Vous reprendrez bien une tournée ? Binaire est en passe de devenir le groupe que j’aurai le plus vu en concert depuis une année mais ce n’est pas moi qui vais m’en plaindre ! Le duo marseillais/stéphanois (merde… est ce qu’ils aiment aussi le foot ?) est donc de retour ce soir au Sonic et c’est les vieux d’Under A Big Black Sun qui organisent. Egalement de la (punk) party : Servo (de Montpellier) et 25, encore des sales marseillais. A la tienne.
mercredi 30 avril 2008
Punk party
Vous reprendrez bien une tournée ? Binaire est en passe de devenir le groupe que j’aurai le plus vu en concert depuis une année mais ce n’est pas moi qui vais m’en plaindre ! Le duo marseillais/stéphanois (merde… est ce qu’ils aiment aussi le foot ?) est donc de retour ce soir au Sonic et c’est les vieux d’Under A Big Black Sun qui organisent. Egalement de la (punk) party : Servo (de Montpellier) et 25, encore des sales marseillais. A la tienne.
mardi 29 avril 2008
Fear Falls Burning / Frenzy Of The Absolute
Voilà un disque que j’allais écouter à reculons, plus exactement : voilà un disque qui traîne depuis plusieurs semaines au milieu d’une pile d’autres anonymes et je pensais bien que c’était là le meilleur endroit où il pouvait encore se trouver. Officiellement Frenzy Of The Absolute, le nouvel album de Fear Falls Burning, est sorti le 22 avril grâce aux spécialistes du genre, Conspiracy records. Quel genre ? C’est bien tout le problème, Fear Falls Burning fait partie de toute cette clique de musiciens solitaires qui travaillent à partir du son d’une guitare (ou autre…) et manipulent tout ça jusqu’à l’étirement et souvent jusqu’à l’ennui. De la drone music -bien que ce terme finisse par me sortir par les yeux- comme il s’en fait tant et qui ne correspond pas du tout à mon humeur présente, massacrante comme il se doit.
Fear Falls Burning a en plus cet handicap d’avoir publié l’année dernière -toujours chez Conspiracy- deux albums en collaboration, le premier avec Nadja et le second avec Birchville Cat Motel. Deux disques honorables mais sans grandes trouvailles, deux disques qui me faisait penser que Fear Falls Burning tirait plutôt les deux autres groupes (que j’aime beaucoup) vers le bas, seule manifestation tangible de son travail dont la nature par ailleurs me paraissait obscure. L’écoute d’un LP solo de Fear Falls Burning, I’Am One Of These Monsters Numb With Grace sur le très stylé label Equation records, m’avait un peu plus éclairé : des nappes de guitares, encore des nappes de guitares.
Frenzy Of The Absolute ne démord pas de cette ligne de conduite mais sur ce disque Fear Falls Burning a su intelligemment faire évoluer ses gimmicks vers quelque chose d’autrement plus consistant. Comment ? En introduisant des percussions. Sur le morceau titre c’est le suédois Tim Bertilsson de Switchblade (hum) qui assure la fonction de réveil matin. Magnus Lindberg, autre suédois mais de Cult Of Luna, fait la même chose sur We Took The Deafening Murmer Down. Entre les deux, Dave Vanderplas (des très électroniques Ontayso) déploie un magnifique jeu de cymbales qui illumine He Contemplates The Sign. On l’aura compris, Fear Falls Burning n’est jamais aussi à l’aise que lorsqu’il est accompagné et sa musique s’en ressent instantanément, paysages de brumes chaudes -oui chaudes, pas froides- et enivrantes ponctués de rythmiques pleines de cérémonial (Frenzy Of The Absolute) ou plus sinueuses (We Took The Deafening Murmer Down).
Ce disque devient instantanément bon, explorant quelques recoins encore non éclairés par la horde de groupes de post rock/post core/drone plastifié/etc dont le seul but est d’imiter les plus basses oeuvres de Pink Floyd parce que c’est cool et vaguement spirituel (une spiritualité qui permet surtout de ne se poser aucune question). Fear Falls Burning prend le virage à la corde, évite de planer, même sur l’eau, double sans effort un Jesu pas assez martyrisé à mon goût par Justin Broadrick, et talonne l’évanescence de Nadja. Subtil et aérien. Majestueux.
lundi 28 avril 2008
Une débâcle italienne
Bonne affiche (en théorie) que celle proposée en ce dimanche soir, le moment le plus cafardeux de la semaine, alors oui, pourquoi pas ? Deux groupes avec 37500 Yens dont le premier album, Astero, est l’une des plus belles réussites de l’année 2007 et Three Second Kiss, un groupe jusqu’à très récemment encore totalement inconnu -du moins jusqu’à ce qu’un nouveau label ne le déterre et ne le sorte de son Italie natale. Petite précision utile pour la suite : l’album Long Distance, qui est la première référence d’Africantape, fait plus que mériter les critiques élogieuses que l’on peut lire ici ou là. Ces italiens sont champions du monde pour se réapproprier le meilleur de la noise 90’s made in Chicago, de Shellac à U.S. Maple, ils le font avec classe et brio, Long Distance est un pur concentré de mélodies tordues, de tensions rythmiques, de guitares coupantes.
La basse claque, la batterie dévie toujours un peu, la guitare circonvolutionne -il n’y a que la voix qui laisse deviner quelques faiblesses, le timbre pas assez en adéquation avec le reste. Le fait que ce soit l’homme à lunette qui ait lui-même enregistré cet album pendant l’été 2007 lors de ses vacances annuelles au pays des voleurs et des prie-dieu est une bénédiction pour Three Second Kiss : qui d’autre que Steve Albini pouvait donner un plus bel écrin sonore à une musique dont il est le principal inspirateur ? Un inspirateur largement dépassé depuis belle lurette par les bons élèves de la classe (New Brutalism par exemple) dont les italiens font assurément partie. Ceci pour balayer la polémique sur l’éternel revival noise, chaque mois un nouveau groupe qui pompe Jesus Lizard, les Cows ou Hammerhead et pourquoi pas les trois en même temps pendant qu’on y est ?
Les deux 37500 Yens s’installent face à face, de profil par rapport au public, malheureusement bien maigre en ce dimanche soir. Jolie batterie, bel assortiment de pédales d’effets aux pieds du guitariste. La musique du duo est entièrement instrumentale ce qui en ces temps de disette -après tout, qui peut prétendre avoir toujours quelque chose d’intéressant à dire ? non, pas moi- est à prendre ou à laisser : je prends. Le guitariste triture un temps, met en boucle, passe à l’envers, rajoute une couche et la batterie rentre en action. A mon sens, 37500 Yens a été classé beaucoup trop vite dans la catégorie math rock. Il y a bien du tricotage de riffs appuyé dans la musique du groupe mais il y a aussi et surtout ces passages noise qui s’affolent, la guitare qui torpille sèchement tandis que le batteur bûcheronne.
Le jeu de celui-ci me déstabilise un peu au départ : nettement moins dans la dentelle, nettement moins aérien que sur Astero -moins de retenue, d’effets de cabriole, de retournements de situation et d’invention. Le son surtout me parait trop fort, il est inutile de pousser autant le volume lorsque cela n’apporte rien à la musique mais comme le groupe enchaîne vaillamment ses compositions, ne laissant aucune place aux hésitations ni aux tergiversations (ce que pouvaient laisser craindre les passages plus atmosphériques de l’album), le problème du son finit par s’estomper. 37500 Yens en concert c’est beaucoup plus vigoureux que sur disque et absolument pas glacial et austère. Bravo.
Three Second Kiss démarre alors que 90% du public est toujours en train d’honorer Roselyne Bachelot sur la terrasse du Sonic. J’en viens tout de suite à regretter ce que j’ai osé penser du son de 37500 Yens car celui de Three Second Kiss est tout simplement pourri et dégueulasse. Une vraie mélasse bien trop forte que ne donne qu’une seule impression : celle d’entendre trois musiciens jouant les uns à côté des autres. Les approximations du batteur apparaissent dans toute leur beauté, la voix du bassiste est criante d’insuffisance et surtout, surtout, le son du guitariste (qui a tendance à couvrir tout le reste) est abominable, très loin de l’esthétique sèche et racée de l’album. En s’éloignant du devant de la scène le son devient plus supportable mais ne s’améliorera pas de tout le (court) concert.
Le sondier du groupe a tout réglé à fond, noyant toute nuance dans un calvaire auditif de boue infâme -ce mec il faudrait le virer. Au passage, entendant la sono du Sonic qui commençait à sérieusement craquer, l’un des responsables du lieu ira voir le sondier du groupe pour lui demander de se calmer et de respecter un peu le matériel. Une réaction tout à fait normale si on en juge le rendu de ce qui sortait alors des enceintes. Le pire c’est que cette désastreuse façon de faire aura complètement bousillé l’intérêt d’un groupe comme Three Second Kiss. On peut bien se foutre de la gueule des formations de hard core qui confondent vitesse et précipitation, les groupes de noise qui mélangent volume et originalité ne valent pas mieux.
Heureusement le concert ne dure pas. S’en suivent quelques conversations tout en écoutant Through The Panama, l’excellent dernier album des Sightings qui passeront bientôt en concert à Lyon. Parmi tous les ragots il y a celui-ci, qui m’a plu beaucoup plus que tous les autres : la veille avait lieu le concert d’Isis à L’Epicerie Moderne et l’ingé son du lieu s’est aperçu que le troisième guitariste, responsable également des machines et installé à l’écart dans la pénombre du côté de la scène, jouait à l’unisson et note pour note les mêmes parties qu’Aaron Turner afin de grossir le son de celui-ci, pourtant déjà bien doté question amplis et correctement repris dans la sono. Encore un bel exemple de n’importe quoi élevé au rang d’art.
vendredi 25 avril 2008
Le flyer le plus laid du monde (mais c'est pour une bonne cause)
Petit retour en arrière sur la journée du 6 mars 2008 et le verdict attendu du tribunal de proximité de Lyon dans l’affaire de l’affichage libre. Comme on pouvait s’y attendre la relaxe a été prononcé pour le Sonic mais -et c’est très inquiétant- le juge a déterminé que ce n’est pas le Sonic qui aurait dû être poursuivi pour affichage sauvage (puisqu’il ne fait que prêter sa salle) mais les associations qui y organisent des concerts ! Le problème n’est donc que repoussé.
