lundi 14 décembre 2009

Classic American Style























Quoi ? Comment ? Presque trois semaines sans un seul concert ? Mais que se passe t-il ? La vérité, c’est que concert il y eut bien mais qu’il aurait été bien trop difficile de raconter le plus sérieusement du monde ce qui s’est très exactement passé à celui-ci. J’essaie quand même ? Allez. Manu Holterbach est venu les mains dans les poches mais avec un CD, se contentant d’une diffusion de trois pièces de musique acousmatique avec explications de texte et didactisme d’intello en guise de présentation (on se serait cru à une conférence organisée par Peuple Et Culture) et fermant les yeux dans une attitude quasiment religieuse pour écouter ses propres oeuvres (sans grand intérêt en plus, quel baratin à propos d’un son de pompe à chaleur créant des harmoniques si… passionnantes). On rajoute un David Maranha (Osso Exotico, un bon groupe pourtant), incapable avec son compère de décoller son doigt de la première touche de synthétiseur sur laquelle il avait décidé d’appuyer ce soir là. Une expérience extrême et une bonne crise de rire, maintenant qu’on en parle, après coup, mais une soirée de perdue pour rien quand même.
En attendant le concert de The Ex de cette fin semaine – ce sera le samedi 19 décembre – organisé dans l’antre des anoraks, direction le Sonic en ce vendredi soir pour prendre quelques nouvelles de Scott McCloud officiant désormais sous le nom de Paramount Styles. Vite, j’ai trop besoin de quelques bières pour éteindre le feu d’une semaine invariablement pourrie et gâchée. J’ai aussi besoin d’un vrai bon concert.























Hyancinth Days joue en premier. Ce groupe-à-lui-tout-seul avait été l’excellente surprise du concert d’Electric Electric en octobre dernier, au même endroit. Ce soir il va largement confirmer tout le bien que l’on peut penser de sa musique, malgré un stress évident et visible de son côté – une tisane le soir avant de se coucher et on n’en parle plus mon garçon, c’est une méthode appliquée et approuvée par Blackthread, autre one man band local de talent (d’ailleurs le groupe unipersonnel tend vraiment à être une spécialité lyonnaise et si vous ajoutez Sheik Anorak vous obtenez la triplette infernale de cette espèce en voie de surpopulation). Mais je m’égare, une fois de plus.
Donc, pour en revenir à Hyancinth Days dont le set a été rigoureusement le même que celui de la fois précédente, j’ai continué à me demander pourquoi – en dehors de l’intérêt mélodique évident, du cheapos des rythmes et des acrobaties sur quatre cordes – pourquoi donc la musique de ce garçon, qui tient vraiment à pas grand-chose, est aussi plaisante (dans le sens littéral : qui donne du plaisir) et captivante. Je n’ai eu à me creuser trop les sensations pour trouver la réponse, me sentant sourire de toutes mes dents comme un gros niais/hippopotame euphorique : les mélodies tarabiscotées de Hyacinth Days sont résolument lumineuses. Elles rendent serein, joyeux et presque optimiste (oui, même moi) avec un je ne sais quoi de beauté fragile et légère. Maintenant mon garçon, il faudrait vraiment développer un peu plus le chant parce que répéter deux fois de suite les trois même mots uniquement sur le premier titre du concert ce n’est vraiment pas suffisant.


















A l’annonce de ce concert c’est la curiosité – mélangée avec une certaine appréhension – qui prévalait au sujet de Paramount Styles, la nouvelle appellation contrôlée de Scott McCloud n’étant à dire vrai guère passionnante : le premier album du groupe, Failure American Style publié l’année dernière par Cycle records est gentiment mollasson, ne m’a pas laissé un souvenir impérissable et aujourd’hui encore, alors que je le réécoute en boucle (c’est l’inévitable effet de l’enthousiasme post concert), je le trouve toujours bien propret et sage. Propre, la musique de Girls Against Boys l’était aussi d’une certaine façon, production léchée de partout et tout ça, mais elle était surtout sacrément tubesque et dynamique donc irrésistible. Au moins Scott McCloud n’a pas eu l’ambition ni la prétention de reprendre les recettes de Girls Against Boys à son compte – malgré la présence dans Paramount Styles du batteur Alexis Fleisig – et a opéré un virage à 180 degré en direction d’un pop folk/classic rock (comme on dit au pays des donuts et du beurre de cacahouète) très acoustique et, il faut bien avouer, moyennement accrocheur.
La configuration du groupe qui joue ce soir est donc le très placide Alexis Fleisig à la batterie, un bassiste qui ne sert à rien d’autre qu’à jouer de la basse tellement il a une présence inexistante sur scène (c’est lui Geoff Sanoff, celui qui a aussi produit Failure American Style ?), un guitariste qui ressemble étrangement à Virginie Despentes et Scott McCloud au chant, à la guitare acoustique et au tabouret. Parce que notre homme, pourtant bête de scène avec ce groupe de dandys électriques qu’étaient les Girls Against Boys, s’apprête à jouer tout son set assis comme un vulgaire chanteur de country bovine. Normalement il y a également un violoncelle dans le line-up mais pour une raison que j’ignore cette tournée européenne s’est faite sans, ce qui n’est pas pour me déplaire.


















Et la magie opère dès les premières secondes de la première chanson du concert et ne s’arrêtera jamais. Paramount Styles sur une scène c’est nettement plus électrique que sur disque (l’absence du violoncelle me réjouit alors d’autant plus), les compositions gagnent en pouvoir d’accroche-cœur, deviennent immédiatement évidentes, songwriting fin, subtil et ravageur et surtout la voix de Scott McCloud, son grain inimitable, sa chaleur, font des merveilles – au passage je trouve cette voix merveilleuse nettement en deçà de ses possibilités naturelles sur le premier album du groupe. Ce type, même assis, a conservé toute sa classe naturelle de très grand monsieur.
Passons sur le cas du bassiste qui servirait de râtelier pour son instrument que cela n’y changerait rien : j’admire tour à tour Alexis Flesig derrière sa batterie, au jeu sobre et délicat mais n’hésitant pas à envoyer le bois à l’occasion – beaucoup (trop ?) de titres sont construits de la même façon avec une conclusion identique : un final noisy – et surtout le guitariste aux yeux globuleux et gros buveur de bière qui vous sort un solo tout déconstruit (mais toujours court) aussi bien que des arpèges chouettement décoratifs, je suis collé pile poil en face de lui et en j’en oublierais presque parfois Scott McCloud qui pourtant en impose question charisme.
Il s’avère donc que les nombreux titres inédits que Paramount Styles a joué ce soir sont d’un niveau nettement supérieur à ceux de Failure American Style. Il s’avère également que ce foutu guitariste n’était pas pour rien dans le phénomène de combustion instantanée qui a régné en maître. J’espère donc que le nouvel album (il est déjà enregistré, il va bientôt sortir et Scott McCloud veut revenir en Europe dès l’année prochaine pour en assurer la promotion) saura conserver toutes ces qualités du live, qu’il ne sera pas gâché par une production trop policée et lisse… Ah oui, je n’ai pas su résister, j’ai fini par acheter au groupe son premier disque, faute de mieux et finalement... en boucle donc.