaux titres de Bête Noire y passent, il y a des plantages, parfois ça chante faux aussi mais qu’importe face à tant de plaisir évident et communicatif -décidément un groupe à voir absolument en concert. C’est ce que l’on appelle une très bonne soirée.

[L’illustration ci-dessus est la version complète de l’artwork de Born Again et est l’oeuvre d’Ivan Brun, plus de peintures et autres ici. Et pour finir, une page de publicité, parce qu'on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même.]

vendredi 26 octobre 2007

Release party !

.






















Release party : ce soir c’est le concert (gratuit) donné à l’occasion de la sortie de Born Again qui n’est pas la réédition du seul et unique album que Black Sabbath ait jamais enregistré avec Ian Gillan (en 1983) mais le nouveau disque d’Overmars, une longue pièce maîtresse de quelques quarante minutes.

Au programme des festivités :

Passion Armée
Impure Wilhelmina
One Second Riot
Binaire
et bien sûr Overmars

jeudi 25 octobre 2007

A Clockwork Sodom

.
Agoraphobic Nosebleed a tout de l’antithèse d’un groupe comme Kongh (par exemple) puisque le but de ces braves gens est de jouer le plus vite possible en un minimum de temps : le mini album (?) Altered States Of America (formidable jeu de mots et critique féroce à la fois) n’atteint pas les vingt deux minutes et ne comporte pas moins de 99 -oui, quatre vingt dix neuf- titres, ouch, gravés sur un minuscule CD de trois pouces. C’est vrai que pour ça ils trichent puisque pas mal de morceaux qui s’enchaînent ne pourraient au demeurant n’en constituer qu’un seul et puis surtout la batterie n’en est pas une mais une boite à rythmes, d’ailleurs si un jour un groupe arrive à atteindre le stade mythique du 666 bpm ce sera bien Agoraphobic Nosebleed et sa machine à beat, le groupe qui a sûrement inventé le grind core cybernétique et digital.
Le label hollandais Garden Of Exile, spécialisé dans le gros qui tache, a publié cette année un nouveau single d’Agoraphobic Nosebleed, A Cloclwork Sodom : un vinyle blanc qui ne comporte que quatre morceaux, le tout est proposé dans une pochette et avec un titre qui détournent Orange Mécanique de Kubrick -nos amis espèrent peut être une fois de plus jouer dans la démonstration de l’ultra violence musicale.












Pourtant le label a prévenu : attention les gars, c’est un nouveau visage d’Agoraphobic Nosebleed que vous allez entendre maintenant, avec des morceaux longs qui dépassent les deux minutes, des constructions alambiquées, du cérébral et du définitif, soit. Donc si je compte bien cela fait en tout huit minutes de musique puisqu’il y a quatre titres. Mais si j’en crois aussi ce que j’ai entendu la première fois que j’ai posé le disque sur la platine, Agoraphobic Nosebleed a plutôt viré laborieux, pataud, pâteux, bas du cul et tétraplégique, en clair je me suis emmerdé et même la boite à rythme avait l’air d’avoir été programmée par les mecs de New Order. J’espérais un peu en fait du Altered States Of America mais au lieu que cela soit découpé en trente six tranches de grind inoxydable je pensais découvrir du monobloc avec compartiments de rangement à l’intérieur pour tous les plans de guitare hallucinants que Scott Hull nous lâche habituellement.
La réponse est non, Agoraphobic Nosebleed a tapé dans l’agonisant pathétique et c’est en remettant le disque dans sa pochette -avec la ferme intention de ne pas le réécouter de sitôt- que je me suis rendu compte que le pathétique c’était bien moi : sur l’étiquette était imprimé 45 rpm et non pas, enfin bref, j’ai tout de suite remis ce disque à la bonne vitesse pour ne pas mourir idiot, quel aveu. Et alors ? Sans aller au delà des extrêmes auxquels Agoraphobic Nosebleed nous a déjà habitué, le groupe -qui montre tout de même un sacré effort dans la construction de ces quatre titres, pour un peu je jurerais qu’ils ont trop écouté de rock progressif ces derniers temps- ne lâche rien de sa violence coutumière, libératrice comme on dit (oui, c’est un cliché) et donc là c’est moi qui en redemande. Encore ? C’est presque chose faite puisque Agoraphobic Nosebleed a également un nouveau split en compagnie de Total Fucking Destruction (ça promet) et encore un autre avec Apartment 213 -il n’y a pas à dire, la boite à rythme, ça conserve.

mercredi 24 octobre 2007

Defenders Of The Hate

.






















Scott Hull, le guitariste monomaniaque responsable d’une bonne partie du chaos dispensé par Agoraphobic Nosebleed (puisqu’il a aussi en charge la programmation de la boite à rythme virtuose) est également guitariste de Pig Destroyer -avec cette capacité jamais démentie à trouver des noms de groupe ahurissants- groupe qui est le pendant humain d’Agoraphobic Nosebleed c'est-à-dire qu’il y a un vrai batteur qui tape sur une vraie batterie et ce à peine moins vite que la boite à rythmes susnommée. J’ai toujours autant de mal avec Phamtom Limb, le troisième album de Pig Destroyer, album qui montre déjà quelques faiblesses au niveau de l’inspiration, d’autant plus que la production est cafardeuse, bien trop polie et bien trop propre pour être honnête, les riffs de guitare n’étant en fait que des riffs basiquement thrash, au final quel manque flagrant d’originalité pour des gens qui se sont autoproclamés pornographers of sound.
Scott Hull a également été pendant une très courte période guitariste pour Anal Cunt, en 1995 pour être précis. Ce groupe emmené par le chanteur/hurleur Seth Putnam est progressivement passé du magma bruitiste à la Gerogerigegege a du grind core très violent, les borborygmes de monstres ont eux été remplacés par des paroles jouant à fond la provocation : tout l’arsenal de la puanteur y est convoqué, c’est pour rire nous disent ils, on se fout de la gueule des gens qui pensent réellement ce genre de choses mais il faut bien avouer que leurs blagues sur Hitler, les pédés, les camps de concentrations et les nègres font grincer bien des dents et sauter pas mal de plombages.
Je pensais que ce groupe avait cessé toute activité (peut être est ce bien le cas) mais je suis tombé par hasard sur un disque daté de 2007 et publié par le micro label Menace To Sobriety. Ce Defenders Of The Hate -admirons au passage la référence à Judas Priest mais c’est plutôt à la mode en moment, la preuve, qu’est ce qu’on attend pour introniser ce groupe de merde au Rock’n’roll Hall Of Fame car c’est bien tout ce qu’il mérite ?- est en fait une réédition d’un single de 2001 et augmenté de titres parus à droite et à gauche à la même époque.
Anal Cunt reste fidèle à lui-même sur ce disque. Le logo en forme de trou du cul et de chatte apparaît sous un aigle pour le moins germanique et les paroles sont toujours aussi dégradantes et stupides comme celles de Limp Bizkit Think They're Black, But They're Just Gay, on en profite un peu. Il y a des jours où cela me fait rire parce que je dois avoir mauvais fond et que je déteste Limp Bizkit au moins autant que Judas Priest.