Les poursuites contre les associations vont donc pouvoir reprendre de plus belle et d’ailleurs cela a déjà commencé puisque le responsable de Barbe à pop est dores et déjà convoqué au tribunal le jeudi 22 mai.
Dans la foulée le collectif pour l'affichage libre à Lyon semble s’être décidé à organiser un concert de soutien le 24 mai (au Grrrnd Zero ?), le programme reste encore à établir.
jeudi 24 avril 2008
Boris / Smile (première version)
J’écoute le nouvel album de Boris, Smile, et je suis effondré. Je sais bien que c’est très mal d’aimer autant ce groupe de stoner FM et de doom plastique mais je ne peux pas m’en empêcher. La version que j’écoute de Smile est la version japonaise (Daymare Recordings) avec une pochette extravagante qui forme un cœur découpé dans de la mousse jaune, trop kitsch. Southern Lord qui a publié la version nord américaine et européenne de cet album le 21 avril promet toutefois quelques différences notoires, je cite : The main difference between the Southern Lord version and the Daymare version is the mix of the actual songs themselves. Where the songs on the Japanese version have a more electronic or noisy-psychedelic vibe, the North American/European version here features a heavier more straight-forward rock aesthetic. Ou encore : The Southern Lord version also features a track that has never been heard by anyone! : "You Were Holding an Umbrella". We purposely left this song off any promo versions in order to prevent the entire album from being leaked online. Besides this phenomenal album we are offering a exclusive bonus dvd to our mail-order customers. The DVD contains videos for the songs: "Statement", My Neighbor Satan", and "Pink". Je résume : sur la version Southern il y a un titre en plus, un DVD contenant des videos déja en ligne sur internet et globalement ça va faire beaucoup plus de bruit, le mix étant très différent.
Justement, la vidéo de Statement, la voilà :
Ce titre est également déjà disponible en single et le gouffre qui sépare cette version de celle qui ouvre l’album en édition japonaise est incommensurable : du heavy rock psyché-vivelle en gel on passe à un mix électronique d’abord déconcertant puis complètement horripilant. La suite de ce comparatif hautement passionnant lorsque l’édition Southern de l’album aura atterri entre mes oreilles.
Il y a quand même de quoi être profondément dubitatif face à de telles pratiques. D’autant plus que le Smile made in Daymare Recordings ressemble plus à une version traficotée et bidouillée à partir d’un mix final qu’à une version pensée et construite différemment dès le départ. Je résume encore : le Smile japonais ne serait qu’une bande manipulée avec ajouts superflus et retenues idiotes, dessous on arrive très bien à percevoir ce que doit être le véritable album -on perçoit les coupes de cheveux trop bien agencées, on entend les voix proprettes de karaoké mais on savoure aussi quelques riffs qui bastonnent et des rythmiques qui tuent. C’est même évident sur certains titres de la fin du disque (la plage numéro six par exemple), nettement moins bidouillés. Mais plus que tout, on entend de la fumisterie.
Il y a quand même de quoi être profondément dubitatif face à de telles pratiques. D’autant plus que le Smile made in Daymare Recordings ressemble plus à une version traficotée et bidouillée à partir d’un mix final qu’à une version pensée et construite différemment dès le départ. Je résume encore : le Smile japonais ne serait qu’une bande manipulée avec ajouts superflus et retenues idiotes, dessous on arrive très bien à percevoir ce que doit être le véritable album -on perçoit les coupes de cheveux trop bien agencées, on entend les voix proprettes de karaoké mais on savoure aussi quelques riffs qui bastonnent et des rythmiques qui tuent. C’est même évident sur certains titres de la fin du disque (la plage numéro six par exemple), nettement moins bidouillés. Mais plus que tout, on entend de la fumisterie.
mercredi 23 avril 2008
Marc Ribot / Exercises In Futility
Il y a deux maîtres-étalon pour juger un album solo de Marc Ribot : Don’t Blame Me publié en 1995 par Avant et The Book Of Heads (Tzadik, la même année). Le premier est une collection émouvante de reprises de standards du jazz et du blues américains alors que le second est une suite d’études en trente cinq parties initialement composées en 1978 par Zorn pour le génial Eugène Chadbourne, rien de poignant là dedans, plutôt de la provocation musicale permanente sous couvert de recherche et d’expérimentation.
Avec Exercises In Futility Marc Ribot revient tout seul à la guitare mais cette fois ci il joue uniquement à la guitare acoustique des études qu’il a lui-même composées dans le simple but de démontrer les possibilités mais aussi les limites (sic) de l’instrument, cela se veut à la fois un hommage en forme de démonstration et un sacrifice iconoclaste. On peut juste faire remarquer que Marc Ribot aime bien trop jouer de son instrument pour réellement dénigrer au sens littéral la pratique qu’il peut avoir de celui-ci, incapable qu’il est de toutes façons de jouer qu’autrement que comme Marc Ribot, d’imiter les faiseurs de notes (ce que pourtant il arrive éventuellement à faire lorsqu’il travaille à la demande pour des chanteurs qui veulent se payer en studio un guitar hero ayant une pointe d’originalité) et incapable la plupart du temps de respecter un certain académisme consensuel.
Contrairement à ce qu’annonce le titre du disque, ces exercices n’ont donc rien de futiles, bien au contraire. Marc Ribot -conscient de représenter un type de musicien atypique mais désormais reconnu pour ce qu’il est- a-t-il ainsi voulu se moquer de cet autre académisme dont il est l’un des étendards, l’académisme de l’avant-garde ? La photo du livret le montre en maître sûr de lui, senseï grisonnant de la six cordes, tout second degré y est difficilement discernable.
Le bois résonne, le nylon fibre, la pièce dans laquelle joue Ribot semble toute petite et nous sommes juste assis à côté de lui, à l’écouter, musique intime et chaude. Ce disque est à effet immédiat. Eventuel hommage au guitariste haïtien Frantz Casseus (Ribot lui a déjà consacré un album complet), Exercises In Futility est essentiellement un retour aux fondamentaux, à la musique ancestrale et intemporelle, vaste programme il est vrai qui se décline de deux façons : l’épure mélodique -à l’extrême limite du ténu et donc de l’inaudible voire de l’abscons- et le maillage bruitiste mais pas trop. On retrouve donc les deux pôles représentés par les deux albums déjà mentionnés mais de façon assez liée, toujours ce son chaud de l’instrument qui vibre et qui donne son homogénéité à l’ensemble. Bien que prenant des chemins très différents, Exercises In Futility débouche sur le même genre de sentiment qu’une bonne vieille impro de feu Derek Bailey -plénitude du son, beauté des résonances, harmoniques célestes. La grosse différence est que Ribot manque singulièrement de fluidité par rapport à Bailey ou plus exactement il n’en possède pas le même sens, le même rythme, le même rapport physique : les limites semble t-il imposées par le travail de composition, la rigueur des indications de jeu, bref tout ce qui n’existe pas chez Derek Bailey, le plus grand improvisateur de tous les temps en ce qui concerne la guitare. Un très beau disque qui va faire bailler tous les réfractaires à la pratique instrumentale hyper conceptualisée et totalement auto-concernée, de la branlette quoi. Mais un beau disque quand même.
mardi 22 avril 2008
The Dreamers
On prend les mêmes et on recommence : l’Electric Masada rempile sur cet enregistrement signé John Zorn et intitulé The Dreamers. L’avantage c’est peut être que Zorn lui-même joue au sein de la formation, voici donc un disque sur lequel on pourra entendre les feulements du maître se dit on. Erreur. Non seulement le saxophoniste se fait rare en tant qu’instrumentiste -par contre il frise l’hyperactivité (et le ridicule) en tant que compositeur, producteur et chef d’orchestre- mais qui plus est il est en fait quasiment absent de The Dreamers pour lequel il est pourtant crédité comme souffleur.
C’est vrai que la thématique du disque ne se prête à aucun débordement puisque il est la suite annoncé de The Gift (2001), album résolument lounge et tropical qui à l’époque en avait surpris plus d’un par son côté easy listening et cheap élaboré tendance pour un euro de plus on t’offre une deuxième paire de lunettes de soleil adaptée à ta vue et tu pourras aller faire le cake sur le pont d’un voilier bolloréen entre Bora Bora et Tahiti.
C’est vrai que la thématique du disque ne se prête à aucun débordement puisque il est la suite annoncé de The Gift (2001), album résolument lounge et tropical qui à l’époque en avait surpris plus d’un par son côté easy listening et cheap élaboré tendance pour un euro de plus on t’offre une deuxième paire de lunettes de soleil adaptée à ta vue et tu pourras aller faire le cake sur le pont d’un voilier bolloréen entre Bora Bora et Tahiti.
The Dreamers est bien plus varié et décousu que The Gift. Il garde le côté quand c’est trop c’est tropico qui fait hurler de rire (Mow Mow) mais s’aventure également dans le jazz d’appartement (forte démonstration pianistique de Jamie Saft sur A Ride On Cottonfair) et le polar(oid) noir de chez noir avec l’emballant Anulikwutsayl sur lequel on croit enfin deviner la présence de John Zorn -claquements secs de clefs de saxophone alto et cris inquiétants filtrés à la hanche en balsa. Sur l’anecdotique Toys le saxophone est bel et bien présent. Ce titre marque pourtant le début de la dégringolade de The Dreamers -toutes proportions gardées : cela ne volait quand même pas bien haut jusqu’ici- et d’un désintéressement qui malheureusement ne va aller qu’en s’accroissant. Of Wonder and Certainty flirte avec l’insignifiance tandis que sur Exodus Marc Ribot se prend pour Santana, véritablement foutage de gueule car tout le monde sait pertinemment que le guitariste basé à Brooklyn vaut bien mieux que le joueur de boogie jazz cubain. La fin du disque (Forbidden Tears) évoque l’inévitable Ennio Morricone, figure de proue selon Zorn mais dont il ne semble plus ne retenir que les mauvais penchants -et quand on connaît ce que pourtant le new-yorkais avait réussi à faire de la musique de l’italien sur The Big Gundown, cela laisse comme un goût amer dans la bouche. Nekashim est un très vague thème klezmer joué au xylophone. Seuls Mystic Circles avec sa guimbarde, son piano électrique et son rythme répétitif réveille un peu l’auditeur avant le final en demi teinte de Raksasa qui joue à nouveau sur les ambiances cinématographiques.
