KEN MODE… on
peut considérer que ces trois types ont, quelque part, un peu chance : ils
sont originaires du Canada et, pour toutes celles et tous ceux qui n’ont pas
beaucoup d’imagination – lorsque on écoute que du hardcore noise et métallisé
sauce moderne on en a décidemment pas beaucoup – ces origines géographiques quasiment
exotiques (Winnipeg, Manitoba, si tu veux tout savoir), cela
peut aider à différencier un groupe, fut-il talentueux, de la meute d’hurleurs
et de tatoués qui hantent les couloirs de la colère ordinaire.
Je plaisante un peu mais à
peine : avec son précédent album Venerable
enregistré sous la houlette de Kurt Ballou, Ken Mode* avait pris le risque de
se fondre dans la masse et de noyer sa puissance hautement vindicative sous le
flot aseptisé du grand maître sonneur du Massachusetts… Heureusement le
groupe s’en était finalement plutôt bien sorti, sa force de caractère et son
originalité patente arrivant in fine à faire la différence. Pour son cinquième
album Entrench Ken Mode est allé
chercher beaucoup moins loin pour finalement se faire enregistrer à la maison.
Le son général de Entrench reste
assez lisse mais, là aussi, c’est la petite personnalité de Ken Mode qui ressort
en premier, même si le groupe ne retrouve pas non plus toute la force quasi
déglinguée ni toute la conviction de Reprisal
(2006) et Mennonite (2008) qui
restent deux albums absolument essentiels.
Va-t-on pour autant bouder notre plaisir ?
Bien sur que non : les groupes typés hardcore noise (etc.) qui se détachent
réellement du lot sont rares et le groupe des frères Matthewson – Jesse à la
guitare et au chant, Shane à la batterie, ces deux là ont usé un nombre
impressionnant de bassistes depuis leurs débuts – mérite bien tous les lauriers
récoltés même si on peut aussi reprocher à Ken Mode de plus en plus devenir des
faiseurs et à Entrench d’être parfois
une collection de titres « à la manière de ». D’ailleurs Season Of
Mist, le label responsable de l’édition européenne de Entrench, a fait apposer sur le disque un sticker qui cite
Converge, Botch, Every Time I Die, Coalesce, Kylesa…
… La pertinence de certains noms énumérés
ci-dessus échappe complètement à toute réalité objective, on parlera gentiment de
marketing triomphant, bien que le côté Converge (version linéaire) est lui parfois
réel et un peu énervant ; on citera également No I’m In Control dont le chant ainsi que l’énorme ligne de basse
semblent sortir tout droit de l’imagination des new-yorkais d’Unsane – mais ça c'est un compliment.
Pour le reste Ken Mode, groupe d’artisans animés d’une sacrée rage, s’en sort aux forceps c'est-à-dire grâce à toute sa hargne et toute sa fougue (le presque rock’n’roll Counter Culture Complex). Pour l’instant l’équilibre entre colère noire originelle et sophistication de la production est encore atteint par Ken Mode qui mène toujours sa barque comme il faut. Mais cela durera-t-il ? Rien est moins sûr et, sans faire de faux procès d’intentions au groupe, les canadiens se lasseront peut-être, un jour… Ou peut-être qu’on se lassera avant eux. Quant aux incursions de Ken Mode dans le registre de l’émotion et de la mélancolie un brin gnangnan (le très sensible Romeo Must Never Know), on finit également par s’y habituer mais de justesse – oui, c’est le printemps, oui il fait beau donc on a forcément le cœur un peu plus léger. Pardon.
Pour le reste Ken Mode, groupe d’artisans animés d’une sacrée rage, s’en sort aux forceps c'est-à-dire grâce à toute sa hargne et toute sa fougue (le presque rock’n’roll Counter Culture Complex). Pour l’instant l’équilibre entre colère noire originelle et sophistication de la production est encore atteint par Ken Mode qui mène toujours sa barque comme il faut. Mais cela durera-t-il ? Rien est moins sûr et, sans faire de faux procès d’intentions au groupe, les canadiens se lasseront peut-être, un jour… Ou peut-être qu’on se lassera avant eux. Quant aux incursions de Ken Mode dans le registre de l’émotion et de la mélancolie un brin gnangnan (le très sensible Romeo Must Never Know), on finit également par s’y habituer mais de justesse – oui, c’est le printemps, oui il fait beau donc on a forcément le cœur un peu plus léger. Pardon.
[Entrench est disponible en CD digipak et en double LP avec
plein de couleurs différentes]
* je devrais écrire KEN Mode mais j’ai pas envie,
KEN c’est pour « kill everyone now », sic