mercredi 12 octobre 2011

Report : Gaffer Fest, Day 3 - Loup et The Thing






C’est déjà le troisième soir du Gaffer Fest… Initiative dont on peut déjà dire aussi qu’elle a été couronnée de succès après un vendredi plutôt placé sous le signe des guitares hystériques et de la no wave (Hallux Valgus et Sister Iodine) et un samedi sous celui du chaos épileptique (version pour les schtroumpfs sous acide avec FAT32 et version total armageddon/émincé cosmogonique avec MoHa !). Une programmation prenant des détours des plus intéressants également, ainsi 80 Dates et Dehors Pythagore! délivrant tous les deux des prestations captivantes et d’une richesse presque irréelle de beauté.
Dernier tour de piste donc et changement de décor musical avec Loup et The Thing – des groupes plus conformes au regard de la programmation « habituelle » du Périscope. Loup et The Thing ont déjà partagé la même affiche il y a tout juste un an au Sonic sauf que The Thing était alors accompagné du guitariste japonais Otomo Yoshihide. C’est en discutant avec certains de mes petits camarades présents eux aussi à ce concert que j’apprendrai – assez surpris – que nombre d’entre eux n’avaient pas du tout (mais alors là pas du tout…) aimé la prestation d’alors des norvégiens et du japonais. Mais ils ont certainement bien fait de revenir en ce dimanche soir au Périscope pour procéder aux vérifications d’usage car (outre le fait qu’Otomo n’était bien évidemment pas présent) The Thing va jouer sur/avec un dispositif très différent de la fois précédente.




Mais ne brûlons pas les étapes. Loup débute la soirée. Ceux-là on les aime particulièrement chez 666rpm et pas seulement parce que le duo est composé de Clément Edouard – Lunatic Toys et tout un tas d’autres groupes – et de Franck Gaffer/Sheik Anorak – qui participe à encore plus de groupes que son camarade de jeu.
Le duo continue d’explorer sa formule originale, à priori disparate, et incluant aussi bien des élans free jazz de haute tenue, des passages purement noise, de l’ambient drone et de la bidouille. Loup devient de plus en plus fort pour malaxer tout ça dans un même mouvement captivant qui refuse les contraintes de genre et les collages/juxtapositions attendus. Les dernières fois que l’on avait vu le duo en concert on avait pu constater qu’il avait fait de réels progrès sur les passages les plus denses et les plus free ; aujourd’hui on écoute un groupe qui maîtrise également beaucoup mieux qu’auparavant les accalmies plus ou moins planantes, les expérimentations sonores et les bidouillages.
Résultat, la tension et l’intérêt filent tout droit comme une ligne d’horizon. Loup ne joue qu’une demi-heure – le concert a malheureusement commencé un peu en retard et il y a un timing serré à respecter, dimanche soir oblige – mais cela a été suffisant pour se rendre compte que le groupe est toujours en constante progression et que les nouvelles compositions assurent plus que mieux. Donc on attend déjà le deuxième album de Loup avec impatience.




Héros d’un free jazz antique mais pas du tout poussiéreux, Mats Gustafsson (saxophone baryton, ténor et blagues à deux balles), Ingebrigt Håker Flaten (contrebasse et hochements de tête consternés) ainsi que Paal Nilssen-Love (batterie et mauvais caractère) montent sur la scène du Périscope. La première chose qui se remarque – outre que les trois musiciens portent tous le même t-shirt ridicule – c’est que Ingebrigt Håker Flaten est à la contrebasse, une grosse, une vraie et non pas à la basse électrique comme la dernière fois. La deuxième c’est que Mats Gustafsson n’a pas son petit dispositif/bordel à envoyer du son. Enfin, le trio n’est pas du tout sonorisé mis à part la contrebasse légèrement reprise – et que l’on entendra de toute façon pas assez sauf, phénomène acoustique plutôt curieux, en se tenant sur un côté ou l’autre de la scène.
The Thing va donc délivrer un set purement free jazz et sans la moindre trace d’électricité – je parle de la source d’énergie non renouvelable, pas des effets durables qu’aura provoqués cette musique –, un concert très différent des longues plages d’improvisation libre dont le groupe nous avait gratifié avec Otomo… mais du free jazz à la The Thing c'est-à-dire avec cette énergie sale et presque rock’n’roll. The Thing cite les Sonics, rappelons que ce n’est pas pour rien que le trio a un album intitulé Garage, se lance dans des rythmiques en 4/4 effrénées et repart au quart de tour et la tête la première dans un bain de freeture bouillonnante. Un hommage au grand Joe Mc Phee plus tard (The Thing a enregistré son excellent album She Knows… avec l’américain tout comme Paal Nilssen-Love a plusieurs enregistrement en duo avec lui) et c’est presque déjà fini. Une grosse heure d’énergie, d’immédiateté, de rudesse et d’envolées stellaires… du free dans sa plus simple expression, direct et hargneux, tel qu’il devrait toujours l’être. Free as punk.

[deux ou trois photos-souvenir ici]