Ce n’est que maintenant que je m’aperçois qu’il y a un très grand absent dans le Top Of The Dope 2011, hit-parade de bon goût concocté par 666rpm. Ce grand absent c’est VAZ et le cinquième album du groupe, Chartreuse Bull. Enfin… le cinquième ou le quatrième LP du groupe, tout dépend de comment on compte : on peut en effet toujours attendre que Narnack records se décide un jour à publier Pink Confetti, un album entier enregistré il y a plus de quatre ans mais que l’on peut facilement dénicher en version mp3 low fidelity en cherchant, même mollement, sur internet. D’ailleurs les concerts que Vaz avaient donnés à cette époque (2007) – avec un étonnant line-up à trois guitaristes – nous font parfois regretter ce trou noir dans la discographie du groupe…
Le pire est que Chartreuse Bull a bien failli subir le même sort que Pink Confetti puisqu’il n’a d’abord été disponible qu’en streaming avant de bénéficier d’une ridicule publication en cassette et à tirage très limité. Bande de hipsters de merde. Puis, presque miraculeusement, le label Sleeping Giant Glossolalia a décidé de sortir l’album sous un format enfin à sa hauteur, en vrai et surtout en vinyle. Fétichiste un jour, fétichiste toujours.
Heureusement Chartreuse Bull rattrape le temps perdu et efface la période représentée par le troisième album The Lie That Matches The Furniture puis par le fantôme Pink Confetti – deux disques beaucoup plus « pop » et avec quelques relents dark un peu kitsch, souvent décriés par quelques détracteurs mais qu’ici on aime bien quand-même. Et surtout Chartreuse Bull permet à Vaz de revenir du côté de son premier album Demonstrations In Micronesia, le meilleur aussi. Le meilleur mais peut être pas pour très longtemps car sur Chartreuse Bull la paire Paul Erickson aka Apollo Liftoff/Jeff Mooridian (ils sont accompagnés d’un nouveau guitariste en la personne de Tyler Nolan) semble au sommet de sa créativité et de sa hargne.
On a toujours aimé chez Vaz le mélange entre évidence mélodique – souvent assurée par le chant – et incandescence et chaos de la musique, un mélange hérité de l’époque où Erickson et Mooridian officiaient encore au sein du génial Hammerhead. Et du Hammerhead on en trouve des tonnes sur Chartreuse Bull, bien plus que Vaz ne nous en avait jamais offert, y compris sur Demonstrations In Micronesia. Le mimétisme est plus que troublant, il est souvent évident et toujours imparable : après tout, ces deux là en ont parfaitement et légitimement le droit. On prend donc Chartreuse Bull et ce Vaz « nouvelle formule » comme la suite logique et heureuse d’Hammerhead, surtout des albums Ethereal Killer et Into The Vortex. Des compositions qui prennent des tournures irrésistibles et qui en même temps vous mordent jusqu’au sang. Des riffs incroyables, des breaks incandescents, des plans de batterie de malade, un chant impérial. Derrière un son sombre et crade – Ben Goldberg de Zs a assuré l’enregistrement – jaillissent ces fulgurances entêtantes qui ne peuvent que donner envie de fondre sur place. Je crois que je pourrais écouter des titres tels que The 2nd ou Clone Theory une journée entière sans me lasser, à en devenir presque totalement fou.