mardi 23 octobre 2007

Bête Noire

.
A coup sûr, ce que je préfère chez Binaire c’est le dispositif scénique -que tout le monde connaît déjà et qui a largement contribué à établir la solide réputation du groupe- avec ce double micro qui forme un T et les deux guitaristes/chanteurs qui se font face.Ils se répondent, se postillonnent à la gueule, se font des sourires de bonheur mais surtout, surtout, cette confrontation permet d’instaurer un vrai dialogue de guitares, elles s’interpellent, elles correspondent, se font la courte échelle et s’interposent, s’intercalent, se démultiplient -ça y est je délire. Un concert de Binaire c’est de l’énergie et de la surenchère, pas la peine d’aller voir une combat de catch féminin dans une mare de Nutella, le duo (basé à Marseille) fait exactement la même chose mais en mieux. Il y a la boite à rythmes aussi, ou plutôt les machines puisque la basse est synthétique ou je ne sais quoi et il y a toujours des samples qui bourgeonnent ici ou là sans que cela soit le propos principal de la musique, ouf.























Un sample c’est exactement ce qui marque l’ouverture de Casque A Pointe, le premier titre de Bête Noire, nouvel et deuxième album de Binaire. Un sample désagréable reprenant le gimmick sonore d’un célèbre concepteur mondial de logiciels informatiques à fortes tendances monopolistiques -un manière de mettre en exergue ce que l’on déteste le plus et ce qui nous révulse, bien. Il y a mine de rien chez Binaire une manière simple et directe pour dire et pour faire, que ce disque soit une autoproduction, qu’il soit disponible en album vinyle (bleu) avec CD bonus pour le même prix (ridicule) ou qu’il soit tout simplement téléchargeable en intégralité et gratuitement sur le site du groupe n’a vraiment rien d’étonnant. En ces temps où l’on tente de nous faire croire que consommer est un droit fondamental -alors qu’il ne s’agit que d’une addiction- ce genre de positionnement fait vraiment du bien.
Après, il ne reste plus qu’à l’écouter cet album, attentivement, dans le salon, avec les gosses qui piaillent et une bonne fatigue dégueulasse qui ferait dire qu’on est déjà vendredi alors que, non, ce n’est que le début de la semaine. La première chose c’est qu’un disque de Binaire ne pourra peut être jamais retranscrire totalement l’énergie de leurs concerts. La deuxième chose c’est que toute fatigue (même celle-là) s’efface à l’écoute d’un tel disque, toute appréhension aussi. Binaire c’est du basique intelligent, du simple bien travaillé et fouillé, du punk artisanal qui fleure bon l’enthousiasme, du noise rock qui rafraîchit, du braillage qui dégage le nez et rafraîchit les bronches -le genre de disque que j’ai envie de mettre entre mes oreilles dès que j’ai un instant à perdre, un moment d’attente à remplir. Voilà. Encore une critique hautement constructive et encore un groupe que je vais me faire une joie d’aller voir vendredi prochain au Grrrnd Zero puisque Overmars l’a invité à sa release party. En attendant de revoir le duo une deuxième fois au Sonic dès le 15 novembre avec les furieux d’Unlogistic -un concert de groupes à boite à rythmes, ça c’est un sacré concept.

lundi 22 octobre 2007

One Second Riot

.

Il y a toujours une certaine appréhension avec les split singles ou les split albums : dans la plupart des cas y figurent un groupe déjà apprécié et un autre parfaitement inconnu ou presque. C’est l’aspect découverte de la chose mais cela peut être son côté déception, aussi. En ce qui concerne ce 25 cm, je dois bien avouer que j’ai été tenté à cause de One Second Riot dont le premier disque -déjà un split, mais avec Neptune cette fois- m’avait séduit alors que je n’ai jamais entendu parler du groupe figurant sur la première face, Sofy Major, bien qu’apparemment ils aient joué bien plus d’une paire de fois dans cette ville. Il me semble également que ce groupe de Clermont Ferrand est principalement responsable de la parution de ce split autoproduit, autrement dit c’est eux qui l’ont fait, merci.
Autant dire tout de suite que les trois titres de la face A, ceux de Sofy Major, ne m’ont pas emballé plus que ça, malgré une bonne attaque du premier (Mange Tes Morts) avec cette guitare qui semble partir de travers tandis que la rythmique bastonne. C’est que j’en ai un peu marre du hard core/noise et que celui de Sofy Major, qui me semble contenir tous les ingrédients adéquats et en bonne et due forme, me lasse par un trop gros manque d’effet de surprise. Cette musique n’est tout simplement pas dans mes goûts même si je me doute que cela peut le faire en concert : à voir, donc ?























Avec la face B et les trois titres de One Second Riot c’est une toute autre histoire. Die Elektrish Leben Maschine est un excellent morceau de noise nerveuse et racée, servie par une basse bien tendue, une batterie qui construit un rythme alambiqué mais prenant, la voix un peu perdue dans le lointain.
Le final plus lent et avec samples rappelle ce qu’a déjà proposé One Second Riot, mais c’est leur marque de fabrique alors ils en ont bien le droit. Dead Like You est mon titre préféré de ce disque avec ses ambiances industrielles, le cliquetis métallique et les nappes bruitistes mais pas trop pesantes -dommage que ce titre soit si court car il est la preuve irréfutable que One Second Riot est vraiment capable de grandes choses. Into A Stranger renoue avec ce mélange assez détonnant de simplicité directe et de complexité apparente -tout ceci a l’air très pensé mais continue de carburer à l’énergie- qui me fait tant apprécier ce groupe dont je trouve au passage qu’il a bien progressé depuis son premier disque.

[Et ça tombe bien : One Second Riot jouera au Grrrnd Zero le 26 octobre prochain à l'occasion de la release party du Born Again d'Overmars.]

samedi 20 octobre 2007

Monarch!, Abronzius et affichage libre (la suite...)

