Réexaminons d’un peu plus près le cas de BARN OWL : le duo, toujours
constitué d’Evan Caminiti et de Jon Porras, vient de publier son cinquième
album officiel, tout simplement nommé V.
Un manque d’imagination certain quant au choix du titre mais un manque
d’imagination qui pourtant ne doit pas cacher les efforts du duo pour enfin
faire évoluer sa musique. Car si l’album précédent de Barn Owl, le décevant et
paresseusement pédant Lost In The Glare, avait failli
sceller un désamour total et définitif pour un groupe en panne d’inspiration et
jouant confortablement la carte du sur-place, il n’en a pas toujours été ainsi ;
le EP Shadowland, l’album Ancestral Star, et plus encore, The Conjurer, sublime enregistrement
publié en 2009, avaient marqué les esprits… on considérait alors qu’il y avait
assez de place dans le monde des musiques drone/psyché/ambient à la sauce Dylan
Carlson/Earth/cow-bow végétarien/shaman à barbe pour que Barn Owl puisse y
mettre également son petit grain de sel (de sable ?). Lost In The Glare avait donc malheureusement – mais provisoirement
– démontré que non.
Pour l’enregistrement de V Barn Owl a procédé à une petite révolution culturelle et a décidé
de quitter la terre ferme et ses vastes déserts pour aller faire un tour très loin,
quitte à risquer de s’y perdre aussi, du côté de déserts plus vastes encore, vastes
jusqu’à l’infini, les déserts incommensurables de l’espace. Mais Barn Owl ne
s’égare pas. Au contraire le groupe y retrouve enfin toute la matière première
qui d’une certaine façon sert de justification au goût pour le flottement et
l’errance des deux musiciens.
Pour se faire, et sans remettre totalement en
cause leurs anciennes amours, Evan Caminiti et Jon Porras se sont sur V davantage tourné vers l’utilisation de
synthétiseurs. Il y en avait déjà un peu dans la musique de Barn Owl mais là
ils deviennent omniprésents, tirant des lignes de correspondance assez
inattendues entre la musique électronique et atmosphérique allemande de la fin
des années 60/début des années 70 et les habituelles westerneries psyché dark
du groupe. Le résultat aurait pu être bancal ou tout du moins incomplet or il
est passionnant, on peut effectivement parler de voyages dans l’espace – même
les photos servant d’illustrations à V
sont tirés de clichés pris par la Nasa (ahem) – et surtout de déambulations
cosmiques. Il n’est même plus question d’avoir le nez en l’air, de jouer au
marchand de sable ou de convoquer les esprits, la musique de Barn Owl semblant
capable elle aussi de s’étendre de plus en plus loin, sans justification, et
surtout de se réapproprier la part de mystère qu’elle avait précédemment
perdue.
V est publié en vinyle ou en CD par Thrill Jockey. Rappelons également que Barn Owl est en concert à Lyon ce mardi 24 avril au Sonic en compagnie de l’immanquable Witxes et demain mercredi 25 avril à Paris, à l’Espace B, toujours avec Witxes mais aussi avec les merveilleux 2kilos &More.