Calva revient
avec un nouvel album et l’évidence nous tombe dessus dès la première
écoute : le groupe a mis les bouchées doubles. Sacrifice vise clairement plus haut
que tout ce que Calva a publié jusqu’ici, tant au niveau des compositions qu’en
ce qui concerne la qualité de l’enregistrement. Mais ce n’est pas tant
l’évolution du groupe depuis le déjà très bon split
publié conjointement avec Io Monade Stanca qui attire durablement
l’attention. Sacrifice séduit
rapidement et définitivement avec ses seuls moyens.
En guise de premier tir de barrage Dolcetto dégaine les guitares, des
guitares dentelières et cristallines, sur un mid tempo entreprenant. Le break
au milieu ne dénature pas la dynamique de Dolcetto
– par contre il rappelle et souligne très bien que Calva a toujours eu un côté
fortement électro – et le post punk chaleureux de Calva s’envole déjà à haute
altitude. Le principal changement c’est ça : moins de mathématiques et
moins de post rock arithmétique et beaucoup plus de bourre-pif. Mais ce n’est
pas la seule évolution que l’on remarque car l’autre gros changement dans
le groupe c’est le chant. Désormais Calva en met presque de partout, le groupe
est moins tenté par les compositions purement instrumentales et qui plus est il
abuse moins d’artifices camoufleurs à l’utilisation aussi facile que banale,
comprenez qu’en écoutant Sacrifice
vous ne risquerez pas de faire une sale overdose de voco(mur)der ou de voix
samplées.
Les guitares et les rythmiques sont donc de sortie
(Swamp King, Rubik’s Cube, Blank Shooter
certes plus lent et presque insidieux ou Macadam)
mais les synthétiseurs ne sont jamais très loin (Titan, Trompette De La Mort
– tiens, un instrumental, avec la trompette de Snævar Njáll Albertsson en guest
– et Robocop – ah ! un titre
énervé avec du vocoder) et quoi qu’il arrive Calva ne cesse de pousser le
bouchon toujours un peu plus loin. Des compositions variées, mêlant
intelligemment guitares organiques et sons synthétiques avec un coefficient de
réussite probante à rendre tout vert de rage un hipster electro recyclé
tardivement dans le garage punk à paillettes. L’équilibre et l’alchimie qui en
résulte sont la plupart du temps très bien vus, Calva a vraiment fait de
terribles progrès et a su creuser là où il le fallait.
Sacrifice
n’a pourtant rien d’un album linéaire où tous les titres se ressembleraient. Déjà
Titan casse un peu le rythme mais le
très beau Rosemary en début de
seconde face y contribue également, d’une façon certes bien différente :
sur ce titre Caroline, ChooChooShoeShooteuse
émérite*, vient poser son chant tout en émotion – on sait que la demoiselle a de
la ressource et qu’elle sait pertinemment nuancer ses éclats passionnés envoyés
en pleine face mais avec Rosemary
elle opte plutôt pour le pas de côté en forme de douceur faussement cajolante.
Sur Robocop, c’est un autre invité
par ailleurs chasseur d’élan chevronné qui fait à son tour des prouesses
vocales – Fred Kourgane fait
décoller Robocop en un tour de main
et les doigts dans le nez, ce qui bien sûr ne surprendra personne. Ce qui
surprendra peut-être c’est son phrasé moins parlé à la fin de titre, moins
narratif mais tout aussi puissant, oui il chante de sa plus belle voix. L’entendre
c’est à nouveau avoir des frissons garantis. Et voilà donc des invités qui
rehaussent un peu plus le caractère énergétique et sombre aux entournures d’un
disque qui tient toutes ses promesses jusqu’à la fin.
Sacrifice
est logiquement publié par A Tant Rêver Du Roi
– logiquement parce que le batteur de
Calva est aussi l’un principal activiste du label. Calva est bien sûr également
au programme des 10 ans d’A Tant Rêver
Du Roi qui pour l’occasion se paie ses deux jours de festival, à la maison
à Pau. Allez-y si vous le pouvez, ça commence demain et ça dure jusqu’à samedi,
le Béarn c’est magnifique et les occasions de voir réunie une aussi belle
affiche se font un peu rares.
* à ce propos A Tant Rêver Du Roi publiera au mois
de mai Playland, le très attendu
deuxième LP de ChooChooShoeShoot – whammy !