On se dit alors que The Gift n’était peut être pas si mal. Ce n’est pas l’emballage très soigné du disque (pochette cartonnée, inserts en papier claque et auto collants japoniais mais animaliers) qui fera de The Dreamers un essentiel de John Zorn et surtout un essentiel d’Electric Masada -pour en découvrir un : sauter cinq cases en arrière, économiser dix euros au passage et écouter sans modération At The Mountains Of Madness, enregistrement live époustouflant alliant l’incandescence du meilleur d’un Miles Davis encore récemment électrifié (1969) et la puissance harmonique et lyrique des meilleurs Masada. Du coup, la date d’Electric Masada le 24 juin à la Cité de la musique de Paris et consacrée à The Dreamers incite au découragement. On lui préfèrera très nettement celle d’un Painkiller enfin reformé dans son line-up originel (à moins que Mick Harris ne pète à nouveau un boulon) et accompagné de Patton le criard et de Frith le vieux singe blanc.
lundi 21 avril 2008
The Masada Book Two : Lucifer
Fidèle à ses mauvaises habitudes, John Zorn publie encore, via son label Tzadik, un énième disque sur lequel il ne fait pas grand-chose : voici donc la suite d’une longue série intitulé Masada Book Two : The Book Of Angels, série réunissant des enregistrements de nouvelles compositions de Zorn (à peu près trois cents, haha) datant déjà de 2004 et dévolues à son magnifique projet Masada. Mais le Masada quartet n’a jamais enregistré cette suite, cela a été confié à diverses formations ou musiciens du catalogue Tzadik, pour le meilleur ou pour le pire. Lucifer interprété par Bar Kokbha est le volume dix et on attend toujours le numéro neuf, Xaphan, par Secret Book 3, disque éternellement repoussé pour des problèmes de droits et annoncé depuis des lustres et sans grande précision pour le Printemps 2008.
Nous sommes au Printemps 2008 (oui) alors la curiosité nous pousse quand même à jeter une oreille à ce Lucifer (tous les volumes de la série porte un nom de démon) réalisé par une tripotée de musiciens virtuoses avec le Massada String Trio au grand complet -Mark Feldman, Erik Friedlander et Greg Cohen- agrémenté de deux batteurs/percussionnistes -Cyro Baptista et Joey Baron- et d’un guitariste, Marc Ribot. Autant dire tout de suite que si on a écouté ce disque uniquement pour avoir des nouvelles fraîches de Baron et Ribot (dans le cas de ce dernier mieux vaut se jeter sur le récent Exercises In Futility dont on reparlera à l’occasion) il vaut mieux rester dans l’ignorance.
Le obi promotionnel annonce fièrement que Bar Kokbha n’a rien enregistré depuis une bonne dizaine d’année. A la base, 1996, ce nom était celui d’un double CD avec un personnel sensiblement différent, en particulier la présence de souffleurs émérites -David Krakauer (pas encore labellisé en bleu spécialiste des musiques pour Bar Mitzvah et mariage juif), Chris Speed (extraordinaire compagnon de route de Tim Berne pendant tellement d’années), Dave Douglas (le fabuleux trompettiste)- et d’un pianiste beaucoup trop mésestimé : Anthony Coleman. Comme souvent chez Tzadik, lorsque un disque fonctionne bien, la formation qui l’a enregistré est pérennisée sous le nom même du disque et il en va ainsi de Bar Kokbha (d’autres exemples : Dany Zamir reprenant le nom de Satlah, Anthony Coleman endossant celui de Self Haters, etc).
Bar Kokbha est on l’a vu une version améliorée du Masada String Trio, sorte de passerelle entre celui-ci et le très colemanien Masada Quartet. Une passerelle qui passe au dessus des eaux éclairées mais paresseuses des mers des Caraïbes, une couleur rythmique essentiellement due à Cyro Baptista (toujours à faire des grimaces très drôles en concert mais insupportable sur disque) mais pas seulement. On connaît l’intérêt de Marc Ribot pour le genre ainsi que pour la surf music et sur Lucifer son jeu est radicalement opposé à celui qu’il pratique sur le mal aimé Asmodeus, disque pour lequel on en vient même depuis à relativiser un jugement trop sévère. Ribot ne se fatigue pas de trop, n’hésitant même pas entre claptonades sans âme et berrychonneries d’apparat.
Lucifer propose benoîtement un programme jouant sur l’opposition de rythmes du soleil et de mélodies néo ashkénazes, un programme composé de lounge des iles, klezmer d’aéroport, mélodies photovoltaïques, décorum cocktailisé, western spaghetti sans la sauce -le fond étant atteint par l’inconsistant Azbugah qui prouve une fois de plus que question composition, John Zorn est une source tarie : la réussite d’un volume de la serie Book Of Angel ne dépend alors plus que du pouvoir transgressif et des arrangements des interprètes et dans le cas de Lucifer on est bien loin du compte.
vendredi 18 avril 2008
Un temps de chien, deux flics et un concert
Un concert qui tourne autour de l’unique association basse/batterie, sans aucune guitare, pourquoi pas ? Initialement il était prévu Chick Peas de Lyon, Gâtechien d’Angoulême et Bear Claw de Chicago. Chercher l’erreur. L’erreur c’est Gâtechien qui a annulé pour je ne sais quelle raison et qui donc ne sera pas là. Une annulation faite suffisamment de temps à l’avance pour que tout le monde soit au courant mais je ne crois pas que la très faible affluence de ce jeudi soir puisse s’expliquer uniquement par la désaffection du duo qui jouit d’une très bonne réputation en concert par ailleurs. Non, il s’est mis à pleuvoir des cordes en début de soirée, il va pleuvoir toute la nuit, le lyonnais le sait bien et le lyonnais n’est pas toujours très courageux (au moins autant qu’un supporter du PSG mais ça c’est pas bien dur). Je suis venu pour voir Bear Claw, alléché par leurs deux albums pleins de tension made in Chicago et avec une pointe d’emo à la Washington DC -le vrai emo, celui de Fugazi en tête, pas les niaiseries à la Engine Down.
Je fume sous la pluie et sur la terrasse de la péniche où le Sonic a élu domicile. Un américain m’adresse la parole, il ne sait pas à qui il a affaire le gars, le roi du yaourt recraché avec une patate dans la gueule c’est moi mais il a l’air de comprendre mes réponses alors la conversation s’engage. Je suis certain qu’il fait partie de Bear Claw et il m’explique qu’il a voyagé toute la journée sous la pluie et qu’il en a un peu marre. Je compatis (mollement), conscient toutefois qu’avec le temps les gens ne viendront pas assister au concert. Bear Claw, malgré de très bonnes critiques, n’est pas un groupe assez connu.
Je fume sous la pluie et sur la terrasse de la péniche où le Sonic a élu domicile. Un américain m’adresse la parole, il ne sait pas à qui il a affaire le gars, le roi du yaourt recraché avec une patate dans la gueule c’est moi mais il a l’air de comprendre mes réponses alors la conversation s’engage. Je suis certain qu’il fait partie de Bear Claw et il m’explique qu’il a voyagé toute la journée sous la pluie et qu’il en a un peu marre. Je compatis (mollement), conscient toutefois qu’avec le temps les gens ne viendront pas assister au concert. Bear Claw, malgré de très bonnes critiques, n’est pas un groupe assez connu.
C’est donc Chick Peas qui attaque en premier, l’attitude désinvolte de ces trois garçons est pleine d’humour et de décontraction, genre on est quand même là pour bien rigoler. Le groupe se compose d’un batteur, d’une première basse qui joue plutôt les gardes-barrière et d’une seconde basse qui elle assure le boulot question accroches et hameçons. Le deuxième bassiste chante également mais pas trop, certains titres sont totalement instrumentaux.
Dans un premier temps la musique du groupe est entraînante, puissante et carrée (ce qu’elle restera toujours plus ou moins) mais passés les premiers titres, la lassitude s’installe. Les Chick Peas ont trop tendance à resservir les mêmes schémas, le batteur frappe toujours aussi fort et comme un furieux sur la même cymbale, des breaks comme il faut, là où il faut. Le groupe fonctionne à l’énergie et vu que le public ne lui en donne pas beaucoup (malgré les blagues et les apostrophes du chanteur), cela ne fonctionne pas. La trentaine de personnes présentes assistent froidement et de loin à une agitation dont elles ont l’air de penser qu’elle ne les concerne pas. Avec plus de monde, plus d’enthousiasme et plus de booze, le concert aurait très certainement décollé bien davantage.
Le groupe quitte la scène après un dernier titre joué à même le sol, devant la scène, c’est qu’il y a de la place, avant de regretter l’absence de Gâtechien. Je cours immédiatement m’installer au bar pour me transformer en vache à bière et attendre que Bear Claw investisse la scène.
Et les gars de Chicago ne vont pas y aller de main morte : ils ont débarqué en Europe (pour leur première tournée ici) avec deux tonnes de matériel, quinze amplis, une batterie complète, un chauffeur et un roadie/homme à tout faire, en fait l’américain avec qui j’avais papoté en début de concert et que j’avais pris pour un membre du groupe. Autant dire une sacrée organisation -en résumé : cinq personnes mais seulement trois musiciens- pour une formation qui n’amène pas tant de monde que ça, on en a vu des beaucoup plus connus venant jouer en Europe les mains dans les poches ou presque et en empruntant le matériel des groupes locaux de première partie. Une vraie débauche de moyens.
C’est frappant comme les petits gars de Bear Claw ont l’air jeune. Le bassiste de gauche, celui qui se spécialise dans la rythmique shellac-quienne à l’air d’un ado mal dans sa peau avec sa mèche de cheveux qui lui tombe devant les yeux. Le batteur est au moins deux fois aussi gros que tous ses petits camarades réunis (roadie et chauffeur compris). Le deuxième bassiste semble assez lointain, c’est lui qui va se charger de pulser la musique de Bear Claw avec un jeu impressionnant de savoir-faire, aidé par une basse cinq cordes.
