OK. Défendons encore une fois Microfilm contre les attaques incessantes
des amateurs de chansons à textes et de voix hurlées. Après un The Bay Of Future Passed (2009)
lui-même presque similaire à Stereodrama
(2007), Microfilm ne change rien. Ou pas grand-chose. Celles et ceux qui ont
cordialement détesté les trois précédents albums de Microfilm tout comme celles
et ceux qui ne voient pas l’intérêt de publier un nouvel album en forme de
redite peuvent décréter, même sans avoir écouté une seule note de AF127, qu’ils détesteront à nouveau ce
quatrième album. Cette chronique honteusement élogieuse ne s’adresse donc pas à
eux. Pour les autres, on va tenter de détailler ce qui fait de Microfilm et de AF127 un très bon groupe et un très bon
album.
La question centrale concerne la nature même de la
musique de Microfilm. Certains appellent cela du post rock. Terme aussi
imprécis que galvaudé mais qui ici sert à décrire une musique rock,
instrumentale, cinématographique (sinon pourquoi le nom du groupe serait-il
Microfilm ?) et à tendance mélodramatique. On a parfaitement le droit de
détester le post rock. Personnellement je déteste cette musique d’invertébrés
auto-suffisants et prétentieux car elle m’ennuie et m’agace au plus haut point.
Les gens qui prétendent raconter des histoires, faire voyager l’auditeur et
émerveiller les petites âmes sensibles ne sont pour la plupart que des
charlatans et des bonimenteurs. Or Microfilm est l’exception parmi les
exceptions ce qui, littéralement, signifie que Microfilm est un groupe
exceptionnel car il sait comment composer des titres instrumentaux c'est-à-dire
qu’il sait attirer puis retenir l’attention, y compris sur les titres les plus
atmosphériques et les plus longs (le très beau Claude et son violoncelle). Le talent ça ne s’invente pas (du moins
s’il est inventé de toutes pièces le résultat ne tient pas la route très
longtemps et les mois ou les années auront raison de lui et de sa pertinence)
mais surtout le talent, ça ne s’explique que très difficilement. Microfilm
c’est donc juste une histoire – oui, encore –, une histoire de coup de foudre.
La deuxième question à propos de Microfilm c’est
celle des samples. Une marque de fabrique qui consiste à insérer au début des
compositions ou en plein milieu de celles-ci des dialogues tirés de films plus
ou moins connus, plus ou moins reconnaissables. Cette greffe sonore semble
poser deux problèmes : premièrement le niveau sonore des samples en
question est très fort, rivalisant sans problème avec celui de la musique
elle-même et ça, ça peut gêner les vrais mélomanes ; deuxièmement l’inclusion
évidente de samples de voix au sein d’une musique pourtant instrumentale ne
serait-elle pas un aveu de faiblesse de la part du groupe ? Toutes ces
remarques sont pertinentes mais balayons-les d’un efficace revers de main
chargé d’un mépris généreusement condescendant. Déjà, les samples ne parasitent
pas l’ensemble du disque, ils sont souvent drôle et lorsqu’ils s’effacent c’est
parce que précisément la musique est en mode impérial, généreux et inévitable
(voir sur ce point précis la question du coup de foudre explicitée un peu plus
haut). L’argument concernant le « manque de confiance en une musique
instrumentale » ne tient pas non plus : enlevez les samples des
compositions de Microfilm et la musique du groupe fonctionnera quand même très
bien mais juste différemment. Je suis même prêt à parier que ces samples finiraient
par manquer à certains.
En guise de conclusion, tentons de déterminer quel
est le meilleur titre de l’album. Et bien ils sont tous aussi bons les uns que
les autres. Mais je vais vous dire celui que je préfère : Carnival, uniquement pour une seule
raison, cette guitare en balancier qui au début du titre rappelle le final sur
deux notes de The Map, l’un des tout meilleurs
titres de Deity Guns ; puis Carnival
part sur totalement autre chose mais ne faiblit pas, la magie reste intacte. Et
de la magie c’est exactement ce que propose Microfilm tout au long de AF127.
AF127 a
été publié par Head records pour la
version CD et par Impure Muzik, Migouri
records et Theatre records
pour la version vinyle (c’est un double LP en plastoc tout blanc).
Microfilm c’est également des concerts à ne pas
rater. Les dates sont à consulter sur le site du groupe – pour les
lyonnais signalons la date du 24 mai au Périscope
organisée par les insouciants activistes d’Active Disorder
(clic donc sur le flyer si tu veux tout savoir)