C’est dimanche et on s’emmerde. Lorsque j’ai reçu ce charmant mail me proposant de chroniquer le disque d’un groupe dont je n’avais encore jamais entendu parlé jusqu’ici, j’ai fort lâchement choisi de ne pas y répondre, me disant que mon correspondant finirait bien par comprendre, qu’il serait sûrement en colère mais qu’il laisserait tomber. Pas de chronique. Rien. Et puis il a insisté le bougre. J’aurais préféré qu’il m’envoie un chèque libellé en euros avec plein de chiffres dessus – mais surtout pas de virgule – mais, non, il m’a directement envoyé le disque de son groupe avec un petit mot très enthousiaste qui disait « Bon, j’ai pas pu attendre ta réponse par mail alors je t’envoie notre CD autoproduit en espérant qu’il te plaise et qu’on peut espérer une chronique ». J’étais bel et bien pris à mon propre piège.
C’est en réécoutant – sur un vrai disque cette fois, pas des mp3 pourris via un site communautaire – la musique de Lilidollrage que j’ai décidé de chroniquer ce Horror Songs, premier album complètement autoproduit (donc) du groupe. Oui, moi aussi je déteste ce nom qui transpire à juste titre une certaine naïveté rock’n’roll. Oui l’illustration de la pochette du digipak laisse à désirer. Oui, Sandra (guitare et chant) et Serge (batterie/basse) se sont sûrement trompés de personne (et d’espoir) en m’adressant leur disque mais voilà, leur punk’n’roll primitif, loin de me faire grimper aux rideaux en compagnie de mon amazone préférée, me parle quand même quelque peu parce que Lilidollrage convoque le temps des huit compositions de Horror Songs certaines bonnes choses : du rock’n’roll donc, du garage, un quelque chose des Cramps, un peu de la bête à cornes australienne, une énergie et une immédiateté forcément nécessaires lorsqu’on veut jouer une musique aussi instinctive que directe. De ce côté-là, c’est plutôt réussi.
Il est ainsi plutôt difficile de rester sourd face à la vindicte, même si elle est aussi le pendant d’un musique un rien simpliste, d’un Horror Song ou d’un My Lady aussi survitaminés qu’enflammés. Mais là où Lilidollrage tendrait à exploser les compteurs, c’est lorsque le duo ralentit la cadence, graisse les rouages de sa musique à l’aide du brouillard suintant d’un marécage hanté et prend des allures un rien plus goth. Sur At Dawn le chant prend alors plus d’ampleur, rappelant quelques lointaines intonations à la Siouxsie.
Outre l’interprétation – car on ne peut pas dire qu’ici ça ne joue pas, précisément et généreusement – ce disque possède une autre qualité : le son et l’enregistrement. Assuré par le groupe lui-même, celui-ci est à la hauteur, appuyant là où il faut, comme il faut. Evidemment on constate une mise en relief trop flagrante de la voix mais aussi un bon gros son de guitare et tout ce qui va bien pour attirer l’oreille sans provoquer l’écœurement.