mardi 8 septembre 2009

Greymachine / Disconnected























Voici donc Disconnected, premier album de Greymachine après un maxi disons prometteur. La nouvelle bête immonde inventée par Justin Broadrick va-t-elle redorer le blason d’un musicien en perte de vitesse avec son projet principal (Jesu) ? Dans le rôle du nouveau messie et d’équipier de luxe, Aaron Turner, tête de gondole d’un groupe très rarement apprécié ici (oui, je parle effectivement d’Isis) et boss d’un label qui a eu plus d’une excellente sortie à son actif (Hydra Head, faut il le rappeler ?). C’est d’ailleurs sur ce label que parait Disconnected, huit titres métalliques et poisseux au compteur. Et dès les premières mesures de Wolf At The Door l’amateur a la certitude que Broadrick a repris ses esprits, fini les niaiseries et le shoegaze de garçonnet acnéique, le son de la basse rappelle les meilleurs moments de Godflesh, celui de Streetcleaner, les rythmes sont implacables -ici que des boites à rythmes- et les guitares sont carnassières.
A tel point que Disconnected souffre du même syndrome que Celan, le dernier groupe en date de Chris Spencer d’Unsane : le new-yorkais semble incapable de faire de la musique un tant soit peu différente de celle d’Unsane et ce quels que soient les musiciens qui jouent avec lui -en l’occurrence Nico Wenner d’Oxbow ou un membre d’Einsturzende Neubauten. De même avec Greymachine, on ne reconnaît principalement que la patte de Justin Broadrick. A quoi sert donc Aaron Turner ? A rien, une fois de plus, serais je tenté de répondre si j’étais juste méchamment imbécile mais comme en plus j’ai toujours pensé que la pitié est le sentiment des faibles, je risque bien de manquer de mots assez durs. Le son de guitare d’Aaron Turner se remarque toutefois à quelques occasions, sur When Attention Just Isn’t Enough par exemple. Est-ce lui aussi qui est responsable de cette guitare très élastique qui orne l’excellent Wasted (titre que l’on croirait échappé de Life In The House Of The Enemy, premier album de feu Cable Regime) ? Le problème identitaire ne se pose par contre pas à propos des deux autres membres de Greymachine : Diarmuid Dalton tenait la basse au sein de Cable Regime (nous y revoilà) et de nos jours collabore aussi à Jesu tandis que Dave Cochran a fait ses armes avec Head Of David puis God/Ice et connaît actuellement moins de réussite avec Transitional. La même famille de musicien que le Broadrick en chef, en résumé. En résumé aussi : Turner s’est fait bouffer par les trois autres.
Tout ceci ne nous dit pas si Disconnected est un bon disque. Il en est un assurément. Pourtant il n’est pas exempt de défauts : tous les titres se ressemblent et certains ne paraissent au passage pas totalement aboutis (les trois derniers, Just Breathing, Sweatshop et Easy Pickings sont tout simplement poussifs). Cela fait beaucoup pour un disque qui marche allègrement sur les platebandes de Godflesh et de God -on s’attend toujours à entendre débarquer Kevin Martin et son saxophone de dément pour un featuring total free ce qui donnerait un peu plus de couleur et de piquant à un disque un peu trop monotone. Mais on est tellement content de retrouver le Justin Broadrick que l’on a tant aimé que l’on veut bien fermer les yeux. Prenons Disconnected pour une esquisse d’un futur album qui ne pourra être que meilleur si tout ce beau monde s’en donne réellement la peine (Aaron ?).

[l’album est écoutable intégralement en streaming ici]