vendredi 15 janvier 2010

Nadja / Belles Bêtes




















L’objet est superbe. Une galette de vinyle noir et une pochette d’un carton avec une épaisseur comme je n’en ai encore jamais vue. Dessus un gribouillis signé Aidan Baker - quoi encore un crâne de cerf ? - et un tirage limité à cinq cents exemplaires (non numérotés). Beta-lactam Ring records est déjà l’un des rares labels à publier des CDs dont on peut affirmer du packaging qu’il est vraiment beau mais question vinyle, cette maison très arty sait également se surpasser. Belles Bêtes porte donc bien son nom. Un disque parfait pour les collectionneurs qui ne peuvent pas s’empêcher de transformer leurs étagères en musée.
Un emballage cela ne fait pas tout me direz vous. Soit. Pour comprendre un peu mieux Belles Bêtes il faut remonter peut être jusqu’à When I See Sun Always Shines On TV, l’album de reprises que Nadja a publié au printemps dernier et également l’enregistrement le plus pop à ce jour du duo. Le mot est lâché, Nadja aime les chansons. Donc en fait. Et c’est exactement ce que propose ce Belles Bêtes, petite collection de quatre compositions qu’Aidan Baker avait d’abord enregistrées tout seul sous son propre nom. Les Versions originales de Beautiful Beast et de Green & Cold peuvent être écoutées sur l’album Green & Cold. Sand Like Skin est à l’origine un extrait de Songs Of Flowers And Skin alors que Wound Culture provient de l’album du même nom. Une démarche à rapprocher de celle qui a été consécutive à l’arrivée de Leah Buckareff dans Nadja c'est-à-dire le réenregistrement de tous les disques du groupe qu’Aidan Baker avait produit tout seul. A la différence près que les travaux solo du canadien ont toujours été bien plus légers et aérés que ceux de Nadja. Cela se ressent particulièrement sur Sand Like Skin, titre d’une pop shoegaze à peine dérangée par l’habituelle boite à rythmes et le brouhaha des guitares en arrière-plan. Green & Cold est plutôt à la façon d’un Cure sous champis, d’un metal extrêmement doux et poli par une patine élégante. Beautiful Beast est plus massif mais tout aussi stratosphérique, alternant sur une bonne dizaine de minutes parties chantées translucides et assauts de guitares avant un ensevelissement final comme seul le duo canadien en a le secret. Wound Culture est également un titre long et c’est surtout le plus beau des quatre bien que parfaitement mélodramatique et ressemblant le plus à du Nadja classique : pas de chant, riffs dopés au spleen, rythmique lourde, suites d’accords théâtrales.
En écoutant Belles Bêtes je repense immédiatement au dernier concert de Nadja auquel j’ai pu assister et pendant lequel le groupe n’avait pas su se sortir d’une cacophonie gazeuse jamais maîtrisée : je suis à peu près sûr que Nadja avait alors interprété les chansons de Belles Bêtes sans arriver à trouver le juste équilibre entre la fragilité du chant et des mélodies et le grondement de ses guitares. Je le regrette d’autant plus que ce disque est une réussite.