Des nouvelles d’Akosh S. – Szelevényi Ákos de son vrai nom –, on n’en a jamais beaucoup… Mis sous les feux des projecteurs grâce aux bons offices de l’ex-chanteur d’un groupe de rock bordelais mais de renommée internationalement française, le saxophoniste hongrois s’est fait plus discret depuis qu’il a été viré comme tout le monde ou presque de Barclay/Universal – label pour lequel il a gravé sous son propre nom ou sous celui de Akosh S. Unit un nombre impressionnant de disques studio et live entre 1998 et 2004… Plus discret certes mais presque aussi productif et privilégiant surtout ces dernières années enregistrements en solo et autres duos : deux disques en compagnie de la superbe et magique Joëlle Léandre, un autre avec le lutin eriKm chez Ronda records et des enregistrements avec Gildas Etevenard, batteur, percussionniste, trompettiste et bricoleur et son état. A l’heure actuelle ce ne sont donc pas les projets et collaborations qui manquent au saxophoniste.
Publié en ce début d’automne 2011 par le lieu associatif marseillais La Mesón, Erem est le deuxième enregistrement officiel du duo Akosh S./ Gildas Etevenard après le double CD Nem Kellett Volna. Les deux hommes jouent ensemble depuis presque une dizaine d’année et le second avait d’ailleurs intégré le groupe du premier en remplacement de l’inoxydable batteur Philippe Foch – on peut l’entendre sur l’album Nap Mint Nap paru en 2004. Si jusqu’ici vous aimiez et ne connaissiez que les enregistrements furieux, multipolaires et collectifs du Akosh S. Unit, vous ne vous sentirez pas dépaysés pour autant : il y a fort logiquement moins d’élans « fire music » sur Erem mais le parfum général y est toujours aussi entêtant et diversifié, mélange de lyrisme à fleur de peau, de musiques originaires d’Europe de l’Est, de free jazz, de psalmodies quasi tibétaines (avec tintements de clochettes et vibrations de gongs en prime) et de balades dans les airs au milieu d’ombres bienveillantes.
Le duo Akosh S./Gildas Etevenard multiplie les instruments – ténor, clarinette, voix, harmonium, gongs et cloches pour le premier ; batterie, gardon hongrois (une sorte de viole, que l’on peut entendre sur Havak Sara par exemple), gongs et percussions pour le second – et multiplie d’autant les échanges et donc les atmosphères. Il y a un fort côté mystique dans le jazz ethnique des deux musiciens or il ne faut absolument pas voir là une quelconque prétention mais, à l’inverse, une humilité et une générosité qui font réellement du bien. Donc il n’y a rien de sacré ou – pire – de sacralisé chez le duo, Erem c’est même souvent tout le contraire, comme une longue et lente déambulation – les 20 minutes que dure Tudat – avec en prime quelques éclats vif-argent (Hivat, Akad et Táj) qui rappellent le tumulte du monde. Dans ses moments là le son du saxophone ténor d’Akosh S. est toujours aussi magnifique et s’accommode plus que bien du difficile exercice du duo free – il faut dire aussi qu’il y a du répondant avec un percussionniste aussi imaginatif et diversifié que Gildas Etevenard.