Le set démarre et je reconnais plusieurs titres du dernier album en date, Slow Speed : Deep Owls, mais avec un son d’une puissance et d’une âpreté évoquant plutôt le premier album. Surtout, la rythmique est formidable, typiquement de l’école de Chicago (Rapeman/Jesus Lizard/Shellac) avec ce sens parfait de la métronomie qui ne laisse aucune chance. Les voix sont le seul point faible de Bear Claw, c’est la batteur qui assure le chant le plus évidemment héritier des groupes de Washington déjà évoqués, le guitariste de droite est un braillard parfois maladroit.
Au bout d’une petite demi heure le trio semble avoir atteint sa vitesse de croisière, entamant un titre sur lequel le bassiste rythmique (à gauche donc) se fait visiblement terriblement plaisir en articulant une ligne de basse diaboliquement construite et imparable, le concert devient vraiment très bon mais malheureusement -et bien que je ne m’en doute pas- il approche de sa fin : encore deux titres et Bear Claw s’arrête, il n’y aura pas de rappel, le bassiste de droite prétextant qu’il n’arrive plus à chanter. Sur le moment c’est assez frustrant. Il est encore très tôt, à peine onze heures et demi.
L’une des personnes s’occupant du Sonic me demande alors si je les ai vus. Qui ça ? Explication de ce qui s’est passé pendant la prestation de Bear Claw : deux policiers en civil ont débarqué, pas vraiment menaçants (j’ai encore en mémoire cette première descente opérée lors d’un concert de Café Flesh, neuf flics et une attitude comme s’ils étaient dans le repère de dangereux malfaiteurs), avec cette petite intention de faire remarquer pour la énième fois que le Sonic ne respecte pas les normes en matière de sonorisation -en particulier la salle ne possède pas encore de limiteur, coût de son éventuelle installation : 3000 euros. Même si les problèmes d’affichages sont partiellement résolus, mais on en reparlera, la pression continue donc contre la salle lyonnaise. L’originalité et l’indépendance d’esprit ne sont décidément pas bien vues dans cette ville.
jeudi 17 avril 2008
Deborah Kant
Battons le fer tant qu’il est encore chaud : Deborah Kant n’a peut être pas livré sa meilleure performance la semaine dernière lors de l’anniversaire du Sonic mais il n’en demeure pas moins que ces quatre garçons n’ont pas démérité de leur niveau d’excellence habituel, confirmant tout le bien que l’on peut penser d’eux. L’écoute de leur album sans titre et en autoproduction va dans le même sens, celui d’une inspiration fleuve et tumultueuse, jusqu’à en perdre haleine, non ça repart aussitôt, ces gamins sont increvables. On l’aura compris, les titres composés par Deborah Kant sont très (très) longs, neuf plages et une heure de musique, aussi fort qu’un vulgaire groupe de post hard core sauf qu’il n’en s’agit absolument pas d’un et qu’en plus nos petits lyonnais ont une définition bien a eu du mot classe : ils ont déjà tout compris de cette équation toute simple et toute bête que bien peu pourtant réussisse à résoudre, une équation à deux inconnues, bruit versus mélodie.
Racée, la musique de Deborah Kant l’est et ce n’est pas évident de réussir un tel exploit sur une telle longueur. On peut regretter Marina et son développement -pas réellement mollasson, disons sans grandes surprises malgré l’agrément de zigouigouis électroguitaristiques (un titre complètement instrumental qui plus est)- mais pour le reste c’est du tout bon, du qui pète à la gueule, de l’ultra bandant, du bien roulé, du qui donne envie de transpirer et pas que des pieds. La filiation avec un groupe lyonnais quasi ancestral, Deity Guns, a beau être évidente -comme ces illustres anciens, eux-mêmes fort inspirés par Sonic Youth, Deborah Kant sait marier dissonance avec équilibre harmonique, expérimentation (à l’aveugle ?) et énergie rock- la bande des quatre rénove l’orthodoxie du groupe à guitares noisy et lui insuffle une bonne dose d’énergie sexy. Ça fuse direct dès l’intro de brûlots tels que Cream Off, Public Lotion ou I Want To Dead -ce dernier ayant été enregistré à la cave mais ne souffrant pas d’un son pourri, ça c’est du tout bon pour la légende. Beards quant à lui joue sur la solidité rythmique mais n’a rien à envier aux autres, bien au contraire. En écho au très court Milk On placé en introduction du disque et enregistré en public, Milk Off est une exceptionnelle conclusion de quelques onze minutes, un titre noisy à souhait s’embarquant dans un final flirtant avec le tournis psychédélique à force de répétition d’un thème excellent et entêtant.
D’après les notes du livret, ce disque a été enregistré en 2006. Qu’il ait mis autant de temps à sortir laisse songeur, encore un groupe de jeunes gens qui ne veulent pas travailler plus pour gagner pareil (ou moins) et galèrent dans les joies de l’autoproduction. L’illustration ci-dessus est celle du livret, le disque étant agrémenté de quatre sérigraphies (bien plus belles), mention spéciale à la Renault 5 immatriculée DK 666. Le tout est bien sûr disponible pour pas cher.
mercredi 16 avril 2008
Frustration / Relax
C’est non sans surprise que le précédent maxi de Frustration, Full Of Sorrow, avait réussi l’été dernier à se frayer un chemin jusqu’à ma platine et surtout y avait été joué tous les jours ou presque -l’été période bénie des Dieux pendant laquelle tout semble permis : porter des tongs et des bermudas à fleurs, se faire faire un nouveau tatouage pour montrer comment qu’on est beau, partir en vacances dans un pays du tiers-monde (éviter toutefois le Languedoc-Roussillon ou le Midi), faire des barbecues, baiser avec sa voisine (ou son voisin), jouer au foot ou mourir d’ennui.
L’insouciance estivale s’en est allée et depuis je n’ai toujours pas vu le groupe parisien en concert (pourtant il est passé au moins une fois -deux ?- dans le coin), je n’ai fait que me contenter des habituels palliatifs, quelle lâcheté. Et comme tous les disques de l’été découverts sur le tard -parution initiale en 2006- Full Of Sorrow a ensuite fini par rejoindre ses petits camarades de divertissement dans l’humidité et la froideur de l’oubli. Je ne l’ai donc pas réécouté une seule fois de l’hiver.
Il y a ouvertement cette dynamique dans la musique de Frustration : un groupe qui pratique le post punk couillu et la déflagration réfrigérante tout en donnant envie de -hum- danser, envie de hurler les paroles (simplissimes), ouvrir une nouvelle cannette de bière alors que la précédente est à peine terminée, faire comme si on écoutait attentivement tout en s’en foutant complètement et remettre le disque immédiatement après. La limite c’est que cela ne peut pas durer dans le temps. Un vrai disque de l’été, je le répète.
L’insouciance estivale s’en est allée et depuis je n’ai toujours pas vu le groupe parisien en concert (pourtant il est passé au moins une fois -deux ?- dans le coin), je n’ai fait que me contenter des habituels palliatifs, quelle lâcheté. Et comme tous les disques de l’été découverts sur le tard -parution initiale en 2006- Full Of Sorrow a ensuite fini par rejoindre ses petits camarades de divertissement dans l’humidité et la froideur de l’oubli. Je ne l’ai donc pas réécouté une seule fois de l’hiver.
Il y a ouvertement cette dynamique dans la musique de Frustration : un groupe qui pratique le post punk couillu et la déflagration réfrigérante tout en donnant envie de -hum- danser, envie de hurler les paroles (simplissimes), ouvrir une nouvelle cannette de bière alors que la précédente est à peine terminée, faire comme si on écoutait attentivement tout en s’en foutant complètement et remettre le disque immédiatement après. La limite c’est que cela ne peut pas durer dans le temps. Un vrai disque de l’été, je le répète.
Les effets vapeur artificielle et frigidaire intérieur répondent à nouveau présent sur le premier véritable album de Frustration, Relax, album doté d’une production massive et efficace. Comme pour le précédent six titres c’est Born Bad qui a géré cette sortie. Une sortie qui confirme l’implication grandissante des synthétiseurs dans la musique de Frustration (car sur les tout premiers enregistrements du groupe il n’y en a pas) sans pour autant mettre guitare et basse au second plan. Parmi les titres les plus synthétiques il y a l’emphatique So Many Questions à la fois sponsorisé par Midge Ure et New Order, un vrai tube.
Et des tubes Relax n’en manque absolument pas : l’un des plus impressionnants est très certainement No Trouble mais ça ne compte pas, ce titre figurant déjà sur Full Of Sorrow dans une version strictement similaire. Quasiment au même niveau on trouve As They Say et sa guitare simplissime qui donne fatalement envie de remuer les fesses ou Shake Me et Relax, construits sur à peu près le même modèle. Signalons également She’s So Tired sur lequel le chanteur se lance dans une imitation ma foi assez réussie de Ian Curtis alors que juste avant, sur Waiting For Bad Things, il faisait plutôt penser à Fred Schneider. Un chanteur avec suffisamment de personnalité -malgré les comparaisons inévitables, donc- et de conviction pour nous faire oublier son accent approximatif avec lequel il sait très bien jouer par ailleurs, comme sur l’hilarant et ironique We Have Some… introductif.
