vendredi 30 novembre 2012

Jello Biafra And The Guantanamo School Of Medicine / Shock-U-Py!



De la politique, toujours. Jello Biafra est une exception qui confirme la règle : si ses textes, éminemment  politiques, ont parfois autant de portée c’est parce il prend ce parti-pris génial et vicieux de se mettre dans la peau du salaud et, surtout, parce que l’ironie dont il fait systématiquement preuve et les sarcasmes qu’il manie comme personne le protège en partie des effets néfastes de l’exemplarité moraliste. Autrement dit Biafra n’accuse pas directement (comme un Crass et tous ces anarchopunks plus ou moins inspirés) mais nous met violemment la gueule dans notre merde, nous fait ressentir le niveau de putréfaction ou d’ignominie de ce qu’il veut en fait dénoncer mais il nous laisse en tirer les conséquences qui s’imposent, uniquement par nous-mêmes.
Biafra est souvent accusé d’être en fait un grand manipulateur, conscient de son pouvoir d’orateur et de chanteur, adulés par ses fans, tout comme il a été littéralement haï par les classes dirigeantes américaines… Est-ce toujours le cas ? Si seulement son discours pouvait encore rencontrer le moindre écho dans les médias américains verrouillés et pouvait encore vraiment déranger qui que ce soit – lorsque Biafra a fait de la prison au milieu des années 80 ce n’était pas pour le caractère corrosif de ses textes mais, fort hypocritement, pour des raisons détournées (« appel à la pornographie », suite à l’utilisation du Penis Landscape de H.R. Giger dans l’insert de l’album Frankenchrist des Dead Kennedys) mais ça c’était il y a bien longtemps. Par contre si le terme de « gauche » pouvait encore avoir un sens, surtout aux Etats-Unis, il s’appliquerait à Biafra et non pas aux sociaux démocrates tièdes et pro capital du parti démocrate américain de Barack Obama (R.I.P.). 




Mais Jello Biafra est nettement moins convaincant et nettement moins drôle lorsque ses chansons protestataires retrouvent les chemins de la revendication directe ; c’est exactement le cas de ce Shock-U-Py!, face A et titre du dernier mini album en date de JELLO BIAFRA AND THE GUANTANAMO SCHOOL OF MEDICINE. Un titre – en référence au mouvement Occupy Wall Street – qui résonne comme un slogan pour une composition tout juste honorable. Grosse fatigue ? Enjeu trop important et hors de portée de la verve de monsieur Biafra, pourtant rompu à tous les exercices ? Qu’importe… sans être vraiment indispensable Shock-U-Py! ne restera pas non plus dans les annales.
En face B on trouve deux titres annoncés comme inédits : du moins c’est ce que précise l’autocollant décorant la pochette du disque, lequel nous précise en même temps que Jello Biafra et ses amis publieront un album en 2013 (pour l’instant intitulé White People And The Damage Done). Barackstar O’Bummer, dont le titre laisse clairement entendre les sentiments que Biafra porte à Obama, est – musicalement – plus impressionnant que le tube Shock-U-Py! et on s’en contentera donc ; puis vient We Occupy, un titre enregistré cette fois par Jello Biafra et les canadiens de D.O.A. et déjà précédemment publié sur un single de ces derniers, il y a quelques mois. Pour faire simple disons que We Occupy, encore plus mauvais que du Rancid, ne restera pas non plus dans les mémoires comme ce moment de bravoure punk, tendancieuse et subversive qu’il aurait du être. Plouf. En espérant que l’album annoncé de Jello Biafra And The Guantanamo School Of Medicine nous réserve de bien meilleures surprises…

Shock-U-Py! est publié en 10’ et en CD par Alternative Tentacles (bien sûr). Le coupon de téléchargement mp3 inclus avec la version vinyle propose en outre un mix différent et sans intérêt du morceau titre.