.
Le concert de cette semaine, du moins celui jusqu’auquel j’ai réussi à me traîner, avait pour affiche Abronzius et Monarch!. La seule et unique raison pour laquelle j’ai fait le déplacement vendredi soir était pour le groupe de Bayonne : Monarch! est capable de remplir un double CD avec seulement trois titres, a des disques sur des labels aussi bons que prestigieux (Throne, Crucial Blast, Rise Above…) et utilise des visuels enfantins qui épaississent un mystère bien entretenu. C’est aussi l’un des groupes actuels les plus lents et les plus lourds que je connaisse -du moins sur disque et justement j’étais assez curieux de voir et d’entendre comment ces quatre jeunes gens s’en sortaient en concert, in vivo veritas.
Comme d’habitude, lorsque j’arrive à la salle, les Monarch! eux ne sont pas encore arrivés, je comprends qu’ils tournent depuis une heure en ville et qu’ils se sont perdus -la malédiction continue. Ils débarquent bientôt en même temps que quelques caisses de disques, une distro indépendante va tenir un stand pendant le concert avec des disques (vinyle ou CD) au prix moyen de cinq euros -il n’y a pas que les gens pauvres qui téléchargent leur musique sur internet.
Le premier groupe est un duo -composé de Marion d’Overmars et de Tiphaine d’Overmars lui aussi et ex Sun God Motel- électro/bidouille très dark et finalement assez goth. Ils utilisent quelques vieux synthés (dont un magnifique Moog fraîchement et finement restauré), un peu de matériel plus contemporain (pour les rythmes, assez rares et les samples) et il y a également des voix, saturées, noyées sous une tonne d’effets, braillées. Cela me fait penser à beaucoup de (vieilles) choses à la fois mais à rien de précis non plus, ce qui veut dire qu’il y a une réelle volonté d’originalité, du dépoussiérage de vieux poncifs eighties, de l’implication et du rentre dedans mais je reste à l’extérieur, de moins en moins attentif et démotivé par un son qui n’arrive pas à s’extraire de la brouillasse et dans lequel j’ai du mal à discerner les différents éléments -je regrette surtout qu’il n’y ait pas plus de basses qui me donnent des fourmis dans les pieds avant de remonter le long du dos.






















Des basses je vais en avoir avec Monarch!. Entre les deux groupes la sono ne diffuse que des vieilleries (le premier album de Davy Jones Locker par exemple), puis c’est au tour du Slam King de Zeni Geva (sur l’album Maximum Money Monster) et des Swans avec Body To Body/Job To Job -je me demande si c’est fait exprès, peut être histoire de mettre avec humour un peu la pression sur Monarch! mais en tous les cas je constate qu’il faut toujours que j’aille à un concert pour pouvoir réécouter des vieux disques.
Les quatre de Bayonne installent leur matériel, deux tonnes d’amplis de chaque côté sur le devant de la scène, le batteur au fond, guitariste et bassiste jouant à même le sol devant la scène tout comme la chanteuse. Même en étant au troisième rang je n’arrive pas à tout voir en même temps, c’est que ces jeunes gens sont encore plus petits que moi et que quelques têtes devant me donnent de récurrentes envies de tronçonneuse -mais avec les habituels mouvements de concert tout s’arrangera rapidement. Les Monarch! font un live check, commence un titre puis s’arrêtent, reprennent, etc et cela semble durer une éternité. La salle est déjà plongée dans le noir et le public est massé devant la scène. J’ai cette impression qu’ils vont finir par se barrer, que c’est une blague. Le début du concert est très lent, plein de fréquences résonnantes, du drone de guitare et de basse pimenté par quelques larsens assassins qui vrillent les oreilles, Monarch! instaure une sorte de liturgie très dense pleine de gestuelle. Lorsque cela semble s’accélérer un peu et que le batteur se met en action, la musique du groupe se mue en une force libératrice et explosive, atteignant un pallier dont elle ne bougera plus -c’est un peu la limite de ce groupe qui, une fois passée la montée en puissance du début, n’arrive pas à passer à un stade encore supérieur mais je sais m’en contenter et apprécie cette fin de concert univoque et solidifiée avant un arrêt brutal du son. Il n’y a pas de rappel.

Quelques nouvelles concernant l'affichage libre à Lyon : les personnes gérant le Sonic ont reçu une convocation du tribunal de justice pour le 20 décembre. L’audience concernera une plainte déposée par la mairie de Lyon à propos de trois affiches collées en avril 2007. L’amende maximum encourue est de 500 euros par affiche. D’autres plaintes seraient en cours, pour beaucoup plus d’affiches, collées après avril 2007. Si le Sonic est condamné à tout payer il sera purement et simplement contraint de fermer ses portes et de déposer son bilan. Ainsi disparaîtra l’un des rares lieux lyonnais où on peut diffuser et entendre de la musique qui sort des sentiers battus. La mairie de Lyon -en se contentant du strict minimum légal prévu par la loi française au sujet de l’affichage libre (mise à disposition de panneaux…)- continue sa politique de nivellement culturel par le bas et de consommation de produits de masse à rayonnement de pacotille. Il est de plus en plus difficile de faire entendre sa voix dans une ville (un pays ?) où l’uniformisation culturelle rejoint les préoccupations sécuritaires et populistes. Au mois de mars auront lieu les élections municipales : est ce que la mairie de Lyon va également porter plainte contre les militants socialistes qui colleront sur tous les murs de la ville des portraits géants de Gérard Collomb alors candidat à sa réélection ? Ville propre, sombre époque.

vendredi 19 octobre 2007

Coalesce vs Burnt By The Sun

.
On commence avec la news que tout le monde connaît déjà à propos de la reformation de Led Zeppelin : ce sera le 26 novembre prochain pour un concert en hommage à Ahmet Ertegun (fondateur et ancien président d’Atlantic records) qui pour la petite histoire est mort à l’âge de 83 ans suite à un long coma survenu après une chute alors qu’il assistait à un concert des Rolling Stones, j’ai toujours adoré cette histoire. On ne connaît pas encore la liste des autres groupes ou chanteurs qui participeront à ce formidable évènement qui sera, j’en suis sur, l’occasion d’un rare moment d’émotion destiné à être immortalisé pour un prochain DVD de noël -plus les gens meurent et plus ils peuvent rapporter du fric, fin de cette parenthèse nécrophile.

Parenthèse qui n’est pas sans rapport avec la suite puisqu’il s’agit de la parution d’un petit 45 tours de Coalesce -un single qui je le dis tout de suite réconciliera immédiatement le plus grincheux des amateurs de hard core/metal avec le groupe, même après la réédition catastrophique de There Is Nothing New Under The Sun, un album que Coalesce a consacré à des reprises de Led Zeppelin (on y revient). Comme le grand dirigeable les quatre américains se sont eux aussi reformés mais j’arrêterai là l’analogie, un peu restrictive et injuste je l’avoue. Coalesce en est donc à sa énième reformation, en a profité pour faire fabriquer des nouveaux t-shirts cool as fuck, un nouveau DVD et un single comportant deux titres : Son Of Son Of Man et I Am This. L’objet est magnifique dans sa petite pochette gatefold en carton épais imprimé en blanc et noir, le vinyle est transparent avec des traces de molards de couleur dessus (sur mon exemplaire ils sont noirs et bleus : qu’avait donc bouffé le chanteur/hurleur Sean Ingram ce jour là ?) et le pressage est plus que correct, bon son à vrai dire. Le tout s’appelle Salt And passage, et oui il s’agit d’un single qui a un titre. La face A ravira tous les fans purs et durs de Coalesce, sur Son Of Son Of Man on assiste en effet à une démonstration en bonne et due forme de la puissance complexe et du talent dévastateur du groupe. La face B (I Am This) est plus rapide et nerveuse, c’est le côté je te rentre dans le lard avec ma planche de skateboard de Coalesce (sauf que j’imagine mal ces gars là en train de faire du skate, si ?) et donc ça fait vraiment mal, y compris pendant ce solo constipé de guitare chiasseuse -non, ce n’est pas paradoxal- qui met tout le monde d’accord avec ses deux notes.