Quelques points faibles toutefois : des titres excellents mais qui semblent répondre à des impératifs dont on oserait presque affirmer qu’il s’agit de recettes, l’instrumental inintéressant Shades From The Past ou la très nette impression qu’il s’agit d’un disque que l’on finira par complètement oublier et qui ira bien un jour ou l’autre rejoindre son prédécesseur au placard. Mais en attendant, hein…
mardi 15 avril 2008
L'évangile selon Carla
Sans être un fervent admirateur de Carla Bozulich, on peut quand même reconnaître à la dame une aura particulière et une rigueur musicale au delà de tous soupçons. Ce qui n’est pas toujours suffisant puisque ses enregistrements (elle a une pléthore de groupes et de collaborations à son actif) peuvent s’avérer franchement pénibles car souffrant de l’effet de pause. On a beau me dire que la dame est sincère -voir certaines de ses prestations en concert absolument stupéfiantes- je n’y crois pas plus que ça. A vrai dire, je devrais m’en foutre mais Carla Bozulich en demande tellement qu’il est impossible de la différencier de son art. Le fameux débat. Ce n’est pas son précédent opus sur Constellation, Evangelista, qui pouvait me faire changer d’avis avec l’invention d’un post rock d’église suicidaire et hurlé, tu souffres beaucoup Carla et mes oreilles souffrent avec toi. Le concert de l’année dernière et correspondant à la parution de cet album ne valait guère mieux et me faisait même regretter le disque, c’est tout dire (oui je suis mauvais public).
Une année plus tard, Carla Bozulich est déjà de retour, toujours sur Constellation, mais cette fois ci sous le nom d’Evangelista pour un album qui lui s’intitule Hello, Voyageur. Explications : le nom du précédent album est devenu le nom d’un vrai groupe formé autour de la chanteuse, opération magique dont je croyais jusqu’ici que seuls les musiciens signés sur Tzadik s’étaient fait une spécialité. Un groupe donc, ce qui n’a pas empêché Carla Bozulich de s’entourer d’un grand nombre d’invités dont l’indéboulonnable guitariste Nels Cline ainsi que beaucoup d’autres, issus de la clique Constellation/Godspeed/Silver Mount Zion. La formation semble s’être stabilisée autour de Tara Barnes (basse), Andrea Serrapiglio (violoncelle) et Dominic Cramp (claviers, etc) -on ajoute un batteur (Jason Van Gulick) et on a le personnel de la prochaine tournée européenne.
Hello, Voyageur est un album réussi qui à la fois contredit et confirme à peu près tout ce que l’on peut penser de Carla Bozulich. D’une grande variété de styles, il utilise en partie le spectre musical que la chanteuse/guitariste a visité au cours de sa déjà longue carrière. Winds Of Saint Anne renoue avec le côté sépulcral du précédent album tout en faisant clairement référence, tant musicalement qu’au niveau des paroles (the west is the best and the wind knows my name) au The End des Doors. Smooth Jazz flirte avec la no wave tribale tandis que Lucky Lucky Luck possède un petit côté jazzy faussement innocent lorgnant du côté de Lydia Lunch. For The L’il Dudes voit l’apparition des cordes made in Constellation et la larme à l’oeil qui va avec. The Blue Room est la plus belle chanson de l’album, d’une émotion rare (à moins que ce ne soit Paper Kitten Claw, berceuse désabusée). Truth Is Dark Like Outter Space est un véritable brûlot noise (merci à la guitare de Efrim). The Frozen Dress se fait inquiétant et torturé sans tomber dans le piège du plastigothique. Final halluciné de percussions fracassantes et de cuivres fantomatiques, Hello, Voyageur! est une chanson incantatoire et en définitive très inquiétante. Toutes les qualités extrêmes de Carla Bozulich y sont réunies.
Une énumération un tantinet fastidieuse qui pourrait dévoiler le caractère trop hétérogène et donc peu accrocheur de ce disque, or, il n’en est rien. A l’inverse, Hello, Voyageur permet de respirer, Carla Bozulich a su rendre sa musique plus digeste et accessible. Ce n’est pas encore la grosse joie de vivre mais cette fois ci, cela donne envie d’y croire.
dimanche 13 avril 2008
Birthday Party (part two)
Deuxième soir. Pendant longtemps l’équipe du Sonic a été indécise : qui faire jouer en première partie de Cheer Accident ? Lorsque la réponse est tombée, elle a pris la forme d’une très bonne nouvelle puisque Deborah Kant est l’un des meilleurs groupes de la scène local, pas encore très connu mais venant juste de publier un premier album prometteur (on en reparle bientôt) et dont les prestations scéniques sont toujours à la hauteur, alliage bruit/mélodie. S’il faut chercher quelque part c’est du côté du Daydream Nation de Sonic Youth et de Deity Guns époque Stroboscopy.
Les quatre garçons investissent la scène, ils utilisent toujours le même dispositif : le guitariste blondinet (qui chante également) à gauche, l’autre guitariste -celui qui aime bien se mettre à quatre pattes avec son instrument pour mieux nous torturer les oreilles- à droite et le bassiste, qui joue exclusivement aux doigts, au centre (parce que c’est lui le chef ?). Il y a peut être des défauts dans la musique de Deborah Kant, la voix parfois mal placée, des breaks qui pédalent dans la semoule mais il n’y a aucun temps morts. Les morceaux sont longs, parfois très longs même, et c’est tout l’intérêt, les digressions noisy qui partent en vrille, comme un bouillonnement psychédélique (celui qu’arrive très bien à reproduire Kinski par exemple) avant de retomber dans le bruit pur, les oreille qui font mal et les culottes qui se mouillent.
Malgré un public un peu froid -on va dire pas encore tout à fait réchauffé- Deborah Kant poursuit son set, les accroches des titres fonctionnent de façon somptueuse, la rythmique est souple et coulante (les doigts je vous dis…), les dérapages sont excellents. Au moment du final, le guitariste de droite (préposé à la section guitarorist) en fait un peu moins que d’habitude, n’essaie pas de copuler avec son ampli mais lui envoie quand même quelques beignes bien placées qui donnent le frisson. En espérant de ne pas avoir à attendre aussi longtemps que la dernière fois pour revoir le groupe.
Les quatre garçons investissent la scène, ils utilisent toujours le même dispositif : le guitariste blondinet (qui chante également) à gauche, l’autre guitariste -celui qui aime bien se mettre à quatre pattes avec son instrument pour mieux nous torturer les oreilles- à droite et le bassiste, qui joue exclusivement aux doigts, au centre (parce que c’est lui le chef ?). Il y a peut être des défauts dans la musique de Deborah Kant, la voix parfois mal placée, des breaks qui pédalent dans la semoule mais il n’y a aucun temps morts. Les morceaux sont longs, parfois très longs même, et c’est tout l’intérêt, les digressions noisy qui partent en vrille, comme un bouillonnement psychédélique (celui qu’arrive très bien à reproduire Kinski par exemple) avant de retomber dans le bruit pur, les oreille qui font mal et les culottes qui se mouillent.
Malgré un public un peu froid -on va dire pas encore tout à fait réchauffé- Deborah Kant poursuit son set, les accroches des titres fonctionnent de façon somptueuse, la rythmique est souple et coulante (les doigts je vous dis…), les dérapages sont excellents. Au moment du final, le guitariste de droite (préposé à la section guitarorist) en fait un peu moins que d’habitude, n’essaie pas de copuler avec son ampli mais lui envoie quand même quelques beignes bien placées qui donnent le frisson. En espérant de ne pas avoir à attendre aussi longtemps que la dernière fois pour revoir le groupe.
Pendant que 95% du public est sorti dehors pour se regoudronner les poumons et que Thymme Jones coincé au stand de marchandising de Cheer Accident a visiblement fort à faire avec deux vieux nerds à lunettes visiblement de la race des cédévores avides de conseils d’achat, un petit barbu s’installe sur la scène, il s’assoie sur une chaise pour pleurer, bientôt rejoint par un grand gaillard qui empoigne sa guitare. Puis Thymme Jones retrouve ses deux compères, explique que c’est la première fois que Cheer Accident vient en Europe, que malheureusement le groupe ne dispose pas de piano sur scène bien qu’il en ait réellement besoin alors il brandit un vieux poste à cassettes pour s’accompagner et interpréter l’une des trop nombreuses ballades qui composent le répertoire (surtout le plus récent) de Cheer Accident et dont je ne suis absolument pas friand. J’ai devant moi deux barbus et un déménageur qui se prennent pour les Beach Boys. Et j’attends patiemment que cette introduction en forme d’hommage appuyé et régressif à Robert Wyatt cesse.
Qu’il n’y ait pas de piano sur scène est donc une bonne chose : on va ainsi peut être avoir droit au côté le plus rock (dans le sens guitare du terme) du groupe. Par contre je ne vois pas Todd Rittmann… Où est donc passé Todd Rittmann ? Visiblement l’ancien guitariste de U.S. Maple n’a pas fait le déplacement et c’est une déception. Mais dès que Thymme Jones lâche son poste à cassettes et sa trompette pour s’installer derrière la batterie on comprend mieux pourquoi le monsieur avait été engagé par Jim O’Rourke pour tenir ce même rôle au sein de Brise Glace. Le genre de classe d’un Charles Hayward.
Les voix me défrisent souvent dans Cheer Accident, ou plutôt les lignes de chant. Je fais abstraction. La basse ne m’enchante guère non plus et elle est tenue par le nain pleurnichard de tout à l’heure -Atchoum ? Mais le pire est le son du guitariste, qui devient vite insupportable d’autant plus qu’il est au service de compositions dynamiques mais alambiquées et tortueuses, flirtant avec un jazz rock pas très avenant. Un improbable croisement entre Victims Family (si si…) et Matching Mole (encore Robert Wyatt). Un titre de Cheer Accident, même avec l’option grosse guitare, est toujours une boite de pandore avec autant de tiroirs que nécessaires pour contenir toutes les idées bouillonnantes issues d’un cerveau hyperactif et malade. Aux plans littéralement stupéfiants de bonheur succède l’agacement, ou au mieux l’incompréhension. Je finis par me dégager du devant de la scène, écoute de loin, attend encore pendant un titre ou deux avant de sortir prendre l’air (goudron inside). Même un passage hyper répétitif dans la lignée de Brise Glace et que j’écoute désabusé ne me fait pas revenir. C’est promis, juré, craché : je vais me raser la barbe.
samedi 12 avril 2008
Birthday Party (part one)
Nous y voilà donc, à la première soirée d’anniversaire du Sonic. Bien sûr ce n’est qu’un prétexte car c’est avant tout l’occasion de revoir Sun Plexus -pardon : Sun Plexus 2- et de goûter aux joies de leur noise punk scatophile dada. Sur le programme cela s’annonce très bien, trois groupes/performers sont programmés, tous issus de Ronda Label, petite boutique spécialisée dans l’épicerie fine et qui a monté un plateau maison intitulé Hyper Toxique pour quelques (trop rares) dates françaises. Dommage que pour celle de Lyon il n’y ait pas eu le duo eRikm/Akosh S. -comme aux Instants Chavirés de Montreuil…
Aux premiers arrivés ce soir Ronda Label offre une compilation, pas un CDr gravé à la va-vite et emballé dans un bout de plastique transparent, non, un vrai disque -OK je l’ai déjà donc je ne prends pas mon exemplaire, c’est ma mansuétude légendaire. Je Suis Un Etranger est une excellente compilation pour laquelle il a été demandé à chaque musicien/groupe de choisir une langue et de bâtir une composition autour. Cela n’étonnera personne d’apprendre que les Sun Plexus ont opté pour l’albanais.
