jeudi 12 avril 2012

Calva / Sacrifice





Calva revient avec un nouvel album et l’évidence nous tombe dessus dès la première écoute : le groupe a mis les bouchées doubles. Sacrifice vise clairement plus haut que tout ce que Calva a publié jusqu’ici, tant au niveau des compositions qu’en ce qui concerne la qualité de l’enregistrement. Mais ce n’est pas tant l’évolution du groupe depuis le déjà très bon split publié conjointement avec Io Monade Stanca qui attire durablement l’attention. Sacrifice séduit rapidement et définitivement avec ses seuls moyens.
En guise de premier tir de barrage Dolcetto dégaine les guitares, des guitares dentelières et cristallines, sur un mid tempo entreprenant. Le break au milieu ne dénature pas la dynamique de Dolcetto – par contre il rappelle et souligne très bien que Calva a toujours eu un côté fortement électro – et le post punk chaleureux de Calva s’envole déjà à haute altitude. Le principal changement c’est ça : moins de mathématiques et moins de post rock arithmétique et beaucoup plus de bourre-pif. Mais ce n’est pas la seule évolution que l’on remarque car l’autre gros changement dans le groupe c’est le chant. Désormais Calva en met presque de partout, le groupe est moins tenté par les compositions purement instrumentales et qui plus est il abuse moins d’artifices camoufleurs à l’utilisation aussi facile que banale, comprenez qu’en écoutant Sacrifice vous ne risquerez pas de faire une sale overdose de voco(mur)der ou de voix samplées.
Les guitares et les rythmiques sont donc de sortie (Swamp King, Rubik’s Cube, Blank Shooter certes plus lent et presque insidieux ou Macadam) mais les synthétiseurs ne sont jamais très loin (Titan, Trompette De La Mort – tiens, un instrumental, avec la trompette de Snævar Njáll Albertsson en guest – et Robocop – ah ! un titre énervé avec du vocoder) et quoi qu’il arrive Calva ne cesse de pousser le bouchon toujours un peu plus loin. Des compositions variées, mêlant intelligemment guitares organiques et sons synthétiques avec un coefficient de réussite probante à rendre tout vert de rage un hipster electro recyclé tardivement dans le garage punk à paillettes. L’équilibre et l’alchimie qui en résulte sont la plupart du temps très bien vus, Calva a vraiment fait de terribles progrès et a su creuser là où il le fallait.
Sacrifice n’a pourtant rien d’un album linéaire où tous les titres se ressembleraient. Déjà Titan casse un peu le rythme mais le très beau Rosemary en début de seconde face y contribue également, d’une façon certes bien différente : sur ce titre Caroline, ChooChooShoeShooteuse émérite*, vient poser son chant tout en émotion – on sait que la demoiselle a de la ressource et qu’elle sait pertinemment nuancer ses éclats passionnés envoyés en pleine face mais avec Rosemary elle opte plutôt pour le pas de côté en forme de douceur faussement cajolante. Sur Robocop, c’est un autre invité par ailleurs chasseur d’élan chevronné qui fait à son tour des prouesses vocales – Fred Kourgane fait décoller Robocop en un tour de main et les doigts dans le nez, ce qui bien sûr ne surprendra personne. Ce qui surprendra peut-être c’est son phrasé moins parlé à la fin de titre, moins narratif mais tout aussi puissant, oui il chante de sa plus belle voix. L’entendre c’est à nouveau avoir des frissons garantis. Et voilà donc des invités qui rehaussent un peu plus le caractère énergétique et sombre aux entournures d’un disque qui tient toutes ses promesses jusqu’à la fin.



Sacrifice est logiquement publié par A Tant Rêver Du Roilogiquement parce que le batteur de Calva est aussi l’un principal activiste du label. Calva est bien sûr également au programme des 10 ans d’A Tant Rêver Du Roi qui pour l’occasion se paie ses deux jours de festival, à la maison à Pau. Allez-y si vous le pouvez, ça commence demain et ça dure jusqu’à samedi, le Béarn c’est magnifique et les occasions de voir réunie une aussi belle affiche se font un peu rares.

* à ce propos A Tant Rêver Du Roi publiera au mois de mai Playland, le très attendu deuxième LP de ChooChooShoeShoot – whammy !