mardi 24 avril 2012

Tentaculos / Vampyroteuthis





Un vibrant hommage au monde parfois inquiétant et toujours mystérieux des profondeurs océanes, un hymne à la gloire de la Grande Bleue, de ses abimes insondables et de la vie sous-marine aussi riche qu’exaltante. Tout Vampyroteuthis, le premier LP de Tentaculos, est à l’avenant : sur le recto de la pochette des jolis tentacules de pieuvre sortent d’une bouche consentante, sur le verso on reconnait la gueule et le bonnet rouge d’un capitaine écologiste de navire, explorateur et un rien réactionnaire, un premier insert à découper et recoller soi-même permet de se fabriquer une jolie pieuvre, un deuxième insert est en fait une page de bande dessinée mettant en scène le même capitaine de navire évoqué ci-dessus avec des phylactères en écriture cyrillique ou en anglais (parce que la mer appartient à tout le monde ?) et, enfin, le disque en lui même est d’un beau vinyle bleu transparent. Un concept qui ne serait rien sans les quelques samples qui parcourent également Vampyroteuthis et dont je vous livre celui qui en quelque sorte sert de climax au disque :

« Est-ce vrai que les ventouses de tentacules font plus de dégâts que les griffes d’un tigre ?
- Comparées aux ventouses des tentacules les griffes de tigre ne sont rien, monsieur Turner, rien »

Ce sample, coupant en deux Turner (dernier titre de l’album, il s’agit d’un instrumental) et semble-t-il tiré d’un film à gros budget pour enfants et préadolescents attardés, spectaculairement débile et tournant autour d’histoires maritimes et de pirates maudits toujours plus assoiffés de richesses, ce sample (donc) semble inversement indiquer que nous vivons sur terre dans un monde merveilleux d’insouciance frivole et de facilité.
Les dix titres de Vampyroteuthis – dont certains peuvent être écoutés dans des versions plus anciennes et donc primitives sur la page bandcamp de Tentaculos – sont pourtant d’un punk noise violent et aride. Tout ça n’est bien sûr que de la grosse déconnade, ces quatre petits gars n’ont l’air que très raisonnablement accrocs au Captain Igloo mais par contre ils savent comment aligner une rythmique bien remuante et sévère avec une grosse basse et une batterie nerveuse, une guitare à l’acidité no wave, un chant plutôt rauque lorsqu’il n’est pas passé au travers d’un porte-voix (un chant rauque en matière de no wave et de post pounque ça nous change grandement des voix suraigües un rien maniérées qui sévissent habituellement dans le genre et c’est tant mieux) plus quelques interventions très réussie et bien senties à la clarinette basse (jouée par le chanteur), ce qui donne un côté freeture supplémentaire à la bouillabaisse punk (mais sans rouille) de Tentaculos.
Vampyroteuthis n’est pas un disque si facile que cela alors qu’il semble prendre les choses à la légère et Tentaculos – décidemment, j’adore ce nom et tous ses sous-entendus –, derrière le côté bordel joyeux/amusons-nous en attendant la mort, est un groupe à la fois âpre et vivifiant. Une très bonne découverte, un disque à écouter impérativement et un groupe à aller voir en concert puisque Tentaculos y excelle en matière d’harponnage.

Vampyroteuthis est publié grâce aux efforts conjoints des labels Aïnu records, Oni Red Chords et Fuck A Duck auprès desquels vous pouvez bien évidemment vous le procurer.