Le trio est également venu avec son nouvel album, En Souvenir De L'Horreur. Et quand je leur demande pourquoi ils ont rajouté un 2 à leur nom ils répondent : c’est parce qu’on a changé de line-up, on n’est plus vraiment les mêmes personnes. Oui, mais rassurez moi, vous chantez toujours en albanais ? En espagnol aussi, de plus en plus parce qu’on préfère. L’état mental déficient du groupe est au beau fixe, le concert peut donc commencer.
Aux premiers arrivés ce soir Ronda Label offre une compilation, pas un CDr gravé à la va-vite et emballé dans un bout de plastique transparent, non, un vrai disque -OK je l’ai déjà donc je ne prends pas mon exemplaire, c’est ma mansuétude légendaire. Je Suis Un Etranger est une excellente compilation pour laquelle il a été demandé à chaque musicien/groupe de choisir une langue et de bâtir une composition autour. Cela n’étonnera personne d’apprendre que les Sun Plexus ont opté pour l’albanais.
Le trio est également venu avec son nouvel album, En Souvenir De L'Horreur. Et quand je leur demande pourquoi ils ont rajouté un 2 à leur nom ils répondent : c’est parce qu’on a changé de line-up, on n’est plus vraiment les mêmes personnes. Oui, mais rassurez moi, vous chantez toujours en albanais ? En espagnol aussi, de plus en plus parce qu’on préfère. L’état mental déficient du groupe est au beau fixe, le concert peut donc commencer.
Et cela commence très mal avec Melmac. Je suis, déjà, très raisonnablement séduit par les disques du duo (formé de deux frères) qui propose un mélange d’électro-bricolage atmosphérique et de post rock confit. Sur la gauche il y a le préposé aux machines et aux petits bruits. A droite un guitariste arborant un superbe t-shirt de Kiss et une guitare qu’il a sûrement chourée à un groupe de hair metal, plastique noir qui brille et découpe façon instrument de la mort qui déchire tout. Il prend parfois des pauses à mourir de rire, avec les grimaces d’accompagnement assez parfaites dans le genre tandis que son frère reste d’une impassibilité à toutes épreuves.
Le décalage avec la musique en elle-même pourrait être bien vu si justement la musique avait plus d’étoffe. Le début du concert est prometteur, du nappage de bidouilles comme on en fait tant mais bien mené. Dès que les deux guitares entrent en action et que les gratouillages prennent le dessus la musique de Melmac devient soporifique et sans âme, les ballades assombries des albums n’ont aucune pertinence sur scène, ce qui est bien trop souvent le lot de ce genre de groupe.
Le décalage avec la musique en elle-même pourrait être bien vu si justement la musique avait plus d’étoffe. Le début du concert est prometteur, du nappage de bidouilles comme on en fait tant mais bien mené. Dès que les deux guitares entrent en action et que les gratouillages prennent le dessus la musique de Melmac devient soporifique et sans âme, les ballades assombries des albums n’ont aucune pertinence sur scène, ce qui est bien trop souvent le lot de ce genre de groupe.
On cherche Arnaud Rivière. Où est il ? Il a disparu ? C’est à son tour de jouer et le timing serré (fin théorique du concert à minuit) est déjà largement explosé. Cet ancien batteur (dans Pregnant, un groupe du label Prohibited et s’inscrivant tout à fait dans cet lignée) a complètement dévié de trajectoire en se consacrant au traficotage de vinyles via une platine en forme de caisse à outils et une table de mixage crucifiée par des tiges filetées et bâillonnée au gros scotch. Comme mu par la seule volonté d’un gosse dont le seul plaisir est de casser ses jouets trop neufs, Arnaud Rivière écrase, racle, broie, lamine ce qui ne ressemble plus vraiment à un disque à l’aide de ressorts, de plaques métalliques et divers autres accessoires non identifiables. Ça hurle dans les enceintes, les oreilles saignent et c’est d’une drôlerie inévitable, encore plus que chez ce grand guignol de Christian Marclay. C’est l’heure de remballer, Arnaud Rivière démonte petit à petit son dispositif, rassemble tout dans sa petite valise métallique, part avec elle sous le bras et coupe brutalement le son.
Les Sun Plexus 2 ont installé des néons sur leurs pieds de micros : pour une fois le Sonic ne sera pas plongé dans une lumière rouge mais bleuâtre, gothique attitude. Comme souvent le son du groupe est approximatif, les morceaux pas forcément bien en place, les voix difficilement discernables mais cela fonctionne parfaitement. Les rois du punk indus et absurde, oscillant entre grind connerie grimaçante et lourdeur dark ages sponsorisée par le Flying Circus, sont en très grande forme, je le sentais bien.
Les habituelles blagues émaillent le concert comme cette intervention dès la fin du premier titre : on tient à signaler qu’il y a une erreur sur le programme, on a changé de nom maintenant on s’appelle Sun Plexus 2 et comme vous avez pu le remarquer la musique n’est pas la même. Petit à petit le groupe prend ses marques, le batteur s’améliore, mine de rien Sun Plexus organise son petit bordel de manière très sérieuse et appliquée, tout ça est travaillé, pensé, rodé -il faut être sacrement intelligent pour arriver à jouer au con à un tel niveau d’excellence- et tout le talent du groupe est là : faire passer la pause pour de la désinvolture, transformer son cacaprout en or massif, faire de l’intello qui donne le fou rire.
mercredi 9 avril 2008
So Happy Birthday
Encore un rapprochement abusif. Lorsqu’on me parle d’anniversaire je pense toujours à cette chanson de Laurie Anderson :
It was a large room. Full of people. All kinds.
And they had all arrived at the same building at more or less at the same time.
And they were all free. And they were all asking themselves the same question :
What is behind that curtain ?
You were born. And so you’re free. So happy birthday.
Pour ses deux ans le Sonic de Lyon a bien fait les choses en programmant deux excellentes soirées. La première le 9 avril en compagnie du label Ronda avec Arnaud Rivière, Melmac et les insurpassables Sun Plexus. Le 10 avril (et c’est gratuit si on est venu la veille) il y aura Deborah Kant et les indescriptibles Cheer Accident. Qu’on se le dise.
mardi 8 avril 2008
Neptune / Gong Lake
Plus que pour n’importe quel autre groupe, il faut fermer les yeux lorsque on écoute un nouvel album de Neptune. Ou alors oublier à quoi ça ressemble en concert, oublier les instruments home made, les guitares forgées dans la fonte, les synthés cheap avec composants soudés au chewing-gum. Oublier la théâtralité du groupe sur scène, ses postures outrées qui n’échappent au grotesque que par la grâce d’une élégance discrète, oublier les blagues surréalistes, le fracas du son, les percussions qui s’emballent, les guitares qui décollent hors des sentiers battus. Neptune est un groupe de très (très) grande classe. Alors les découvrir en concert puis écouter leurs disques, c’est forcément un peu frustrant.
En insistant un peu, le précédent album, Patterns, avait réussi à s’imposer. Au sein d’une discographie pléthorique, j’ai toujours entendu dire qu’il était un digne représentant des prestations scéniques du groupe. Peut être. Mais, malgré ses qualités, Patterns n’arrivait pas à rattraper le retard de Neptune en studio, n’était pas assez fort pour inciter à… fermer les yeux. Neptune fait partie de ces groupes prolifiques qui multiplient les enregistrements et surtout leur publication, plein de disques de partout, comme s’il en pleuvait, le risque de se disperser à force de choisir l’option de la surproduction. Des disques souvent bâclés et à disponibilité réduite. Il était donc vraiment temps pour Neptune de recentrer son propos et de marquer un grand coup.
C’est chose fait avec la parution de Gong Lake, album génial publié par Radium, filiale du très sérieux et très estimé label Table Of The Elements. Un éclairage nouveau sur la musique de Neptune, ce label étant distribué dans la plupart des pays civilisés (mais toujours pas disponible en duty free à Dubaï) et suscitant cet engouement assez particulier qui consiste chez certains à se procurer, de quelque façon que ce soit, toutes ses productions -tout comme les puceaux acnéiques achètent n’importe quel disque estampillé Hydra Head, les calvitiens précoces collectionnent les références Table Of The Elements/Radium sans doute à la recherche de l’alchimie musicale parfaite et mystérieuse, la formule suprême qui transforme l’électricité en musique (et inversement).
En insistant un peu, le précédent album, Patterns, avait réussi à s’imposer. Au sein d’une discographie pléthorique, j’ai toujours entendu dire qu’il était un digne représentant des prestations scéniques du groupe. Peut être. Mais, malgré ses qualités, Patterns n’arrivait pas à rattraper le retard de Neptune en studio, n’était pas assez fort pour inciter à… fermer les yeux. Neptune fait partie de ces groupes prolifiques qui multiplient les enregistrements et surtout leur publication, plein de disques de partout, comme s’il en pleuvait, le risque de se disperser à force de choisir l’option de la surproduction. Des disques souvent bâclés et à disponibilité réduite. Il était donc vraiment temps pour Neptune de recentrer son propos et de marquer un grand coup.
