mardi 2 novembre 2010

Les Yeux De La Tête / Nerf




















Il s’en est vraiment fallu de peu pour que ce disque soit une petite déception. Mais à quoi donc est ce que je m’attendais ? Certainement pas à quelque chose d’aussi posé et d’aussi carré que cet album intitulé Nerf et publié conjointement par Head records et Rude Awakening. Je m’explique : Les Yeux De La Tête* est le nom d’un trio saxophone/basse/batterie. N’allez pas croire que ces garçons – dont je n’avais jamais rien écouté auparavant, il semblerait que Nerf soit déjà leur quatrième album – pratiquent l’impro libre, le free jazz ou même le jazz bon teint, non Les Yeux De La Tête est un groupe supérieurement rock ET jazz qui lorgne que très rarement du côté des grinderies à la Naked City et c’est tant mieux (mais ça arrive, comme sur Criquet 2).
Cette stature et cet aplomb, Les Yeux De La Tête l’obtiennent grâce à une rythmique imparable d’efficacité. Le couple basse/batterie fait moult merveilles, vous assomme de puissance et de rage mais il s’agit toujours d’une puissance et d’une rage millimétrées et particulièrement bien en place. C’est bien simple, on pense plus d’une fois à tous ces groupes de l’école Touch & Go des 90’s alors que le son épais et le jeu de basse n’y sont probablement pas pour rien, entre pilonnage (FyyFF, Don Khon et Barghest) et swing gras (Le Grand Martin QueQuoi, excellent, ou Psy Op).
La machine est particulièrement bien huilé, carbure à son maximum – y compris sur les passages vraiment lent et lourd (Belgharvhal) – et impose une discipline de fer à laquelle personne ne peut échapper. C’est sur cette rythmique que vient se poser le saxophoniste. Celui-ci abuse de mélodies simples pour ne pas dire naïves mais faciles à retenir. Il ne déborde que très rarement, assumant à la fois le rôle d’un chanteur nerveux et d’un guitariste circonspect, se contentant (si je puis dire) avec ses mélodies et ses accroches d’être au service des compositions du groupe et de sa musique (c’est vraiment flagrant sur Maître Moulard) et ne cédant jamais à la tentation de les vampiriser. Plus qu’un disque de freeture psychopathe ** ou de grind intello pour insectes omnivores ***, Nerf est donc un album qui préfère vous hypnotiser, pénétrer votre petit crane et vous écraser. Chouette programme.

* OK, le nom du groupe n’est pas génial, on dirait un énième rejeton de la scène franchouillarde post alterno et héritier des Négresses Vertes, la preuve
** pour cela écoutez plutôt les géniaux Little Women et leur album Throat
*** quand on bouffe de tout on finit forcément par bouffer de la merde