Voilà enfin The Horror, le premier véritable album de Pop. 1280*, groupe originaire de New-York. S’il y a une première chose à retenir de ce disque, c’est qu’à la différence de son prédécesseur The Grid EP, ce nouvel enregistrement ne propose pas réellement de megatubes ultra post punk et robotiques du même niveau que Step Into The Grid. Je m’explique. Malgré le côté excellent et irrésistible de Step Into The Grid, sa capacité à faire frétiller les mèches rebelles et les quenelles empaquetées dans du jean 100% slim, ce titre phare écrasait un peu trop les cinq autres compositions d’un mini album qui souffrait par ailleurs de baisses de régime certaines. Pop. 1280 n’était qu’un bon groupe mais un groupe inégal. Voire uniquement un groupe à singles.
Avec The Horror il y a beaucoup moins d’hésitations à avoir : les dix nouveaux titres présentés ici laissent une impression d’homogénéité et de cohérence qui pouvait manquer à Pop. 1280 jusqu’à présent. L’effort est évident et le résultat probant. The Horror est le premier disque de 2012 dont on se plait déjà à imaginer qu’il pourrait nous accompagner tout au long de cette année, jusqu’à en devenir l’un des repères incontournables. D’ailleurs il n’y a pas un jour sans qu’il passe au moins une fois dans le mange-disques collectif de 666rpm, c’est dire.
On parle d’homogénéité et de cohérence à propos de The Horror mais il faut davantage le comprendre à un niveau qualitatif que stylistique car, on le répète, il n’y a aucun trou d’air sur ce disque, aucun titre dont on souhaiterait qu’il en soit retranché. On reste au contraire admiratif du résultat parce que Pop. 1280 multiplie les influences certes évidentes mais bien digérées et en dévoile même quelques nouvelles. On pense à Burn The Worm qui réveille à merveille les vieux fantômes d’un Cop Shoot Cop version Release ou au très étonnant Hang ‘Em High et de ses forts relents de Birthday Party. Pour le reste le post punk est très généralement le crédo inaltérable de Pop. 1280 : la référence aux Stranglers pourrait paraitre évidente à cause de la présence de synthétiseurs mais il n’y a jamais aucun solo de synthé chez Pop. 1280 ; la référence à The Fall me semble plus juste bien que la musique des américains soit bien plus violente que celle des anglais. La violence, la noirceur, le tribalisme, le caractère urbain, industriel et glacial de la musique de Pop. 1280 est même ce qui ressort avec le plus d’âpreté de The Horror dont l’écoute bascule peu à peu dans des sentiments assez contradictoires entre attirance chaotique et piqure vénéneuse. Mieux, Pop. 1280 maitrise désormais parfaitement les rythmes lents – c’était l’un des points faibles du groupe – et avec des titres tels que Cyclotron ou Beg Like A Human invite l’effroi dans sa musique. Un grand cru et un disque publié en LP et CD par Sacred Bones records.
* alors ce n’est peut-être pas très important mais il y a un point après le « p » et un espace avant le « 1 » – tout ça pour dire que je ne pourrai jamais me faire à un nom de groupe aussi ridicule et que ce nom soit une référence littéraire ne change rien à l’affaire (un bouquin de Jim Thompson curieusement publié en français sous le titre de 1275 Âmes)