Lorsqu’on l’écoute dans la foulée, le nouveau single de Burnt By The Sun parait bien fade question son. Pourtant les gens du label Relapse, responsable de la parution de cet objet, s’enorgueillissent du fait qu’il s’agisse là du premier enregistrement du groupe depuis près de quatre années, ils auraient par conséquent pu dépenser un peu plus de fric pour la qualité du pressage. Quatre ans, donc, depuis la parution, toujours chez Relapse, du monumental The Perfect Is The Enemy Of Good : alors c’est enfin la fin de la retraite ? Les petites blagues mises en place sur le site officiel du groupe pourraient bien faire penser le contraire. Donc je ne sais pas. En attendant j’ai toujours trouvé que ce groupe était le pendant de Coalesce malgré le fait que si ces derniers défendent le côté hard core du metal, Burnt By The Sun eux sont plus axés sur le grind. Sauf qu’ils pratiquent un grind assez particulier, ralenti mais très dense, intransigeant et monobloc. Des termes qui iraient également très bien à la musique de Coalesce. A l’écoute de cette face A et de son titre Goliath il apparaît que Dave Witte -collaborateur régulier de James Plotkin au sein d’Atomsmasher, batteur de remplacement pour Melt Banana…- est toujours en aussi grande forme. Une bonne partie de l’originalité de Burnt By The Sun lui incombe d’ailleurs totalement.
Le problème de ce single est qu’il s’agit d’un split et que lorsqu’on le retourne pour écouter la face B il ne s’agit plus de Burnt By The Sun mais de Car Bomb, un groupe de grind core classiquement pénible comme il en existe de trop nombreux exemplaires sur Relapse, tous sur le même modèle. J’espère donc simplement qu’il ne faudra pas attendre à nouveau quatre années pour pouvoir écouter un nouveau malheureux et unique titre de Burnt By The Sun et que le groupe, bien remis de ses changements de line-up, proposera dans un avenir un peu plus proche autre chose à se mettre sous la dent.

jeudi 18 octobre 2007

Maninkari

.
Maninkari : une nouvelle formation composée de deux frères -ils jouaient auparavant dans un groupe du nom de Bathyscaphe (jamais écouté)- et un premier EP publié par Conspiracy records, on a déjà fait pire. Tout ça en attendant l’album, Le Diable Avec Ses Chevaux, prévu pour le 21 novembre toujours sur le même label. Soit une première fusée éclairante lancée dans le ciel pour illuminer le paysage alentours et donner quelques indications sur les intentions du duo, deux titres plutôt longs au programme (Psychoïde et Participation Mystic) et là soudain je me sens terriblement dans l’embarras, comment dire, qu’est ce que c’est que ça ? A priori (mais les a priori ce n’est pas mon genre, hein) Maninkari accumule tous les défauts qui vont me faire hurler de dégoût. J’ai toujours beaucoup de mal avec les polyrythmies tribalo-ethniques, la world musique mystique -tout ce qu’ont pu pondre les affreux Dead Can Dance une fois leurs débuts vaguement goth oubliés et après leurs vaines tentatives de pop médiévale- et l’usage de vieux instruments percussifs à cordes -le cymbalum originaire de l’Europe de l’Est comme son frère le santoor indien- ne m’inspire que méfiance. N’est pas Harry Partch qui veut.




















Ces deux titres sont indéniablement de toute beauté. Ils arrivent à conjuguer à la perfection bizarrerie musicale (aussi étrange qu’étrangère), répétitivité, violon fulgurant et tribalisme (mais sans le côté ethnographique du terme). Un peu comme si Tuxedomoon se mettait à faire des reprises de Zoviet France. Ou si Tony Conrad avait enregistré Outside The Dream Syndicate avec Harry Partch (décidément) et Arnold Dreyblatt plutôt que Faust comme backing band. Oui, je sais que j’y vais un peu fort dans les comparaisons, surtout en ce qui concerne Tony Conrad, alors parlons d’un résultat imagé et voyageur comme certains enregistrements de Narcophony ont pu l’être. Avec ses rythmes incompréhensibles et sa montée irrémédiable Psychoïde est le plus direct des deux titres et donne tout de suite le frisson, de plus le final est particulièrement inquiétant. Participation Mystic est plus latent et aérien (et plus long aussi, presque seize minutes) mais s’impose d’emblée, serpentant inlassablement et se retournant sans cesse sur lui-même tout en prenant de l’ampleur, une sorte de psalmodie répétitive principalement à base d’instruments à cordes et de percussions inhabituelles.
Pour finir, quarante deux minutes c’est pas mal comme longueur pour un EP même si celle-ci est malheureusement atteinte grâce à l’adjonction de deux remix. Le premier est signé Robin Rimbaud (aka Scanner et également guitariste au sein du très dispensable Githead aux côtés de Malka Spiegel et Colin Newman). Le garçon nous a emballé tout ça avec des violonades supplémentaires, cela devient vite indigeste et grandiloquent -Robin Rimbaud est aussi designer sonore (mais qu’est ce que cela veut dire ?) et depuis qu’il a prêté ses services pour une comédie musicale adapté d’un célèbre dessin animé, je trouve qu’il file un mauvais cotton. Le second remix est signé Justin Broadrick/Jesu qui lui a opté pour l’ajout d’un beat lysergique et de basses groovy. Il n’y a pas de révélation dans cette formule éculée mais personnellement j’apprécie assez ces transformations en musique pour drogués.

mercredi 17 octobre 2007

Jesu revient

.

Mais qu’est il donc arrivé à Justin Broadrick ? C’est la question que se posent beaucoup de fans perplexes de Godflesh -qu’ils aiment ou qu’ils détestent les dernières orientations musicales prises par l’anglais avec son projet Jesu. En publiant une compilation de titres inédits et écartés, pour des raisons que lui seul connaît, des précédentes parutions officielles de son groupe, Broadrick tente un début d’explication. Tout au moins donne t-il du grain à moudre à toutes celles et ceux qui n’ont que ça à faire, youpi. Intitulé Pale Sketches, ce CD (dispo en double vinyle à partir de janvier 2008) regroupe des pièces enregistrées entre 2000 et 2007, donc certaines sont contemporaines de la fin de Godflesh (puisque le précédent groupe de Broadrick a débandé en 2002) et on comprend bien en constatant le gouffre qui séparent ces deux formations à quel point Broadrick devait être arrivé au bout d’une certaine logique et qu’il devait en avoir plus qu’assez.
En bon faux-cul que je suis je me situe pile-poil à mi chemin entre déception et intérêt pour cette curieuse renaissance : si Jesu ne fait pas toujours des miracles, il n’y a pas non plus de quoi convoquer les sept cercles de l’enfer et d’hurler à la trahison (et de toutes façons hurler sur de la musique c’est beaucoup utile en concert). En 1992 Godflesh avait publié ce qui est peut être son meilleur album de tous les temps, Pure. Le titre était à prendre dans le sens de total, intégral -rien à voir avec une quelconque idée de pureté au sens angélique du terme. Si Pure était un monstre de metal industriel, Pale Sketches le bien nommé est un écrin gazeux pour une musique diaphane : cette fois ci c’est donc bien au tour des anges de la ramener même si je ne peux que penser que Pale Sketches commence mal. Le premier titre Don’t Dream It attaque curieusement avec des voix très en avant, si j’étais méchant et si j’avais le sens de l’exagération, je parlerais d’une abominable chanson de Coldplay (pléonasme) passée au ralenti. L’arrivée d’une couche de guitare arrange un peu le tout. On retrouve ces caractéristiques énervantes et dignes d’un groupe stadier (mélodies putassièrement accrocheuses) tout au long des quarante six minutes que dure le disque. La réalisation est majoritairement électronique, il manque toutes les surcouches que Broadrick ajoute d’ordinaire à ses enregistrements studio, et on est bien forcé de constater que sans tous ses effets multiplicateurs la musique de Jesu a encore plus de mal à rester séduisante. Je reconnais là dedans quelques caractéristiques piochées chez des musiciens publiant leurs disques sur des labels tels que Hymen ou Ad Noiseam et même M-Tronic (côté atmosphérique : Larvae, Dither, Lusine icl…) donc je peux aussi y retrouver mon compte mais ce n’est pas non plus ce que j’en attendais.






















