lundi 8 avril 2013

Cortez / Phœbus




Il fallait s’y attendre, c’était écrit en toutes lettres, des lettres de feu brulant/martyrisant les chairs et réduisant toutes formes de résistance : CORTEZ n’allait certainement pas en rester là après la publication, à l’automne 2012, d’un magnifique split en compagnie de Plebeian Grandstand. Un véritable coup de semonce et, plus qu’un avertissement, la promesse – désormais tenue –  de grandes choses à venir, des choses inévitables, véritablement folles et peut-être même foncièrement dangereuses.
La suite de ce retour aux affaires aussi inespéré* qu’explosif de Cortez n’est rien de moins qu’un véritable album, dix nouvelles compositions chargées de lave incandescente et de lumière noire. Phœbus – c’est le titre de ce nouvel album, un titre peut-être un rien pompeux mais a postériori cela semblait plus que nécessaire – ne laisse pas grand-chose au hasard ou plutôt voilà un disque qui ne souffre d’aucune faiblesse. Le vocable musclé et les images terroristes généralement utilisés pour exprimer les premières impressions laissées par ce rouleau compresseur peuvent faire peur mais ne nous y méprenons pas : Phœbus n’est pas un disque à la violence optimale mais factice, il ne s’agit pas non plus d’une démonstration de force et de complexité s’apparentant au plaisir de la torture inutile ; Phœbus au contraire et malgré toute sa violence et toute sa dureté, est un disque salutaire et, disons-le simplement, d’une beauté infinie.
Cette beauté Cortez la tire véritablement et intrinsèquement de toute la puissance trouble de sa musique ; on imagine que l’accouchement n’a pas du être sans douleur et, aujourd’hui encore, après avoir maintes et maintes fois écouté un disque dont on est encore très loin d’avoir fait le tour complet, il est toujours difficile de faire coller les mots justes à la cascade de frissons (parfois contradictoires et en tous les cas pas loin d’être bouleversants) qui nous assaillent alors. Cortez se définit également lui-même comme un trio jouant du hardcore : on ne peut définitivement pas enlever au groupe la justesse d’une appellation désormais trop souvent dévoyée par tant d’autres mais qui ici en réfère autant à la violence brute qu’à la sincérité et à l’engagement.
Mais Phœbus est surtout un album fleuve, qui ne peut que s’écouter d’une seule traite, une créature moitié mécanique et moitié organique, aussi monstrueuse mais aussi attachante que tout être humain, un album dont le but n’est pourtant pas de nous annihiler, une tornade qui pourtant ne nous fera pas totalement suffoquer ou – plus exactement – puisque Phœbus sait par ailleurs user de toute sa faculté pour terrasser, araser, tout détruire sans rien laisser au hasard, personne ne pourra non plus reprocher à ce disque aussi désespéré que flamboyant de ne pas nous prendre, tous autant que nous sommes, dans ses bras : on est malmenés, on est effrayés, comme perdus, on a froid mais Phœbus c’est aussi cette illumination qui nous rattrape et qui ne nous lâche plus, une lueur incandescente là bas tout au loin et qui finit par nous éclairer, nous aussi.

[Phœbus existe en double 12’ vinyle et en CD ; Phœbus est publié par les mêmes labels qui s’étaient précédemment occupés de la sortie du split avec Plebeian Grandstand, à savoir Basement Apes, Get A Life ! et Throatruiner records – mais cette fois-ci ils ont été épaulés par Lost Pilgrims records, un nouveau label dont Phœbus est la première référence et monté par Dadoo et Géraud, respectivement chanteur et batteur de Verdun]

* Initial, le premier album, date déjà de 2005… avez-vous réécouté ce disque ? eh bien vous devriez le faire