Après la langue, la cervelle. ZEUS ! aime les
abats et autres trucs dégueulasses mais reste soigneusement déglingué : Opera est le deuxième album du groupe
italien et on y sent comme un air de déconnade et, parfois, presque de jovialité.
La recette de Zeus ! n’a pas changé par rapport au premier album sans titre et Zeus ! est toujours un duo basse/voix (Luca Cavina) et
batterie (Paolo Mongardi) qui pratique le grind/spazz/jazz core comme d’autres trichent
lorsqu’ils jouent au baby-foot : il est formellement interdit de pratiquer
la roulette et la pissette mais on le fait quand même parce que c’est ça qui
est bon.
Zeus ! nous assène donc onze titres dont les six
premiers dégoulinent de cet aspect hautement ludique voire crétin dans la
violence musicale ; le duo enchevêtre ses compositions puis les démêle,
bourrine un bon coup, prend une succession de virages sur deux roues et repart
pour un tour. Cet aspect là d’Opera –
même si Zeus ! a également durci le ton question véhémence et
déflagrations en cascade – est le plus amical du disque ; un thérémine (?)
vient parfois ajouter une couche de kitschoune à l’ensemble, Beelzebulb est même doté d’un synthé
dégueu façon black metal symphonique, les borborygmes de Luca Cavina cartoonent
comme il faut et la première face du disque s’enfile comme une lettre à la
poste, tiens je vais me faire ma ration quotidienne de bruit qui réveille. Et
puis il y a également Justin Pearson de The Locust/Retox/Swing Kids/The Crimson Curse/etc. qui vient beugler sur
un Sick And Destroy taillé sur mesure
pour sa majesté.
« Sick
And Destroy » ? Et oui : tous les titres d’Opera relèvent de jeux de mots assez
foireux mais drôles et même si on n’a aucune culture métallurgiste il y a franchement
de quoi rigoler (Lucy In The Sky With
King Diamond, Blast But Not Litz,
Giorgio Gaslini Is Our Tom Araya*),
d’autant plus qu’il n’y en a pas que pour le metal (La Morte Young, Bach To The
Future).
Mais trêve de plaisanteries. Le tournant d’Opera s’effectue à la toute fin de la
première face grâce à un Giorgio Gaslini
Is Our Tom Araya qui pour la première fois alterne réellement les
ambiances, les rythmes et enquille différentes parties contrastées en un savant
labyrinthe de trépidations diverses et de méthodes d’acharnement variées. Toute
la deuxième face du disque est à cette image, plus déliée, plus aérée, plus diversifiée
(plus progressive ?) mais également et finalement plus folle et plus
inquiétante (enfin… tout est relatif : on reste quand même dans le ludique).
Opera échappe donc de justesse aux
syndromes de la branlette pour tous et du sextoy auditif. Merci.
[Opera est publié en
vinyle noir ou jaune fluo + coupon mp3 ** et en CD par Offset records, Tannen records et Three One G – Justin Pearson inside]
* que l’on pourrait traduire par quelque chose
comme Michel Petrucciani est notre Shane Embury
** il y a quelque chose de vraiment extraordinaire
à propos de ce coupon mp3, le cartonnage est comme constellé de petits granulés
(?) et dessus on peut lire l’inscription suivante : « Cette carte
contient des graines de fleurs sauvages. Plantez-la sous une fine couche de
terre, arrosez-la régulièrement et regardez-la pousser »…