Comme Justin Broadrick est du genre prolifique, il n’arrête pas -en plus de ses albums- de publier toute une flopée de maxis dont le dernier en date (pour l’instant) est un quatre titre, Life Line. Dessus il y a cette fameuse collaboration avec Jarboe qui aurait du figurer sur le précédent album puis a finalement été écartée car ne possédant pas la tonalité générale requise pour Conqueror. En effet. Je n’ai jamais été un admirateur de la dame, je dois même dire que ses interventions vocales étaient le moment de torture des concerts des Swans. Son chant s’est toutefois grandement amélioré depuis l’époque de Greed/Holy Money et Children Of God et sur ce Storm Comin’ On plutôt folk et asséché elle ne réveille pas l’inquisiteur qui sommeille en moi : pour une fois je ne jetterai pas cette vieille sorcière au feu. Les trois autres titres sont plus que jamais teintés par les habituelles influences heavenly et shoegaze mais il y a certainement beaucoup plus de Cocteau Twins que de Ride dans la musique de Jesu et tout le monde sait le rôle primordial qu’a joué Robin Guthrie dans le parcours musical de Broadrick. Mon ambivalence décrite un peu plus haut se réveille gentiment à l’écoute de ce Life Line -en fait j’ai toujours cette impression que Justin Broadrick pourrait faire beaucoup mieux s’il était un peu moins obsédé par le côté sophistiqué de ses créations, Jesu est un pur groupe de studio mais sa musique n’est pas assez abstraite à mon goût pour acquérir complètement la dimension irréelle nécessaire à ce genre de projet. Le pire c’est que plusieurs personnes m’ont déjà raconté que le dispositif du concert ne va pas non plus à Jesu... Alors ?

[Pale Sketches est limité à 2000 exemplaires et est disponible uniquement sur le site internet de Broadrick, Avalanche. Life Line est à nouveau une production Hydra Head.]

mardi 16 octobre 2007

Triste soirée

.
Si je finis par me décider à aller au concert des Creeping Nobodies c’est parce SoCRaTeS doit en faire la première partie : j’imagine aisément que la soirée va être parfaite, un groupe à découvrir et un autre que j’apprécie particulièrement. En plus les différents échos des prestations précédentes des Creeping Nobodies sont tellement contradictoires que cela me donne encore plus envie -la Bretagne contre le reste du monde, qui c’est qui va gagner ?
Je n’arrive pas particulièrement en avance et comme d’habitude le groupe arrive en même temps que moi ou presque -c’est comme une espèce de malédiction, il ne faut chercher aucune explication rationnelle à cela. J’aperçois le guitariste de SoCRaTeS qui raconte des blagues aux Creeping Nobodies tout en les aidant à décharger leur camion. La veille ils étaient à Bordeaux, une sacrée trotte quand même pour un pauvre petit français comme moi, mais pour des canadiens cela semble ridicule et ils ont le sourire. La première mauvaise nouvelle c’est quand l’organisateur du concert vient me voir pour m’annoncer que SoCRaTeS ne jouera pas ce soir. La chanteuse est là, le guitariste est là aussi mais pas le batteur. Et merde. La salle se remplit petit à petit, c’est dimanche soir et le dimanche soir à Lyon c’est le cauchemar. Finalement le nombre d’entrée dépassera la soixantaine, un joli score. Quelques vieilles connaissances arrivent et avec cette affluence, euh, record je continue à me persuader que la soirée va quand même être parfaite, malgré la désaffection du groupe de première partie.
La première partie, justement : le guitariste lâché par son batteur monte sur scène, s’excuse et explique le comment du pourquoi du bordel. Il annonce qu’à la place il va jouer tout seul, avec du matériel emprunté au groupe d’après (merci) et que ce projet s’appelle Sheik Anorak. Projet que j’ai déjà vu au moins une fois et dont le principe est le suivant : manipulations d’une guitare, mise en boucles, empilements, rajout de la batterie et on recommence. En général le résultat me plait bien et ce soir c’est encore le cas.
Ça rigole et ça plaisante pendant le changement de plateau (minime), j’apprends que notre multi instrumentiste de Sheik Anorak (qui en plus de SoCRaTeS joue également dans Kandinsky) a un nouveau projet qui promet nommé Hallux Valgus (en français, les oignons qui font mal sur les pieds qui puent) avec un petit gars de Nancy. J’espère en reparler un jour. C’est l’occasion aussi de se faire confirmer que le festival Riddim Collision est relocalisé à la dernière minute dans différentes salles de l’agglomération suite à une décision assez incompréhensible de la part de la municipalité gérant le terrain initialement prévu pour le chapiteau, par exemple la soirée du 31 octobre avec Strings Of Consciousness et Double Nelson se déroulera à l’Epicerie Moderne de Feyzin. On peut dire qu’après les démêlés qui opposent Jarring Effects à Pias (le leader français du capitalisme indie) c’est vraiment un très sale temps pour le label lyonnais.

Les canadiens débarquent, il y a deux filles et trois garçons et cela commence plutôt pas mal, avec un titre assez calme immédiatement suivi d’un autre plus nerveux qui permet au groupe de s’attirer quelques applaudissements enthousiastes. Mais cela ne dure pas très longtemps. Je ne sais pas pourquoi mais tout retombe rapidement, le dynamisme du groupe s’affaisse et le public ramollit (ou l’inverse ?), bientôt les rares applaudissements ne sont plus que pure politesse. Le chanteur malgré des efforts marqués (oui, le coup de la casserole) a un charisme de moule marinière et lorsque il a la mauvaise idée d’abandonner le chant à l’une des deux filles c’est une vraie catastrophe. Le groupe semble rester à la surface de sa musique, je regrette de ne pas assez entendre la deuxième guitare et j’abandonne la partie. Un bref rappel, deux titres bien enlevés qui me font dire que si les Creeping Nobodies avaient joué tout le temps comme ça, ce concert aurait pu être bien différent. Dans la conversation une remarque fuse parmi tant d’autres -moi, j’ai bien aimé le morceau qui faisait The Ex et la reprise de The Fall (tiens, je l’ai ratée celle-là…)- d’accord, mais à quoi bon aller voir un groupe qui joue à la manière de et n’arrive pas à s’affranchir de ça ? Voilà, c’est la Bretagne qui a perdu contre les parisiens mais il n’empêche : moi aussi j’ai cru entendre têtes de chiens.

dimanche 14 octobre 2007

The Creeping Nobodies + SoCRaTeS

.





















