jeudi 6 octobre 2011

Headwax / self titled


Le principal problème avec ce disque – et c’est un sacré problème – c’est qu’il n’y en aura pas pour tout le monde.




Headwax, trio toulousain, sort du bois et publie avec les moyens du bord un premier album lumineusement agressif et bourré de tensions multiples. Les moyens du bord cela veut dire seulement deux cents exemplaires de pressés et pourtant Headwax a très bien fait les choses : un beau vinyle dans une pochette cartonnée carmin uniquement tamponnée en relief du nom du groupe, un insert et un CD avec exactement le même contenu que le vinyle. L’objet a de la classe et du charme. Donc, on le répète encore une fois, il n’y en aura certainement pas pour tout le monde.
Parce que le contenu est largement à la hauteur du contenant. Bien sûr, il y a quelques petites erreurs, quelques défauts par ci par là – une ligne de chant pas toujours très bien assurée, un break un peu bancal, etc. – mais il ne s’agit que d’un premier album et qui peut se vanter d’avoir enregistré un premier disque parfait ? Qui d’ailleurs peut se vanter d’avoir enregistré un album parfait, tout court ? Headwax n’a assurément pas cette prétention là. Il n’empêche que le disque du trio est bourré de qualités et de bonnes choses, on crierait presque au miracle mais ici on est très violemment athée.
Les moyens du bord, la suite : ce disque a été enregistré au studio de la Trappe, un studio toulousain géré par une association dont le but avoué est de permettre à des groupes qui n’ont pas les moyens de se payer un billet d’avion pour Chicago et quelques séances dans le cave de Steve Albini d’enregistrer quand même un disque. Et il sonne, ce premier disque d’Headwax. Le son de guitare vous saute à la gueule, mordant, hurlant et furibard. La rythmique règle la tension au niveau maximum avec ses bonnes lignes de basse en mode tourbillon-compresseur et son batteur qui tient bien la route. Le noise rock d’Headwax – entre explosions rituelles et mélodies sèches – est l’une des très bonnes surprises de cette rentrée voire même de cette année 2011 en matière de musique électrique décapante et dissonante.
Les tubes ne manquent pas ici (Painted Black, He Does ou You’re Special et sa guitare en forme de scie circulaire) or Headwax est aussi capable de bien plus que cela : un titre tel que Friction avec cette maîtrise de la distorsion, cette noirceur, cette abrasivité explosive, ces tripes étalées au grand jour est le point culminant d’un disque que l’on réécoute sans cesse. Sur Drug Is Dead et l’excellent et nerveux Alaric c’est Nadège, par ailleurs bassiste intraitable, qui donne de la voix : son chant ajoute une dimension supplémentaire, une fraîcheur contrastante, un peu comme le fait aussi Natasha avec Kimmo – si on pense qu’elle doit apprendre à mieux placer sa voix, on trouve également du charme à ses frissonnements. Enfin Few Words avec son début en trompe l’œil qui n’est pas sans rappeler les Deity Guns de la fin ou les premiers Ulan Bator surprend – Headwax sait aussi manier le mystère même si sur la seconde partie du titre le trio retrouve sa vindicte et cette guitare qui vous déchire les oreilles comme elle vous déchire le ventre.