jeudi 17 septembre 2009

Kongh / Shadows Of The Shapeless























Ce disque a bien failli terminer sa courte existence de produit consommable dans la poubelle à mp3 d’où je pensais alors qu’il n’aurait jamais du sortir. Ce disque, Shadows Of The Shapeless, c’est le deuxième long format de Kongh, trio suédois œuvrant dans le post hard core neuronal et dont le premier album avait fini par me séduire, à tel point que je l’ai même écouté plusieurs fois depuis sa parution il y a deux ans, si si. Que des bons souvenirs. C’est encore Trust No One Recordings qui s’y colle pour ce Shadows Of The Shapeless à l’artwork plus que douteux : des fonds marins avec petits poissons pleins d’amour tendre et bancs de corail en voie de disparition, le tout passé au filtre rouge grâce à un logiciel limité installé sur un ordinateur déficient. Oui, c’est pas terrible terrible mais c’est la musique qui compte, non ?
Oui c’est la musique qui compte et là, patatras ! Dans le genre dans lequel officie Kongh, la limite entre l’éclat de lumière et l’ennui opaque est parfois ténue. Combien de milliers de clones insipides et calculateurs pour un seul héritier un tant soit peu original et imaginatif - diantre ! - de Neurosis ? Comme chacun sait, les clones sont des enfants parfaits, propres sur eux et trop bien élevés, j’ai donc toujours préféré les bâtards. Mais le problème de Shadows Of The Shapeless n’est pas exactement là. Oui on pense forcément à Neurosis en écoutant ce disque mais ce n’est pas la raison principale qui a motivé le rejet de ce disque au début de l’été. L’été, saison maudite pour les musiques lourdes et poisseuses et qui ne m’a pas incité à relancer la machine à musique pour redécouvrir ce gros pavé (Cinq titres, cinquante sept minutes) de metal pachydermique. Autant dire que Shadows Of The Shapeless a failli être victime de la canicule 2009 car je n’ai toujours pas installé l’air conditionné ici -extract, extirpate/extract, eliminate).
Ce qui peut choquer ou perturber à l’écoute de ce nouvel album, c’est qu’il est moins dense que son prédécesseur : là où Counting Heartbeats pouvait faire penser aux moments les plus lents et les plus lourds et sludge d’un Black Cobra, Shadows Of The Shapeless prend davantage la tangente du côté des seventies, ambiances magnétiques d’un heavy metal préhistorique. Entre le premier titre vraiment impressionnant de violence (Unholy Water) et le final dantesque du morceau titre, Kongh relâche la tension avec passages aérés - l’intro d’Essence Asunder en forme de Tortoise caribéen - et chant moins monolithique, moins viking en rut s’entraînant pour le concours annuel mondial de biroute hardcore et piquer définitivement le titre au chanteur de Kickback. Même méthode c’est vrai que pour Counting Heartbeats mais avec plus de fourmillement, d’éparpillement, moins d’intransigeance et plus de weed bien grasse dans les tuyaux, c’est l’effet petits poissons agiles sur fonds marins rouges. Shadows Of The Shapeless prend donc son temps et il le prend tellement bien qu’il paraît bien plus long que son prédécesseur alors qu’il dure dix minutes de moins. Mais il est bien plus varié, plus audacieux, s’il se perd un peu en route il retrouve rapidement (si on peut dire) son chemin. L’équilibre fragile qui faisait de Counting Heartbeats un bon disque avait un côté inexplicable et mystérieux. Celui qui prévaut dans Shadows Of The Shapeless l’est tout autant. Kongh, groupe bâtard de l’année.

…Et depuis la fin de l’été la version double LP de Counting Heartbeats est disponible grâce à Music Fear Satan : deux galettes fondues dans un vinyle rouge transparent du meilleur effet et emballées dans une pochette gatefold rendant l’artwork un peu plus supportable. Encore du bon boulot de la part de ce label parisien également mailorder incontournable.