C’est ce soir. Pour écouter cela se passe ici et .

samedi 13 octobre 2007

Vinyl only

.
Encore du O’Malley -je jure (promis craché) que je ne parlerai plus de lui jusqu’à la fin de l’année- et cette fois ci il s’agit de Sunn avec un mini LP, Oracle, sur Southern Lord. Celui-ci a été enregistré pour une installation du sculpteur/plasticien new-yorkais Banks Violette reproduisant l’intégralité du backline de Sunn -les amplis, les instruments et tout- en résine et autres matériaux. L’idée était de présenter ces reproductions tout en faisant jouer le groupe dans une pièce attenante, invisible du public. Formidable.
Il y a deux titres sur ce disque -trois pour la version en vinyle transparent puisque celle-ci est accompagnée d’un CD complémentaire (?)- qui disons le tout de suite n’apporte rien de nouveau à la musique du groupe. Stephen O’Malley et Greg Anderson ont atteint leur vitesse de croisière, leurs invités sont toujours les mêmes (ici Attila Csihar, Joe Preston et Atsuo du groupe Boris), Belülrol Pusztit et Orakulum s’écoutent sans sourciller, comme une vieille paire de charentaises qui puent mais très confortables et que l’on retrouve amoureusement après une dure journée de travail. Seule (grande) nouveauté : sur Belülrol Pusztit Joe Preston joue du marteau-piqueur et pour s’extasier d’une telle prouesse innovante il faut être né après 1991 ou alors n’avoir jamais entendu parler de Faust et d’Einsturzende Neubauten. La plus grosse critique est le chant désormais systématique sur les titres de Sunn Auparavant la présence des voix n’était en effet que parcellaire et exceptionnelle, je regrette les longs instrumentaux gavés d’infra basses et de résonances bourdonnantes des débuts.























Beaucoup plus intéressant est le vinyle de KTL intitulé comme il se doit 3 (après 1 et 2 je n’en attendais pas moins). KTL c’est toujours la réunion de O’Malley et de Peter Rehberg et ce nouvel épisode de leurs aventures est toujours tiré du même spectacle de Gisèle Vienne et Dennis Cooper -j’ai l’air comme ça mais je ne sais pas du tout qui sont ces gens- intitulé Kindertotenlieder. C’est Or, une succursale de Touch, qui s’est chargé de cette parution à 2000 exemplaire avec une seule face de gravée, l’autre comporte un très beau dessin assez énigmatique dont je ne saurais dire s’il s’agit d’un dragon atteint d’un cancer du gros colon ou de tout autre chose (sûrement autre chose en fait).
Là non plus il n’y a pas grand-chose de nouveau par rapport aux disques précédents mais ces deux titres et surtout le second, Sunday, atteignent sans difficulté les sommets découverts lors du deuxième album. C’est vrai qu’il ne se passe pas grand-chose, l’auditeur est comme transbahuté, traversant un orage magnétique dont on ne sait jamais si le plus gros est passé ou à venir. Mais cela reste d’une force d’évocation sans pareil, très loin du recyclage des gimmicks industriels (marteau-piqueur) et metal sombre (voix de moines tibétains sous champignons) abusément utilisés par Sunn sur Oracle.

vendredi 12 octobre 2007

Hyperactivité

.






















Ce serait certainement une erreur de croire que depuis le split avéré de Khanate Stephen O’Malley a tout le temps devant lui pour aller cueillir des champignons (même hallucinogènes) et recoudre les petits accrocs de la robe de moine satanique qui lui tient lieu de costume de scène -il appelle ça une grimm robe, hum. Il a déjà annoncé qu’avec son petit camarade Greg Anderson ils avaient commencé à bosser dur sur le nouvel album de Sunn O))), date prévisionnelle de sortie pour le début de l’année 2008.
En attendant Stephen O’Malley collabore de ci de là, publie à droite et à gauche, fait du design de pochettes de disques (il est plutôt bon) et s’occupe de son petit label. C’est justement sur celui-ci qu’a été publié Magistral, une collaboration entre notre barbu encapuchonné et Z'ev, un vieux hippy basé à San Francisco reconverti dès la fin des années 70 dans les percussions en tous genres, notamment métalliques. La base de ce disque est une prise de huit minutes et quelques de la guitare de Stephen O’Malley ainsi que divers enregistrements de percussions effectués par Z’ev entre 1982 et 1990. Autrement dit ce disque est un travail sur la matière sonore, une opération de mixage et de sculpture, un processus d’échantillonage et de reconstruction.
Cela fait un tout petit peu de bruit mais pas trop, le côté abrasif des percussions de Z’ev et le drone de la guitare de O’Malley ayant été consciencieusement atomisés puis refondus : c’est un magma bruitiste et vaguement pulsatif qui se révèle, parfois des nappes grésillantes s’interposent, à d’autres moment une fréquence continue traverse l’espace, c’est à peine si on entend réellement les instruments mis à part un peu de guitare au début du premier titre et des percussions sur le troisième ainsi que sur le dernier avec à nouveau de la guitare -d’ailleurs ce dernier titre ressemblerait presque à la base brute qu’ont dû se donner les deux musiciens avant de réellement commencer leur travail de sape. Le résultat est inquiétant, comme la rumeur nocturne d’une ville où l’on n’aime pas habiter, comme le fracas d’un pont ferroviaire dont l’écho nous parvient grâce au vent. Ce disque est infiniment plus passionnant que celui publié par Z’ev en 2002 chez Tzadik (The Sapphire Nature) mais n’atteint toutefois pas le degré de bourdonnement poétique de Number One, un disque du percussionniste accompagné de KK. Null et de Chris Watson datant de 2005 et qui est l’une des plus belles et récentes réussites que je connaisse en matière de travail sur les sons : pré enregistrements, sources électroniquement manipulées et paysages sonores collectés en Afrique de l’est par Watson (ancien Cabaret Voltaire et ex Hafler Trio) se chevauchent et font fusionner chaleur et noirceur, harcèlement des sens et mégalithes de solitude. Mais je ne vais pas chipoter parce que Magistral est presque tout autant passionnant. Juste peut être un peu plus apprêté.

jeudi 11 octobre 2007

Politique d'austérité

.






















