Deux jours à peine après le terrifiant concert de Divorce, retour au Sonic qui s’apprête à fêter dignement son septième
anniversaire : et oui la salle lyonnaise a ouvert le 1er avril
2006… Un 1er avril ? Tout ça ressemble à une bonne grosse
blague mais c’est la vérité pure et simple et si les deux inconscients qui ont
monté ce projet avaient su au départ dans quoi ils s’embarquaient réellement,
toutes les galères qu’ils allaient rencontrer en chemin, peut-être qu’ils
auraient choisi d’ouvrir un autre jour, le 30 mars ou le 2 avril, tiens, par
exemple.
Mais, comme dirait l’autre, it’s unlucky to be
superstitious – chose que l’on traduira poliment par un « tu chies quand
tu pries » – et cela peut sembler effectivement à peine croyable que le Sonic atteigne finalement l’âge de
raison. Bon anniversaire les garçons.
Il fallait donc un groupe définitivement festif et
enjoué pour marquer le coup, après tout on est un samedi soir, le week-end (de
Pâques) va durer trois jours et les gens ont bien le droit de s’amuser comme il
faut. Les Kabu Ki Buddah ayant refusé de se reformer pour l’occasion, c’est
donc à THE HEALTHY BOY & THE BADASS MOTHERFUCKERS qu’échoit la lourde tâche de dérider un public
lyonnais réputé pour son sang-froid légendaire et inflexible en cas de concert
débordant d’esprit et d’insouciance.
On rappellera malgré tout que Carne Farce Camisole, dernier
enregistrement en date de The Healthy Boy & The Badass Motherfuckers, est
l’un des disques parmi les plus beaux et les plus poignants de ces derniers
mois et cela faisait vraiment plaisir de revoir Benjamin Nerot aka The Healthy Boy,
sa barbe de diablotin druidique et son petit chapeau à la Peter Sellers, sur
une scène. Voilà plus de deux ans que lui et son gang de lyonnais n’avaient pas
(re)joué ensemble mais tout ce petit monde vient juste de mettre fin à une sorte de malédiction en effectuant une petite tournée confraternelle de cinq jours.
A l’image de Carne
Farce Camisole, le concert est une alternance de chansons intimistes,
sombres et graves et de morceaux plus rythmés, plus denses et presque enjoués – notamment une nouvelle
composition très réussie et qui touche de près à ce bon vieux rock’n’roll –
mais quoi qu’il arrive c’est la voix profonde et ourlée d’éthanol de The
Healthy Boy qui impressionne et qui domine tout le reste. Entre balades
crépusculaires et dérives écorchées vives notre homme donne vie à ses textes
mais sans en faire de trop non plus : la simplicité nue et sincère de
l’exposition tripière ne cède jamais le pas au pathos ou à l’auto-apitoiement.
Les cinq musiciens sur scène prennent visiblement
plaisir à jouer ensemble, éveil d’une bienfaisance cathartique et – peut-être –
libératrice alors que quelques clins d’œil complices et autres blagues débiles
fusent à l’occasion, n’oublions pas qu’aujourd’hui il y a aussi un anniversaire
à fêter. Mais le clou du spectacle reste cette incroyable galipette totalement
à contre-emploi effectuée par un lead guitariste particulièrement enflammé au
beau milieu du solo de Remember Me, sublime
composition s’il en est – finalement cette acrobatie aérienne s’avérera illustrer
parfaitement les effets néfastes des peaux de banane abandonnées sur l’existence de chacun.
[bon, après, le Sonic a réellement fêté son
septième anniversaire, tout le gotha lyonnais était là ou presque, le bar a été
pris d’assaut, de la musique de vieux jeunes passait dans la sono et les gens
avaient l’air content]