jeudi 2 août 2007

Plus c'est long plus c'est Kongh

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Un disque (forcément) que j’ai eu du mal à écouter, je crois même que je vais avoir du mal à en parler aussi, après tout ceci n’est qu’un prétexte de plus. Donc, un trio qui vient de publier un premier album sur un label dont le nom me laisse rêveur, tant de lucidité, mais pas autant que l’ambivalence que cette musique fait naître chez moi : les Kongh sont suédois (et non pas marseillais), ils pratiquent le gros metal bien lourd, bien sludge et bien doom aussi bien que Black Cobra mais, mais, à la différence des charmeurs de serpents venimeux, ils savent étirer tout ça sur la longueur un peu comme ce chewing-gum fondu dégueulassement gris rose sur lequel j’ai par inadvertance marché hier après midi et qui nous retenait moi et mes baskets collés à l’asphalte par un long mais invulnérable filament de gomme synthétique et baveuse, encore une (bonne) raison supplémentaire de haïr l’été.
De ce disque je n’avais retenu que ça, la durée des titres (il y en a cinq sur Counting Heartbeats et en tout ça dure presque 65 minutes) et les passages lents. En ce moment j’ai du mal avec le lent qui poisse et qui braille -j’ai du mal avec beaucoup de choses mais cela n’a rien à voir : ce n’est qu’un exemple mais je n’ai réussi à supporter en intégralité le nouvel album de Neurosis qu’une seule fois, je ne peux vraiment pas. Bref, une écoute laxiste et relâchée des mp3 du disque de Kongh avait donc réussi à me convaincre de pas grand-chose et lorsque le hasard a voulu qu’une version non virtuelle passe entre mes mains mon avis a radicalement changé, du pas grand-chose je suis passé au tout ou rien.























Car sur ce disque il n’y a pas que de la langue de bœuf grillée et autres gourmandises pour amateurs de post core acnéique : j’y trouve aussi du diablement sale et du curieusement ralenti, ralenti pas dans le sens habituel du terme (un coup de caisse claire toutes les trois minutes et on recommence) mais plutôt à prendre comme un abri temporaire -séquence émotion, une porte refermée sur la tempête, soudain le calme mais dehors le vent continue à se déchaîner, une présence invisible et menaçante, ce n’est qu’une image bien sûr et je rappelle que Kongh est un groupe suédois, voilà, j’ai donné dans la couleur locale.
Il n’y a qu’un seul guitariste dans Kongh et je me demande bien où il est allé chercher le son qu’il utilise pendant ces passages là. Je me demande aussi où il trouve ses riffs d’enclume pour les passages qui défouraillent. Il sait parfaitement compter, en fait il sait exactement quand le plan qu’il est en train de jouer peut commencer à ruiner sa musique, lasser le type qui écoute (moi) et tout foutre en l’air. Merveilleux équilibre, tout ou rien : c’est cette impression de rampant et de pesant transformée in extremis en inévitable attraction, désastre chéri et remontée d’adrénaline en direct. Il y a aussi le dernier titre (Zihuatanejo ? Je n’ai jamais su lire les caractères gothiques imprimés en marron presque clair sur fond marron pas tout à fait foncé) dans lequel je crois déceler de la double pédale, tout ça pour dire que dans la musique de Kongh la rythmique n’est absolument pas en reste, et cela fait quand même beaucoup de qualités tout ça : du long qui n’emmerde pas, du lourd qui ne pèse pas, des structures compliquées qui ne lassent pas. Le seul point négatif est la voix, au mieux elle gargouille dans un style par très loin d’un King Buzzo burné à la Philip Anselmo, au pire elle racle les parois intérieures de la caverne perdue dans la falaise les nuits de pleine lune de manière presque insupportable mais heureusement les parties chantées sont tellement minoritaires ici qu’on les en oublierait presque.