Je ne donnais pas cher de la peau d’Austerity Program. Un premier EP il y a quatre ans, Terra Nova, qui ne m’avait pas laissé un souvenir impérissable et qui avait fini remisé quelque part dans le placard, au milieu de tous les disques inutiles. Et depuis aucune nouvelle. Comme un groupe bien mort et enterré. Je me suis toujours demandé pourquoi les gens d’Hydra Head -encore eux- avaient sorti ce disque… Avant que le même label n’annonce la parution d’un nouvel album, un vrai, un long, pour septembre 2007. La méfiance était alors de mise et ce n’est pas l’horrible pochette avec motif de toile cirée ou de foulard pour grand-mère qui me poussait à écouter à nouveau la musique d’Austerity Program : pour mémoire j’ai toutefois remis une oreille sur Terra Nova et, surprise, quelques années d’isolement dans le noir et au sec ont été profitables, la piquette s’est transformée en honnête vin de table même si le mal de tête guette toujours un peu.
J’ai donc espéré que l’album, Black Madonna, n’ait pas besoin du même traitement. Quelques écoutes ont suffi à me persuader que non. D’abord il y a encore moins de chant qu’auparavant (chant qui était l’un des gros points noirs de Terra Nova), la musique d’Austerity Program est de plus en plus instrumentale. Instrumentale? En fait, juste une guitare, une basse et une boite à rythmes. C’est sûrement pour cette raison que le duo a tellement été comparé à Big Black -des comparaisons avec Godflesh aussi, mais là je comprends beaucoup moins. En fait Austerity Program n’est ni l’un ni l’autre.
Les titres sont longs, très longs même parfois (jusqu’à quatorze minutes) et c’est sûrement pour s’amuser que le groupe a posté ici l’une des rares cavalcade dont il est capable. Et c’est répétitif en diable, le même plan de guitare et de basse qui tourne jusqu’à ce que l’on n’en puisse plus -on croirait presque entendre une méthode assimil pour guitariste apprenti : allez mon gars, répète avec moi le même riff jusqu’à ce que tes petits doigts se mettent à saigner. L’épuisement n’est donc jamais loin sur Black Madonna, mais jamais l’ennui. Il y a aussi un très net progrès en ce qui concerne la programmation de la boite à rythmes -dans le genre j’apprends à me servir de toutes les fonctionnalités de ma petite machine l’intro du premier titre du EP était vraiment à mourir de rire (mais il parait que c’était fait exprès, n’est ce pas ?)- boite à rythmes donnant un côté encore plus mécanique et froid, inexorable. Un côté diaboliquement hypnotique même, la faute également à ces lignes mélodiques qui envoûtent et n’en démordent pas, les deux premières minutes du deuxième titre feraient presque penser à Wire avec cette capacité à être à la fois immédiat et distancié. Donc on y revient toujours, vers ces tranches de bruit uniquement dénommées par un numéro, façon nomenclature et procès verbal. De quoi rebuter un peu plus les amoureux de poésie et de belles phrases. Un disque intrigant qui sait se rendre indispensable.

mercredi 10 octobre 2007

Politique de réédition

.

Don’t like it ? Don’t buy it ! C’est le slogan d’Hydra Head Industries, le label qui ne veut forcer personne à rien. C’est tout à leur honneur mais j’ai toujours pensé l’inverse. Voilà une maison de disques qui sait faire monter la pression : en sortant les versions vinyles de ses albums largement après les versions CD par exemple ou en rééditant ses disques de manière superlative (bonus tracks, nouvel artwork, remasterisation, etc.) longtemps après que les versions initiales soient épuisées. Et puis il y a aussi cette volonté de vouloir torcher de beaux objets -vinyles de couleur, digipacks, obis à la japonaise… Alors la formule reproduite ci-dessus ressemble plus à un dédouanement qu’à une vraie profession de foi. Comment peut-on envisager que les disques que l’on édite ne vont pas plaire alors que l’on fait tout pour que ce soit le contraire qui se passe ? Je mélange tout ? Don’t like it ? Don’t Buy it ! concerne le fond et non la forme, la musique en elle-même et non son emballage ? Pas si sûr. Même l’underground -ou supposé tel- est victime de la course aux apparences. Fin 70/début 80 un label comme Factory avait le même genre de position bancale : Tony Wilson et ses petits camarades dénonçaient le disque en tant qu’objet de consommation comme symbole du capitalisme triomphant et pourtant les disques Factory devaient être les plus beaux du monde (la merveilleuse pochette cartonnée et en relief de Unknown Pleasures). Sur son site -ou son blog, je ne sais plus- vantant la sortie imminente de son nouvel album Born Again, Overmars prévient : Don’t like it ? Download it ! Cela me semble nettement plus honnête comme position.























Hydra Head réédite donc à tour de bras et c’est au tour de l’album We Are The Romans de Botch, en version double CD et remasterisée s’il vous plait. Le premier disque est l’album que tout le monde connaît déjà, LE manifeste du neo hard core tel qu’il est apparu à partir de la fin des années 90. Sauf que le hard core c’est quand même une musique de vieux, si elle est écoutée par des jeunes boutonneux et à chaque fois remise au goût du jour c’est uniquement pour des raisons d’attitude et de révolte adolescente (si si) -avec l’âge et une bonne dose de cynisme salvateur c’est une musique qui passe de plus en plus mal la rampe pour être finalement largement surclassée par l’ironie, la frustration sexuelle, la violence au second degré (troisième ?), la mort dans l’âme, les joies de la conduite au volant en état d'ivresse et toutes ces thématiques existentielles qui prennent de l’importance au fur et à mesure que les bedaines s’alourdissent et que les cheveux tombent.
Les deux versions de We Are The Romans sont effectivement différentes, il y a bien eu un travail d’effectué entre celle qui est référencée HH666-041 et la HH666-141 mais je suis incapable de dire si cela sonne meilleur, donc d’affirmer s’il y a une quelconque amélioration ou si celle-ci a une réelle utilité. De toutes façons j’ai toujours préféré An Anthology Of Dead Ends à We Are The Romans -ça c'est la critique constructive, non ? Le second disque propose des démos et du live (notamment enregistré à Rennes en 1999, héhé). La qualité sonore de ces démos -remasterisée elles aussi ?- feraient baver d’envie n’importe quel groupe de tâcherons hard coreux qui s’y croient. Le live lui est d‘un niveau correct et après celui qui l’on peut voir et entendre sur le DVD 061502 il ravira les complètistes plus ou moins furieux, plus ou moins jeunes mais toujours gorgés de sève hard core. Pour tous les autres -ceux qui ont des petites bites et qui ont fini par l’assumer- je ne peux qu’à nouveau les enjoindre à écouter le dernier album d’Oxbow en date, The Narcotic Story -un album également publié par Hydra Head : comme quoi ce label peut aussi faire de très bonnes choses, mais des choses éternelles cette fois ci.

mardi 9 octobre 2007

Contrat Nouvelle Embauche

.












