Finalement, de l’édition 2011 du Riddim Collision je n’aurai pas vu – ni entendu – grand-chose… mais heureusement que tout le monde n’est pas comme moi, que certains pensent encore à sortir et s’amuser en attendant la fin du monde. Et, fort heureusement aussi, du côté de l’organisation du festival le bilan artistique semble positif et la fréquentation très bonne, donc tout va bien et à l’année prochaine.
Seule incursion de 666rpm dans ce 13ème Riddim Collision, donc, la soirée Bar-Bars. Devenue un incontournable du festival, son principe est très simple : des groupes programmés dans différents rades du quartier de la Croix Rousse ou du centre ville de Lyon, un pass à 6 euros et la possibilité d’aller si on le souhaite d’un concert à l’autre et surtout d’un bar à l’autre et de rentrer à la maison complètement torché, tout cela est vraiment très bien organisé.
La seule difficulté est pour les gourmands : tu veux voir No Shangsa mais ne rater Pord sous aucun prétexte ? Pas possible, les deux groupes étant prévus pour jouer quasiment en même temps mais bien sûr pas au même endroit. Chacun doit donc se faire son petit parcours santé et sa petite programmation personnelle mais des fois les choix sont difficiles. Pour ma part, le plan de la soirée était fort simple : direction le Tostaki pour revoir Torticoli, revoir Geneva et bien sûr revoir Pord et m’éclipser un moment et foncer au Kraspek à l’autre bout des pentes de la Croix Rousse pour découvrir et faire la connaissance avec les Drive With A Dead Girl. Je paye mes 6 euros à l’entrée de la cave du Tostaki et me laisse non sans un certain plaisir mettre un bracelet autour du poignet, signe qu’après je pourrai aller batifoler où bon me semble. Il n’en sera pas ainsi.
C’est la quatrième fois que je vois Torticoli en concert depuis la première apparition du groupe en mai 2011 à Grrrnd Zero mais je ne me lasse pas de ces trois quatre garçons malgré ce soir un démarrage légèrement en deçà et une première moitié de set un peu molle avec quelques hésitations de la part du groupe qui semble pourtant vouloir montrer une volonté farouche. Rien de grave… Torticoli entame directement son set par un ou deux titres chantés avant de s’adonner à son autre plaisir coupable préféré : un noise rock touffu et explosif mais instrumental, avec des guitares qui dégueulent, des plans asymétriques et salement alambiqués mais jamais pénibles.
Torticoli est ainsi un groupe schizophrène : à quatre (avec chanteur) la coloration hard core/noise est des plus évidentes ; à trois le free rock reprend le dessus. Certains sont gênés et préfèrent l’une ou l’autre version de Torticoli. Quand à moi j’apprécie les deux et l’équilibre entre titres chantés et titres instrumentaux est suffisamment bien observé pour que l’amateur du groupe n’ait pas l’impression de se faire lui aussi couper en deux. Sur une deuxième grosse moitié de concert Torticoli trouve enfin toutes ses marques et cette seconde partie vire à l’excellence, malgré un drôle de son du côté du guitariste de gauche. Retour du chant sur deux autres titres et interprétation de ce qui est certainement le morceau que je préfère du groupe avec son intro lente et poisseuse… un titre que j’espère bien retrouver sur la démo que le groupe vient d’enregistrer et s’apprête à diffuser.
Geneva doit jouer en deuxième position et j’apprends que le groupe a un nouveau batteur, l’ancien ayant brutalement lâché l’affaire en juillet dernier. Pour des retrouvailles cela me laisse un peu perplexe – je n’ai pas vu Geneva en concert depuis plus de deux ans – et j’ai bien envie aussi de filer au Kraspek puisque les Drive With A Dead Girl y jouent en même temps. Dans la cave cela s’active sévèrement parce que la soirée a débuté en retard et qu’il y a un timing plutôt serré – le patron du Tostaki (toujours très haut en couleurs) descend dans la cave pour rappeler que dans la vie il y a des choses à respecter. Tout le monde reprend une bière.
Après discussion Geneva ne tarde pas à commencer, choisissant contre mauvaise fortune bon cœur de raccourcir son set. Malgré tout ses efforts le groupe peine à convaincre et je ne suis pas loin parfois de trouver le son déficient : il est difficile de reconnaitre le groupe de l’album Sail On Suds et qui en concert transformait son post hard core en rouleau-compresseur organique et mélodique. A revoir dans de meilleures conditions et lorsque la greffe du nouveau batteur aura définitivement pris.
Je regarde alors ma montre sans trop y croire : c’est trop tard pour prendre le risque de courir – et puis, d’abord, pourquoi courir ? – vers un autre bar et de revenir après le début du concert de Pord…
Donc il est largement plus de 23 heures et les Pord n’ont toujours pas joué. Pourtant ils prennent le temps de s’installer, exhument de sous un tas de merdier incroyable le flight case qu’il ne fallait surtout pas enterrer, se font marner par le sonorisateur particulièrement débonnaire et le patron du Tostaki redescend une nouvelle fois dans la cave, râle encore un coup au sujet des horaires mais pas trop parce qu’il est encore plus en forme que tout à l’heure.
Le concert peut enfin commencer, le son – je rêve où il y a quelque chose dans la voix ? – est toujours un peu bizarre mais pour la première fois de la soirée cela le fait : Pord va mettre les survivants du public restés en bas (et qui ne sont pas restés à l’étage pour s’houblonner le corps) à genoux avec les titres du fabuleux Valparaiso joués dans des versions toujours plus folles et en mode accéléré. C’est après tout la quatrième fois que je vois Pord en concert en moins d’un an et l’effet reste identique, terrible, éprouvant de bonheur. Encore merci les garçons.
Alors que le concert est semble-t-il terminé et qu’une partie des gens sont remontés à l’étage, les Pord annoncent un dernier titre, pour le plaisir… ce sera une reprise, prennent-ils même la peine de préciser. La reprise en question est un titre de Fine Business, Excellent, l’unique album Six Horses, un groupe de Chicago des 90’s parmi les tout meilleurs mais encore plus tombé dans l’oubli que les autres. Il s’intitule Won 28, il s’agit même du titre d’ouverture de Fine Business, Excellent et la version qu’en donna Pord fut, justement, excellente.
[du rab de photos floues pour gardes-forestiers avisés ici]