C’est chose fait avec la parution de Gong Lake, album génial publié par Radium, filiale du très sérieux et très estimé label Table Of The Elements. Un éclairage nouveau sur la musique de Neptune, ce label étant distribué dans la plupart des pays civilisés (mais toujours pas disponible en duty free à Dubaï) et suscitant cet engouement assez particulier qui consiste chez certains à se procurer, de quelque façon que ce soit, toutes ses productions -tout comme les puceaux acnéiques achètent n’importe quel disque estampillé Hydra Head, les calvitiens précoces collectionnent les références Table Of The Elements/Radium sans doute à la recherche de l’alchimie musicale parfaite et mystérieuse, la formule suprême qui transforme l’électricité en musique (et inversement).
Cette chronique est donc terminée. Il a déjà été dit plus haut que Gong Lake est un album génial. Tout le reste n’est que descriptifs d’ordre technique et considérations esthétiques. Mais allons-y quand même. Neptune, cela peut faire penser à beaucoup de choses (les premiers Sonic Youth par exemple et encore, de moins en moins) mais surtout cela ne fait penser à rien. La démarche de constructeurs/démolisseurs du groupe rappelle celle d’Einsturzende Neubauten dans le registre as de la soudure improbable et de la customisation des envies. Mais la comparaison s’arrête là également, puisque Neptune (dont le seul défaut est finalement ce nom ridicule) est aussi un vrai groupe noisy.
Alternant morceaux chantés et instrumentaux, le trio sait parfaitement, sur des rythmiques jamais dégoulinantes et bien tendues, installer un parterre de grésillements et de turbulences servant d’écrin à des mélodies imparables se moquant foutrement des canons harmoniques et de la bienséance. C’est ça Neptune, cette capacité de vriller les oreilles tout en caressant la membrane du tympan dans le bon sens. Il y a toujours dans un coin un ou deux zigouigouis qui font semblant de traîner, salissures noisy dont on se demande -mais pas très longtemps- ce que le groupe attend pour les balayer alors qu’elles sont là pour apporter la couleur particulière d’une musique riche et surprises et en émerveillements. Souvent, les salissures, transformées en électrons libres, deviennent à la fois la source du bruit qui gratouille et l’élément mélodique qui chatouille, tout l’art de Neptune consistant en ce subtil dosage. Il y a quelques sommets sur Gong Lake, Grey Shallows ou Blue Grass par exemple, mais il n’y a aucune faiblesse. Décidément un disque excellent d’un groupe qui ne l’est pas moins.
lundi 7 avril 2008
Németh / Film
Il y a bien longtemps que l’on a pas eu de (bonnes) nouvelles de Radian mais réjouissons-nous : un petit tour sur la page d'accueil du site officiel du groupe autrichien permet de s’assurer qu’il bouge encore, il est même en train d’enregistrer un nouvel album qui on l’espère sera à la hauteur du fantastique Juxtaposition publié en 2004 sur Thrill Jockey. Même constat en ce qui concerne Trapist, formation aux atmosphères assez similaires quoique moins électroniques et bien plus organiques -et partageant le même batteur, Martin Brandlmayr, accompagné de Martin Siewert à la guitare et de Joe Williamson (Kletka Red) à la basse. Un groupe dont les derniers signes de vie datent également de 2004 avec l’album Ballrroom, toujours chez Thrill Jockey. Radian et Trapist ont parfaitement réussi la synthèse entre digital et rock avant-gardiste, ça sonne prétentieux mais il en est bien ainsi, surtout en ce qui concerne Radian que l’on pourrait qualifier de This Heat électronique et qui avait fait très grosse impression lors d’un concert au regretté [kafé mysik] de Lyon en mars 2003.
Stephan Németh est l’électronicien/clavier de Radian et son premier album solo, Film, vient de paraître, encore sur le label de Chicago. Il y joue de tous les instruments -guitare, synthétiseurs, percussions et programmation- avec un peu d’aide de son petit camarade Brandlmayr sur un titre ainsi que divers fields recordings empruntés à d’autres. Un peu avare en explications, Németh a tout simplement intitulé son disque Film parce que celui-ci regroupe des travaux pensés et concoctés pour des films expérimentaux et des installations sonores. Une élaboration s’étendant sur plusieurs années pouvant faire craindre un effet fourre-tout et de remplissage mais au final Film s’avère concis (la grosse demi heure), homogène et confortable. On navigue dans les mêmes eaux que Radian, c'est-à-dire une sorte de post rock digital à l’occasion très rythmique et millimétré où les mélodies ascétiques sont en concurrence permanente avec les manipulations électroniques, mais dans une veine beaucoup plus atmosphérique et gazeuse. On reste entre amis puisque le mastering est signé Martin Siewert et, pour tout dire, la très nette impression d’écouter en permanence un ersatz de Radian ne quitte pas l’auditeur tout au long de ce Film très agréable mais dilué, gentillet et sans surprises. Un disque qui permettra tout juste de tenir le coup jusqu’au prochain album des viennois.
[Comme Thrill Jockey fait très bien les choses, les albums publiés par le label sont intégralement écoutables en streaming sur son site : Film de Németh mais aussi Juxtaposition de Radian et Ballroom de Trapist -il suffit de cliquer sur la liste des titres à droite.]
dimanche 6 avril 2008
Comme à la télé : Weasel Walter et ses amis
Weasel Walter en pleine séance de touche-pipi avec ses amis Paul Harshaw (saxophone), Kristian Aspelin (guitare) et Damon Smith (contrebasse). Première partie :
Deuxième partie :
vendredi 4 avril 2008
Aleph-1
Carsten Nicolai (aka Alva Noto) n’est pas à proprement parler le musicien de musique électronique qui a révolutionné les constructions digitales à base de clics, de cuts ou de trucmuches (ses premiers travaux sur le défunt label Mille Plateaux sont largement inspirés et postérieurs à ceux d’un Ryoji Ikeda) mais il a grandement contribué à une plus large diffusion d’une musique électronique algorithmique et ascétique, notamment via son propre label, Raster-Noton, sur lequel on retrouve nombre de musiciens se situant exactement dans la même mouvance, le glitch c’est chic, et se ressemblant tous un peu trop les uns les autres : Byetone, Signal, Senking, Alva Noto en personne, Ikeda dans le rôle de la figure tutélaire… Coh (alias Ivan Pavlov) ou, dans un genre très différent, Hervé Boghossian restant eux un peu à part.
Spécialiste des objets luxieux et limités, Raster-Noton, a rapidement marqué des signes d’essoufflement, essentiellement dus à des difficultés -ou un refus ?- de se renouveler, ne serait-ce qu’un peu. Ce n’est pas le seul genre musical (et de très loin !) qui n’arrive plus à se régénérer mais le côté humain/organique en étant totalement absent, cela devient vite rédhibitoire. Rabâcher un concept musical ad vitam ne sert à rien lorsque le résultat obtenu ne débouche que sur un artefact mécanique, devenant ainsi une pièce de collection pour musée.
Spécialiste des objets luxieux et limités, Raster-Noton, a rapidement marqué des signes d’essoufflement, essentiellement dus à des difficultés -ou un refus ?- de se renouveler, ne serait-ce qu’un peu. Ce n’est pas le seul genre musical (et de très loin !) qui n’arrive plus à se régénérer mais le côté humain/organique en étant totalement absent, cela devient vite rédhibitoire. Rabâcher un concept musical ad vitam ne sert à rien lorsque le résultat obtenu ne débouche que sur un artefact mécanique, devenant ainsi une pièce de collection pour musée.
De manière emblématique, Dataplex, l’album que Ryoji Ikeda a publié en 2005 chez Raster-Noton, et même s’il reste franchement au dessus du lot, n’est qu’un bel exercice de statique musicale, c’est réussi mais c’est aussi lassant. Maître des lieux, Carsten Nicolai n’a pas fait mieux en publiant en 2006 un album très ambient bourré jusqu’à la gueule de samples glanés ici ou là dans un aéroport japonais ou un hôtel parisien, des samples rendus méconnaissables -il faut vraiment le savoir, l’avoir lu dans le livret, pour pouvoir le dire- et surtout accompagnés de nappes synthétiques d’un effet tout simplement déplorable. Un mauvais disque dès que le spectre de ces sonorités (mais comment Alva Noto les a-t-il obtnues ?!!) prennent le dessus sur les claquements et les frottements digitaux, ce qui malheureusement arrive beaucoup trop souvent.
2007 a vu la publication d’un nouveau disque sans titre de Carsten Nicolai, sous le nom d’Aleph-1 et sur le label Ideal recordings. On ne pouvait qu’espérer un sursaut de la part du musicien et, abracadabra, c’est effectivement le cas. Une similitude des pochettes pouvait faire craindre le pire mais non. Aleph-1 est un album à peine moins ambient que Xerrox, à peine plus saccadé bien qu’il fasse la part belle à des micro rythmiques. Les sonorités employées sont plutôt douces, chaudes (on pense souvent à la résonance du bois) tandis que les clics se font discrets voire sont comme étouffés dans un nuage cotonneux. Les huit plages sans titre du disque dévient très lentement, très doucement, l’effet est un peu celui d’une boite à musique qui se dérèglerait peu à peu, c’est flagrant sur le quatrième et le septième -et meilleur- titres du disque. Bizarrement il s’agit justement d’un enregistrement prenant en compte l’humanité de ses auditeurs : un disque d’accompagnement, d’endormissement (dans le bon sens du terme), un disque qui raconte et qui se raconte. C’est une grande première pour le chirurgien numérique Nicolai, c’est aussi un doux plaisir.
jeudi 3 avril 2008
Moha! c'est plus fort que toi
Il a fait beau toute la journée et le soir venu il se met à pleuvoir, exactement ce qu’il faut pour être découragé de se rendre jusqu’au quartier général de Grrrnd Zero, sis au beau milieu de l’un des trous du cul industrieux et sportif de la ville de Lyon : le quartier de Gerland. D’autant plus qu’une fois sur place, l’entrée est fermée et bien fermée, il y a trois rasés et deux barbus qui attendent déjà en se les gelant -la musique ça se mérite bordel, etc. Arrive un des membres du collectif du Grrrnd, une dizaine de coups de téléphone lui seront nécessaires avant que l’un de ses petits camarades -alors en pleine réunion/brainstorming depuis plus de trois heures, ça ne rigole pas chez les activistes- ne daigne répondre et descendre au rez-de-chaussée pour nous ouvrir. Notre Sauveur. C’est la fin des balances et j’entends du gros son qui s’échappe de l’étage, pas longtemps mais largement suffisamment pour vraiment faire envie. Ça discute avant le début du concert, étude comparative de ceux écoulés depuis la dernière quinzaine et supputations diverses et variées sur ceux à venir. Et puis aussi : les concerts à prix libres ont ils un effet incitatif ? Ne vaudrait il pas mieux également proposer la bière à prix libre ? Qui aurait une voiture avec des places de disponibles pour aller jusqu’à Saint Etienne le samedi 12 avril et assister ainsi à la dernière soirée de l’édition 2008 du festival Avatarium (avec Double Nelson, Gerda et Magik Markers) ?… On peut toujours rêver.
