HORSEBACK
est une une sorte d’ovni métallisé et arty lancé à la face du petit monde des
hipsters et des branleurs pour lesquels les termes de black metal, de doom et
de drone sont synonymes de nec plus ultra en matière d’ésotérisme musical à
vocation expérimentale. The Invisible
Mountain était plus qu’une bonne surprise, presque un choc ; The Gordon Tongue, jouant la carte
de la différence avec son prédécesseur, confirmait malgré tout tout le bien que
l’on pensait du groupe de Jenks Miller ; seul A Throne Without A King en
collaboration avec les affreux Pyramids est apparu comme une impardonnable zone
d’ombre entachant un parcours encore limité mais que l’on osait jusque là espérer
sans faute de goût.
Alors la seule chose dont on peut être certain au sujet
de Horseback/Jenks Miller c’est que le bonhomme a cette volonté de ne pas se
répéter à tout prix. Les trois premiers disques de Horseback ne sont réellement
liés entre eux que par le nom du groupe imprimé sur la pochette et l’engouement
arty-prout qu’ils suscitent toujours. Il en va de même avec Half Blood, nouvel enregistrement
d’Horseback publié par Relapse records
au début du mois de mai 2012. Un album qui plus que jamais plaira aux métalleux
à mèche et à lunettes.
Half Blood
se divise distinctement en deux parties. La première, composée de quatre
titres, dévoile une inspiration bluesy/americana/roots un rien apprêtée ;
la seconde, clairement définie comme telle sous l’appellation d’Hallucigenia, est plus difficile à
cerner et plus ambient/expé. Si on aime Half
Blood c’est d’abord pour cette première partie et les titres Mithras, Ahriman et Arjuna tous calqués
sur à peu près le même modèle c'est-à-dire un riff tournoyant, une rythmique mid-tempo
et inamovible, quelques soli de guitare façon tronçonneuse au clair de lune et
un chant de troll shooté au sirop expectorant et au suppositoire à la codéine –
une démarche minimaliste et répétitive qui n’est pas sans rappeler celle qu’Hallowed
Butchery avait tenté avec le titre Hexagram :
The God Of Self sur le split Songs Of Self Reliance And Solitude As
Performed By The Austrasian Goat And Hallowed Butchery. La musique de
Horseback se révèle toutefois beaucoup plus mélancolique que malsaine et le
semi instrumental Inheritance (The
Changeling) fait souffler un très agréable vent post tempête dans les
forêts du grand nord. Que la lumière soit.
La lumière, ce pourrait être les trois parties d’Hallucigenia, longue suite très
cinématographique et spectrale qui ne fera vraiment peur qu’aux aficionados du Seigneur Des Anneaux et autres
diableries préadolescentes. Sur cette seconde partie Half Blood déçoit un peu, d’autant plus que l’on pressent que Jenks
Miller aurait voulu que celle-ci soit la pièce centrale de son nouveau disque.
On apprécie le tour de main, on se rappelle nos plus belles années gothiques et/ou
nos premiers émois kraut mais on n’est pas plus emballés que ça, comme si on
regardait un film de vampires marketé pour jeunes gens beaucoup trop romantiques et dans lequel les
créatures de la nuit seraient tout sauf sanguinaires, violentes, sexuelles,
sadiques, torturées, ambivalentes et destructrices quoiqu’il arrive. Keine Schönheit Ohne Gefahr murmurait Blixa Bargeld
sur l’un des plus beaux titres d’Einsturzende Neubauten : « pas de
beauté sans danger », c’est très exactement le gros problème du
triptyque Hallucigenia. Tant pis.