Bon. J’ai un nouveau job et un nouveau patron. Et comme tous les patrons il a exigé de moi que je travaille gratuitement.

samedi 6 octobre 2007

Black metal : prétention et intellect

.
Parlons un peu de metal (sans blague) avec le treizième -c’eux eux qui le disent- album de Darkthrone. L’illustration de la pochette est une véritable calamité, on dirait presque un vieux disque de Broken Bones et d’ailleurs le titre F.OA.D. a été emprunté au groupe de l’ancien guitariste de Discharge. Fuck Off And Die, donc. Vraiment les mecs ? Si on ajoute à ces références évidentes (même pour les sourds et les aveugles) que le second titre du disque s’intitule Canadian Metal (avec comme il se doit des paroles à la stupidité revendiquée) on ne peut que penser à Venom et son Canadian Assault. Voilà pour le folklore. Côté packaging on remarquera aussi l’édition spéciale avec poster et cartes postales des deux protagonistes, Fenriz et Nocturno Culto -on n’est pas très loin des bondieuseries vendues à Lourdes ou des assiettes à soupe en porcelaine avec la tête d’Elizabeth II dans le fond.
Cet album confirme tout le mal que Darthrone pense de son public -le côté rassurant c’est que s’ils continuent comme ça la réciproque sera vraie et définitive- puisque nos deux trolls des forêts norvégiennes s’imaginent que torcher un album puisant aussi bien dans Venom et Mötorhead que Discharge ou Bathory tout en affirmant prétentieusement leur suprématie sur le genre black metal suffit à faire d’eux des héros immortels. Hey les gars, c’est vous qui allez vous faire enculer.






















On poursuit avec SPEKTR (comme ça se prononce) et un mini album Mescalyne (comme ça s’écrit) faisant suite à deux albums publiés chez Appease Me et particulièrement remarqués : du black metal façon SPK ou Whitehouse, si c'est possible, du mouvant et de l’instable traversé aussi bien par des fulgurances dark que laminé par du poison industriel. Souvent passionnant, parfois longuet et décousu. Toujours maniéré.
Ce quatre titres est autrement plus condensé que ses prédécesseurs, il s’agit d’un mini album je l’ai déjà dit et il ne dure que vingt-deux petites minutes ce qui est largement suffisant. Suffisant ET nécessaire. Je m’explique : en écumant son bouillon -c'est-à-dire en limitant les plages ambiantes, en ne s’appesantissant pas trop sur les samples, en laissant de côté les passages faussement improvisés- Spektr a considérablement resserré son propos. Du coup d’autres défauts apparaissent comme cette complaisance vis-à-vis de la technologie, faire joujou avec les effets stéréo a vraiment du amuser le groupe mais à la longue c’est un peu fatigant.
Il y a aussi la référence encombrante à Henri Michaux et à ses écrits à propos de la mescaline (on s’en serait douté), je connais assez peu le sujet mais ce genre de procédé -que d’aucun appelle concept album- a tendance à me frisouiller le bulbe rachidien d’énervement. L’écrivain/poète/peintre est même dûment samplé et échantillonné sur la deuxième plage du disque, un comble pour un homme qui a toujours refusé de se laisser enfermé et catégorisé.
Mais tout ceci n’est que détails sans importance. A la différence de Blut Aus Nord qui sur son dernier album Odinist nous a fait le coup vieux comme le monde du retour aux sources, Spektr a préféré creuser son sujet et alourdir son propos. C’est assez captivant (donc) pour faire fi des remarques ci-dessus -auxquelles j’ajouterais un jeu un peu péniblement démonstratif de la part du batteur- cela suscite déjà des réactions vénérées comme des rejets excommunicateurs et c’est toujours assez amusant de voir comment certains essaient absolument de donner un sens, même abscons, à leur musique. En plus j’aime beaucoup ce son de guitare, très sec.

vendredi 5 octobre 2007

La rêverie selon Andrew Pekler

.

Ce que je sais ou pense d’Andrew Pekler est à l’image de son site officiel où il n’y a rien d’autre qu’une adresse mail pour le contacter. Si j’ai écouté les premiers albums de ce gars là c’est uniquement parce qu’ils avaient été publiés par ~scape, en gros le réflexe de n’importe quel crétin qui veut connaître tous les disques parus sur le label dont il aime beaucoup certaines signature (ici Burnt Friedman, Kit Clayton et Jan Jelinek). Je les ai écoutés ces premiers albums -un, deux- et je n’ai jamais été réellement séduit bien que les attirances organiques du bonhomme correspondent plutôt à mes goûts : Andrew Pekler sait faire sonner sa musique électronique autrement que comme la manipulation pleine de dextérité mais pénible d’une armada de presets digitaux. Depuis ses deux premiers disques il a publié un album chez Staubgold (Strings + Feedback) où il revisite la musique de Morton Feldman -je ne l’ai jamais écouté mais je sens que je le devrais- ainsi qu’un quatrième enregistrement chez Kranky, Cue.






















C’est très facile de jouer au dithyrambique lorsqu’on prétend ne s’attendre à rien (en général je sais très bien faire ça) mais si je n’avais pas trouvé ce disque au fond d’une poubelle -ou presque- d’un magasin pourri de disques d’occasions dont personne habituellement ne veut, je n’y aurait certainement jamais prêté attention et c’est bien dommage.
Tout ceci n’est que de la moulinette digitale, de l’assemblage numérique mais ma première réaction a été de me demander si Andrew Pekler n’avait pas engagé deux ou trois instrumentistes pour l’occasion (pourquoi pas ?) afin de pouvoir étoffer le son tel qu’il est arrivé à le faire sur Cue. Et bien non. C’est du pur solo d’un esprit vissé sur son laptop qui sait associer percussions, piano avec grésillements, clics et neige sonore. Et plein d’autres choses aussi que finalement je me refuse à vouloir identifier, par goût du mystère (un peu) et fainéantise (beaucoup).
Fainéantise parce que la musique d’Andrew Pekler inspire une douce rêverie qui échappe aux conventions du genre (mélancolie, nostalgie… enfin, bref) pour installer son petit monde dans l’instant présent et seulement celui-ci. Il parait que la grosse faiblesse de la musique électronique c’est de ne pas pouvoir moduler -une boucle c’est rigide, etc, (ce n’est pas moi qui le dis)- et bien Pekler écarte ce genre de critiques en délivrant une musique littéralement atemporelle : il n’en ressort que de l’instantané, de l’éphémère mais qui persiste. Oui tout ça n’est qu’empilement de boucles sonores -à ce sujet une écoute du disque se révèle réellement impressionnante, quel fourmillement de détails microscopiques !- mais si avec Cue Pekler ne peut pas (ou ne sait pas) jouer avec la modulation, ce qui reste tout de même à démontrer, son album accommode très bien la distorsion temporelle en une sorte de mille-feuilles numérique pourtant très sobre jouant sur la simultanéité et l’immédiateté de toutes ses couches. J’ai rarement entendu une musique d’apparence aussi simple proposer une telle luxuriance. Rarement aussi on avait à ce point réussi à toucher à l’intrinsèque de la rêverie sonore grâce à un ordinateur sans avoir bêtement recours aux mélodies futiles ni aux enduits digitaux.