Je suis vraiment curieux d’entendre ce que va donner -1, duo all-stars lyonnais composé de Damien Chewbacca et de Frank Gaffer. Le premier s’installe dans la pénombre (il se plaira à y rester tout le temps du concert, ce qui n’est guère pratique pour le prendre en photo mais je crois qu’il le fait exprès), il se place derrière un micro et endosse une basse. Le second s’assoit derrière sa batterie avec sa guitare à côté de lui ainsi qu’une demi tonne de pédales d’effets avec de très jolies couleurs mais dont je suis incapable de dire ce à quoi elles vont servir. En fait si : faire des boucles et du bruit, triturer et tambouiller.
J’apprendrai par la suite que le préposé au chant et à la basse n’était ni très content de sa voix ni du son de son instrument au début du concert. Cela tombe mal parce qu’il s’agit exactement de ce qui m’a plu d’emblée, un côté martelé et cannibale, vociférant (des onomatopées peut être…) et appuyé. Le son de basse, métallique comme lorsque on récure une vieille casserole en fer blanc avec un couteau émoussé et que ça donne envie de rétracter les orteils jusqu’au fin fond des chaussures, me ravit particulièrement. La prestation du duo est une réelle surprise car elle privilégie une énergie somme toute assez binaire -un ou deux passages bruitistes au milieu, les fameuses pédales multicolores, un soupçon de free quand même juste après- avec un jeu de batterie rapide et choisissant l’efficacité, des boucles de guitares comme Franck sait si bien en faire pour son projet solo Sheik Anorak, une basse jouée aux doigts (cela me fait mal aux miens rien que de regarder) puis avec diverses baguettes. Il y a plein de bonnes idées dans -1, du boulot aussi.
Tout le matériel de Moha! est déjà tout installé, le premier groupe n’a qu’à enlever le sien pour permettre au public de s’installer plus confortablement et ce qui se remarque tout de suite c’est qu’en matière de technologies et d’appareillages mystérieux les norvégiens battent les français sans aucune pitié : une batterie, un laptop, un synthé, une guitare, des racks en veux tu en voilà, des pads, une baguette magique qui fait des drôles de grésillements (on dirait un de ces trucs luminescents de fêtes foraines que les gosses réclament à leurs parents désespérés et démissionnaires sauf que là il est tout noir et qu’il ne brille pas, c’est nul comme comparaison) ; il y a en a vraiment de partout. Il y a aussi une magnifique hache dans le plus pur style viking (?) et des lampes halogènes braquées vers le public mais éteintes pour l’instant.
Réussir à décrire la musique de Moha! signifierait que l’on arrive à suivre le duo dans ses cavalcades frénétiques : il joue très très vite, très précisément mais avec une décontraction et un ludisme bienvenus. Il y a de la double pédale, pas vraiment des blasts mais pas très loin alors je baisse les yeux, cherchant la grosse caisse -tiens, c’est vrai ça, où est la grosse caisse ? Et bien il n’y en a pas. Le double pédalier agit sur un mini caisson numérique caché derrière la hache, cela explique donc l’aspect très net et très froid des frappes. De même, les toms et les cymbales sont amplifiés, le son de toutes les percussions semble retravaillé par le laptop.
De son côté le guitariste blondinet (qui fait également partie d’Ultralyd et de Noxagt) utilise plus son clavier que sa guitare mais il arrive à alterner les deux avec une facilité déconcertante. Moha! ça joue vraiment, et en toute simplicité, une musique tarabiscotée et complexe. Au début du set les morceaux interprétés semblent être totalement composés, une mécanique parfaite et qui va aller en se huilant de plus en plus ce qui fait qu’au milieu du concert, on peut penser l’exact opposé : Moha! a l’air d’improviser librement et totalement. Nous sommes en train d’assister à une formidable déflagration. Parfois le batteur allume à fond les lampes halogènes, alors le public s’en reprend plein la gueule pour le même prix.
Quelques rares moments d’accalmies, mon voisin en profite pour terminer un plat surgelé de lasagnes en plastique, un passage atmosphérique pendant lequel Moha! joue dans le noir absolu (mais cela ne va pas durer…) et un rappel, réclamé à corps et à cris. A mon grand étonnement le groupe revient en remettre une (très) bonne couche, ce qui est plutôt rare pour ce genre de groupe. Un concert vraiment magnifique et époustouflant.
mercredi 2 avril 2008
Moha! Live!
Cela va être le moment de vérifier en concert tout le bien que l’on pense de Moha! sur disque. Le duo norvégien est de retour à Lyon (et oui, j’avais raté ça la dernière fois…) et cela se passe dans le salon de Grrrnd Zero.
Egalement au programme : -1, c’est bien le nom du groupe et il est composé de Franck Gaffer et de Damien Grange, deux hyperactifs qui semblent faire un concours de projets musicaux (SoCRaTeS, Hallux Valgus, Sheik Anorak ou Kandinsky pour le premier ; Chewbacca, Rature, Bronzy Mc Dada, 80dates pour le second), il était donc tout à fait naturel que ces deux là en viennent un jour à copuler ensemble.
mardi 1 avril 2008
Glu / Aucun But
Je pourrais faire le malin en racontant que GLU je les ai vus en concert il y a plusieurs paires d’années déjà, en final d’un F.O.C.U. (Forum Ouvert des Cultures Underground -faut pas chercher, c’est de l’humour de jeunes punks pas encore reconvertis dans la tenue de café-librairies et autres bars sans alcool pour bobos ultra concernés par l’état du monde). Un concert avec plein d’autres groupes dont je ne me rappelle même pas le nom, un concert dont j’ai été incapable de retrouver le flyer dans les boites à chaussures qui me servent de patafatras à archives et à n’importe quoi. Je me souviens juste de l’effervescence des gens des associations ou autres venus de la (F)rance entière et qui se rencontraient souvent pour la première fois (organisateurs de concerts, tourneurs, zines, radios, groupes…), je me rappelle aussi du mailorder Sugar & Spice qui s’était déplacé avec ses caisses de disques et s’était fait ce jour là des couilles en or, sale capitaliste de merde, une énième preuve que fouiller dans un bac est quand même autrement plus bandant que cliquer sur une souris.
Donc j’ai vu Glu en concert, à une époque où le groupe n’avait pondu que deux 45 tours que j’avais enregistrés sur une cassette que j’ai perdue comme tant d’autres, j’ai vu Glu en concert avant que le groupe ne disparaisse de la circulation et je ne m’en souviens absolument pas, l’insulte suprême : soit je dormais déjà (la fatigue de cette folle journée, se faire chier tout l’après midi à tenir un stand qui intéresse personne, je ne connais rien de pire…), soit j’étais déjà parti, ce qui revient au même.
Donc j’ai vu Glu en concert, à une époque où le groupe n’avait pondu que deux 45 tours que j’avais enregistrés sur une cassette que j’ai perdue comme tant d’autres, j’ai vu Glu en concert avant que le groupe ne disparaisse de la circulation et je ne m’en souviens absolument pas, l’insulte suprême : soit je dormais déjà (la fatigue de cette folle journée, se faire chier tout l’après midi à tenir un stand qui intéresse personne, je ne connais rien de pire…), soit j’étais déjà parti, ce qui revient au même.
Pourtant on ne peut pas oublier la musique de Glu -désormais immortalisée sous la forme d’un CD, Aucun But, qui marque le retour du groupe aux affaires- que ce soit dans sa formule complète, avec section rythmique, que dans sa forme primitive et épurée avec juste les deux guitares qui hurlent et la voix qui hurle encore plus fort des textes d’une noirceur et d’une crudité que l’on ne peut que se prendre dans la gueule, sans avoir à chercher ailleurs ce qu’ils peuvent bien raconter. Extrait : le sac sur le tête/me fait survivre/le sac sur le tête/me remplit de joie/le sac sur la tête/ne plus voir personne/le sac sur la tête/enfin libéré. C’est du brutal. Je veux vivre dans ta tête déclame également Gros Pierre -moi, non, je ne veux pas.
Question musique, on est au diapason : d’un côté une guitare qui balance des rythmiques ultra noise et lourde (avec un petit côté Unsane, façon je t’écrase et je jouis) et de l’autre une autre guitare saturée d’effets -fabriqués à la maison d’après ce que j’ai compris- dont le seul but est de réduire en miettes ce qui reste d’humain chez l’auditeur. Le malaise obtenu est purement obsédant. Glu c’est le catalogue de la haine des autres, de la haine de soi, de la haine de la vie absurde, consumériste, vaine, dirigée, canalisée, programmée. Trop de merde dans mon corps/il faudra tout vider/et vite : c’est exactement ce que fait Glu sur Aucun But, vomir, chier, se purger parce que ça fait du bien tout en sachant pertinemment qu’il faudra quand même recommencer toujours et encore, dégueuler, baiser avec la brutalité, ne plus se faire mettre par elle ne serait ce que le court instant d’une chanson. Torture/le bâillon sur la gueule/torture/dans le sens du poil/torture/valeur fortifiante/torture/ce cocon rassurant.
Aucun But est sorti sur Rekin records, le propre label de Glu, autoproduction que l’on peut se procurer en le demandant poliment pour la modique somme de 12 euros, port compris. Sinon, pour égayer un chouïa cette chronique, on peut toujours essayer de rigoler en lisant une interview débile télécharchable en pdf et réalisée par PPPzine, encore un grand malade.
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