Peut-on tout pardonner à Scott McCloud ? Voilà… c’est à peu près toujours la même rengaine : on a passionnément aimé tel ou tel groupe dans notre jeunesse et forcément, presque fatalement, on déteste ce que certains de ses (anciens) membres sont devenus et la musique qu’ils jouent désormais. En l’occurrence il s’agit ici de Girls Against Boys – le groupe existerait toujours, à l’état de veille – et de Paramount Styles, le groupe actuel de Scott McCloud, ci devant chanteur et guitariste de GvsB. L’histoire se veut tellement simple et banalement prévisible qu’elle mérite pourtant quelques mises au point : même si on retrouve également le batteur Alexis Flessig dans le line-up de Paramount Styles, il ne sert strictement à rien de comparer les deux groupes. Et parce qu’on est très polis et bien élevés on n’ira pas jusqu’à traiter d’imbéciles celles et ceux qui le font mais le cœur y est. Evitons la confusion des genres et attelons nous à ce Heaven’s Alright, deuxième album de Paramount Styles, publié à l’automne 2010.
Avec Paramount Styles Scott McCloud réalise sans doute quelques vieux rêves, s’adonnant à un songwriting centré sur des mélodies simples et sa voix chaude et suave. Notre homme se paye même le luxe de s’accompagner d’une guitare acoustique et qui a déjà vu Paramount Styles en concert sait que Scott McCloud joue assis, perché sur un haut tabouret, comme tant de chanteurs américains de folk, de country et de pop l’ont fait avant lui. Derrière un groupe efficace assure l’écrin de velours qui sied parfaitement aux compositions et à la voix du monsieur.
Les américains ont des termes extrêmement réducteurs et déplaisants pour désigner la musique que joue Paramount Styles : soft rock, adult rock… j’en passe et des meilleurs. Il est vrai que Scott McCloud s’inscrit dans une veine qui irait de Bob Dylan à Neil Young en passant par Bruce Springsteen ou Lou Reed. Mais il est surtout évident que, contrairement à tous ces artistes mainstream et en pilotage automatique, Scott McCloud/Paramount Styles a encore quelque chose à proposer, écrivant de subtiles compositions la plupart mid tempo, très arrangées (les cordes sur Take Care Of Me et The Girls Of Prague), d’une énergie trainante (Amsterdam Again, White Palaces), des balades somptueuses (Steal Your Life), des titres que l’on dirait taillés pour les voyages (Give Us Some Time, Desire Is Not Enough) ou des appels vibrants (le magnifique The Girls Of Prague ou Come To Where You Are, ici dans une version enregistrée en concert et particulièrement réussie). Il n’y a guère que The Greatest, trop évidemment calibré pour être un tube et pour passer dans les college radio US, qui embarrasse l’écoute de Heaven’s Alright d’un doute quelconque.
Et par-dessus tout il y a cette voix que l’on a déjà évoquée et cette façon de chanter, addictive et résumant très bien ce que Scott McCloud déclarait il y a de nombreuses années lors d’interviews données afin d’assurer la promotion de l’album Cruise Yourself de Girls Against Boys : il avouait que ce qu’il préférait c’était conduire en voiture pendant des heures, souvent au hasard, pour écouter de la musique en même temps. Avec Heaven’s Alright (et son prédécesseur Failure American Style) il a sans doute réalisé ce dernier rêve, celui d’une musique qui l’accompagne et nous accompagne aussi, où qu’il aille et où que nous allions. Sa musique.
Bien que sa parution remonte déjà à presque une année, Heaven’s Alright reste d’actualité puisque Paramount Styles le défendra lors d’une tournée européenne, de la fin septembre à début octobre, et avec un passage lyonnais au Sonic le 1er octobre. On ne saurait trop vous répéter que Scott McLoud en concert ce n’est vraiment pas n’importe qui et que son charisme reste inégalé.